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Fit4Gaming : la salle de jeu vidéo itinérante qui favorise l’intégration


Parmi les habitués, de nombreux jeunes Ukrainiens, qui sont arrivés sur le territoire il y a seulement quelques mois. (Photos : julien garroy)

D’une volonté de promouvoir le multiculturalisme et la solidarité est né Fit4Gaming, une salle de jeux vidéo itinérante conçue comme un «centre de rencontre» pour jeunes.

La passion des jeux vidéo coûte cher. D’abord en temps, au regard d’un quotidien cyclique, rythmé en grande partie par les transports, le travail, pour certains, l’école, et ne laissant ainsi qu’une miette pour une partie de FIFA. Puis, pour une large partie de la population, en argent.

En 2020, l’augmentation de 14 % du tarif pour des jeux édités et distribués par Sony ou Ubisoft est venue achever une quinzaine d’années de stabilité des prix dans le marché. Les dysfonctionnements dans les chaînes d’approvisionnement, couplés à la forte demande en produits électroniques, ont également provoqué des ruptures de stock pour les consoles, entraînant de fait une hausse des prix.

Un Éden pour les aficionados du gaming

Comme à l’accoutumée, un tel contexte économique vient raviver l’esprit de solidarité que chacun cultive en soi. Dans le cadre du plan d’action 2022 du département de l’Intégration du ministère de la Famille, de l’Intégration et à la Grande Région, Joe et Kevin Hoffmann ont pris à bras-le-corps la question du gaming comme vecteur d’intégration, dans le volet tant social que culturel : «Fit4Gaming est un projet visant à promouvoir la coopération, l’échange et la solidarité au sein d’un milieu multiculturel via l’utilisation de jeux vidéo», décrivaient les deux frères, tous deux amoureux du dixième art.

Depuis le mois de novembre, l’idée s’est concrétisée en une salle de jeux vidéo accessible gratuitement aux jeunes dans des locaux prêtés par la commune de Differdange, au sein du bâtiment de l’Adem. Tours d’ordinateur lumineuses, poufs colorés et PlayStation 5 tournant à plein régime y trônent. Une sorte d’Éden pour les aficionados du gaming.

Carton plein

Fit4Gaming n’en est qu’au stade de projet pilote, porté par l’entreprise FWRD, bâti par les frères Hoffmann et cofinancé par le ministère de la Famille, de l’Intégration et à la Grande Région. La volonté de l’ancrer à long terme dans le paysage luxembourgeois n’en demeure pas moins affichée, en témoigne le succès du dispositif.

Accessible cinq fois par semaine, entre 16 h et 20 h, la salle est régulièrement complète depuis son ouverture : «Il y avait beaucoup de jeunes Luxembourgeois au début, mais à présent, il y a plus d’Ukrainiens, dont quatre qui reviennent toujours. On a parfois trop de jeunes, donc on leur dit de revenir un peu plus tard», narre Arnaud Claisse, éducateur à Fit4Gaming.

Arnaud Claise (à g.), éducateur à Fit4Gaming, et Joe Hoffmann (à dr.), membre fondateur du FWRD.

Entre les deux rangées de postes, un ballet d’adolescents se forme au son des échanges visant à donner des instructions sur Fortnite. Le temps est à l’expression et au partage de ses compétences en shoot ou en build, sous le regard inquiet, mais altruiste, de ses camarades. «On essaye souvent de favoriser l’intégration par le sport. On a voulu répéter ce projet, mais avec le gaming, retrace Joe Hoffmann, membre fondateur de FWRD. C’est donc un centre de rencontre où des personnes de différentes origines peuvent se retrouver et devenir amies.»

«Le langage universel»

Au fil du temps, les membres du Fit4Gaming ont pu observer les liens se tisser, en dépit des barrières linguistiques et culturelles : «On peut faire des sessions de deux contre deux et on voit que c’est compliqué avec la langue. Mais ils essayent tout de même d’échanger, d’apprendre des mots ou de passer par le jeu pour se faire comprendre», détaille Arnaud, soulignant le «langage universel» des jeux vidéo.

Plusieurs jeunes ont déjà pu tirer parti de cet aménagement, à l’instar de Danill (13 ans) et David (15 ans). Les deux Ukrainiens, originaires d’Odessa et de Kiev, sont des spécialistes de Fortnite, mais n’ont pas le matériel adéquat pour faire tourner le jeu : «Déjà en Ukraine, je devais me rendre dans un cyberclub. Je n’ai toujours pas de PC, mais heureusement qu’il y a cette salle pour que je puisse continuer à jouer», témoigne David, rejoint dans l’idée par Danill : «C’est confortable, j’apprends de nouvelles langues et je peux jouer en mode coopératif, or je ne peux pas avec mon ordinateur depuis chez moi.»

Consolider sa place

À l’origine, Fit4Gaming devait s’implanter à Differdange jusqu’en novembre 2023. Réflexion faite, l’équipe a décidé de rendre le projet itinérant afin de partager cette conception dans l’intégralité du pays. Tous les deux à trois mois, le dispositif sera donc transféré dans une autre ville. Les prochains hôtes seront Luxembourg et Esch-sur-Alzette. Trois autres localités, «sûrement dans le nord du pays», accueilleront par la suite Fit4Gaming. Ainsi, cette première expérience differdangeoise aura eu pour dessein d’établir les premiers jalons et de se positionner comme un acteur d’utilité publique : «Nous travaillons en collaboration avec les maisons des jeunes, Caritas ou des centres de réfugiés», dévoile Kevin Hoffmann.

Le réseau de collaboration ne s’arrête pas là, puisque Be Secure ou le Zenter fir exzessiivt Verhalen a Verhalenssucht sont déjà intervenus auprès des jeunes de la structure dans le cadre de séances de sensibilisation : «Il y a beaucoup d’aspects avec lesquels il faut faire attention, comme le risque de tomber dans un cercle vicieux, notamment quand on entre en compétition», prévient Joe Hoffmann. Une idée à toujours garder en tête, même au bout du vingtième top 1.