CONFERENCE LEAGUE (BARRAGES) Steve Birtz est le bénévole, au F91, qui s’occupe des réseaux du club et en fait, petit à petit, un instrument de com’ majeur. L’Europe l’aide beaucoup.
Comment et quand cela a-t-il commencé?
Steve Birtz : La première année que nous sommes allés en phase de groupes de l’Europa League (NDLR : 2018). À l’époque, il s’agissait de Julien Sins, qui avait reçu un contrat et qui avait pour mission de construire le site, le Facebook, l’Instagram… C’est à ce moment que ça a explosé. On avait 6 000 à 7 000 followers. Quand on s’est qualifiés, on a passé la barre des 10 000 et on est montés jusqu’à 12 000. Moi, j’ai rejoint Julien l’année d’après, quand on est retournés en poules, pour aider, parce que j’avais constaté qu’il n’y avait pas grand-chose qui se passait au niveau des vidéos et que de mon côté, j’avais ma petite expérience avec des groupes de musique. Ce qu’on voulait alors, c’était profiter de la vague de l’Europa League pour créer une vraie communauté. Le comité et plus spécifiquement Manou Goergen (NDLR : le directeur sportif du club) avait saisi l’importance de cette communication digitale.
Et c’est vous, un historique du club, qui vous en êtes chargé.
Moi, je suis là depuis les origines, depuis 1991. Mon père, Marcel, est le dernier membre fondateur du comité de l’époque. Récemment, un copain a posté une photo du tout premier match européen du F91, en 1994, à Haïfa et on me voit déjà, enfant. Quand Flavio Becca est arrivé, à la fin du siècle, ça correspondant au moment où je partais à l’université mais je me suis un peu détaché parce que ce qui se passait en coulisses me plaisait modérément. Mais quand la C3 est arrivée… Moi, je gardais en tête le documentaire tourné pendant le Mondial-1998 sur l’équipe de France, Les Yeux dans les Bleus. J’ai toujours aimé ces ambiances de vestiaires. Et moi, quand je suis venu pour aider, c’est la seule condition que j’y ai mise : je voulais être dans le vestiaire, entendre les speechs, saisir les regards des joueurs. La caméra, c’était ma porte d’entrée. Et je voulais faire entrer les gens avec moi.
Le but, c’est que les gens soient littéralement avec l’équipe, dans l’équipe
Quel est votre cahier des charges?
Mais j’ai carte blanche! Et c’est pour ça que j’adore le faire. Je revérifie parfois ce que je poste avec Manou Goergen ou Gerry Schintgen (NDLR : son président), mais l’idée c’est : je me lève le matin, j’ai une idée, je poste. C’est aussi simple que ça. Maintenant, je suis tout seul désormais… Alors même si l’idée est de mettre en place des rendez-vous récurrents, c’est dur de les tenir. Et puis ça reste un club amateur. Je peux caler un rendez-vous avec des joueurs mais il arrive que l’un soit en retard, que l’autre oublie ou se décommande… Mais c’est aussi ce que j’aime : aucune pression. Et les dirigeants comprennent l’importance et font confiance. La preuve : j’ai proposé un budget, on m’a donné le double. Sans que je demande.
Quelle somme de boulot cela représente-t-il pour vous qui êtes bénévole?
Quasiment un deuxième boulot. Une bonne grosse vingtaine d’heures au moins par semaine. Je suis là à tous les entraînements, mais aussi les week-ends parce que le but, c’est que les gens qui viennent nous visiter soient littéralement avec l’équipe. Dans l’équipe. Bref, c’est possible tant que je n’ai ni copine ni chien (il rit).
Vous pourriez en faire un boulot à plein temps?
Ah, mais c’est très envisageable. Si on me le propose, je signe tout de suite! D’ailleurs, je me suis souvent dit que j’aimerais aussi prendre en charge le Facebook de l’académie. Parce que c’est hyper-important et que ça marcherait encore plus fort vu le public jeune.
Que savez-vous de la popularité de votre travail?
Depuis un an, ça se calcule tout simplement, aux nombres de « likes« . Ma seule jauge, c’est ça. Et depuis peu, elle a doublé. Sur les jours de match, avant, on était entre et 100 « likes« . Aujourd’hui, on est presque au double, à 200-250. Et je reçois beaucoup de compliments. Et là où je sens que ça commence à bien marcher, c’est que les gens commencent à se lâcher et même à être méchants. On a des gens qui ne sont pas des suiveurs habituels du club, qui sortent de nulle part et commencent à insulter le club.
Le F91 a des « haters« ?
C’est délicat et moi-même, je ne sais pas trop quoi en faire. C’est un espace public donc de principe, il devrait y avoir une liberté de parole. Mais une autre partie de moi pense : c’est comme dans un joli café. Tu bois ton coup, tu rigoles mais si tu as une personne dans un coin qui fait ch… tout le monde, tu lui demandes de partir. Donc à ceux-là, j’ai envie de dire : le F91, soit tu l’aimes, soit tu te barres. Ou plutôt, « tu n’aimes pas le F91? Je te bloque!« . On a carrément reçu des menaces de mort par Messenger.
Le F91, soit tu l’aimes, soit tu te barres
Des messages de mort?
Ça venait de gens qui avaient misé des paris sur des matches du club et avaient perdu. C’est frustrant de voir toute cette connerie. Il faut avoir les épaules larges pour ce genre de boulot…
Le F91 fait-il figure de précurseur en BGL Ligue?
Cela peut paraître arrogant, mais on est largement en avance sur les réseaux. En termes de followers, je crois que seule la FLF, dans le sport luxembourgeois, en a plus. Même si entre le RFCU, Differdange et Wiltz ont de belles pages. Mais au RFCU, il y a un gars qui est salarié pour le faire. Ma fierté, c’est de le faire en bénévole. D’autant que là, nous sommes arrivés à un tournant en termes de liaison marketing-réseau. Quand vous avez 20 000 à 25 000 oreilles qui s’ouvrent à chaque post, les sponsors commencent à vouloir être sur ce post. C’est ça notre force, en ce moment : avoir cette belle image qu’on transforme doucement en atout financier.
Un peu comme un déplacement à Poznan, dans un stade dingue, contre une équipe historique, pour une qualification qui serait encore folle?
Malheureusement, je suis bénévole. Ce déplacement en Pologne, je ne pourrai pas le faire alors comme quand c’est le cas; mon père et les plus jeunes joueurs de l’effectif, ceux qui savent qu’ils ne joueront pas, vont m’alimenter en photos et vidéos à distance. Fatalement, cela se sentira que le gars de la com ne sera pas là, mais on reste amateurs. Pour la petite anecdote, il n’y a pas longtemps, un supporter m’a interpellé sur les réseaux et s’est insurgé ensuite que je ne lui avais pas répondu. Il avait posté un commentaire qui disait que même quand il écrivait à Chelsea, on lui répondait. Moi, j’ai expliqué : « Cher monsieur, à Chelsea, l’équipe de com se compose de douze personnes« . Il a pris tellement de commentaires des autres internautes qu’il a fini par retirer son post. Tiens d’ailleurs, vous saviez que notre deuxième plus grande base de followers se trouve en Pologne?
L’effet de l’élimination du Legia Varsovie, en 2018?
Eh oui, c’est resté. Des fans du Legia qui ont aimé ce qu’on a fait. Des « haters« du Legia aussi. Plein de gens de Poznan, aujourd’hui, veulent venir nous voir. En fait… il y a beaucoup de romantiques du football, en Europe, qui aiment les petites équipes, pour qui nous sommes une petite référence en termes d’exploits, ces dernières années. Pour les fins connaisseurs, nous sommes l’équipe qui embête les gros depuis des années…
Bravo Steve