Avec une liste mélangeant personnalités expérimentées et figures nouvelles, le LSAP espère remporter un deuxième siège à Bruxelles afin de porter une Europe plus solidaire.
Cotête de liste pour le LSAP, Danielle Filbig se lance pour la troisième fois dans une élection après avoir été élue conseillère communale à Rambrouch et candidate aux législatives en 2023.
Avec Liz Braz et Michaela Morrisova, cette enseignante de 26 ans représente une forme de renouveau que le parti souhaite insuffler à cette campagne, tout en les associant à deux anciens ministres et à l’eurodéputé sortant : Franz Fayot, Mars Di Bartolomeo et Marc Angel.
La liste du LSAP se compose de candidats connus des électeurs et de personnes moins expérimentées. Comment a-t-elle été élaborée ?
Danielle Filbig : On a essayé d’établir la liste la plus forte possible avec trois jeunes femmes et trois anciens députés et ministres qui ont déjà de l’expérience au niveau européen. Et il ne faut surtout pas oublier que même ce que l’on fait au niveau national, ça vient toujours de l’Europe. Ce sont tous des gens qui ont conscience de ce qu’ils font.
Qu’est-ce qui vous a donné envie de vous porter candidate ?
La politique m’a toujours intéressée, mais je suis vraiment devenue active il y a un an pour les élections locales. J’ai fait mes études en sciences politiques et relations internationales à Bruxelles et je travaillais comme freelance en tant que correspondante pour RTL.
Mes activités comme journaliste ne pouvaient pas se mélanger avec la politique. Après mes études, je me suis alors relancée. D’abord aux communales, puis dans le Nord aussi pour les législatives, où j’ai fini quatrième, ce qui était pour moi un très bon résultat. Ensuite, on m’a proposé cette candidature et je me suis dit O. K., je ne me suis pas posé de questions.
Est-ce que les six candidats s’engagent à siéger en cas d’élection ? Ça ne paraissait pas forcément clair pour certains.
Oui, tout le monde souhaite prendre son siège. Mais c’est vrai que ce n’était peut-être pas très clair auparavant.
Quel score espère le LSAP ? Le fait de ne plus être au gouvernement pourrait-il être un frein ?
On espère un deuxième siège, évidemment. Et on veut que la dynamique des élections locales et nationales, où on a augmenté notre score, va se poursuivre. Les socialistes sont encore un parti fort au Luxembourg, qui s’engage vraiment pour les travailleurs et pour les gens les plus vulnérables. Je crois qu’on peut sortir de ces élections-là avec de la confiance et de la force.
Et vous avez un pronostic sur votre score personnel ?
Je sais bien que je suis une des têtes les moins connues avec Michaela (NDLR : Morrisova). Je suis consciente qu’il y en aura peut-être d’autres devant moi. Mais je suis plutôt fière d’avoir cette responsabilité, d’être tête de liste et, pour l’instant, je ne m’intéresse pas vraiment au résultat. Évidemment, j’espère au moins un bon score, mais je n’ai pas peur de sortir plutôt en fin de liste. Je cherche plutôt à me construire sur le long terme pour m’imposer en politique.
Quelles sont les grandes mesures de votre programme ?
Nicolas Schmit a fait passer une directive pour un salaire social minimum au niveau européen. C’est vraiment un fil rouge pour les élections européennes : renforcer le droit du travail et les conditions des travailleurs.
Nous voulons renforcer les droits des gens qui travaillent pour les plateformes dans les grandes villes, parce que ces gens-là n’ont pas de droits, même en Europe. Ce qui est important aussi, c’est d’avoir des pensions et des retraites justes.
Avec l’invasion en Ukraine par la Russie, les gens se posent aussi beaucoup de questions. La sécurité intérieure et extérieure de l’Europe est un grand défi, et nous, en tant que LSAP, on soutient une armée au niveau européen. Enfin, il faut aussi renforcer les secteurs de la santé. C’est très important d’investir dans ceux-ci, notamment dans l’inclusion des gens en situation de handicap.
Dans votre programme, vous parlez aussi d’un Green Deal au cœur rouge, qu’est-ce que cela signifie ?
On dit toujours que la transition écologique, ce n’est que pour les riches, que c’est trop cher. Et c’est vrai que ce n’est pas toujours évident. Il faut vraiment construire cette transition de façon à ce qu’elle soit équitable pour tout le monde. C’est ça le cœur rouge, que tout le monde ait accès à cette transition.
Pour avancer sur certains dossiers, comme l’immigration, il faut qu’on abandonne le principe de l’unanimité
Nicolas Schmit veut aussi porter la question du logement, qui est un gros problème au Luxembourg, au niveau européen.
Le logement, c’est un grand souci pour les jeunes, entre autres. Moi, je suis encore jeune et je le vois dans ma génération. Dans les grandes villes par exemple, les plateformes comme Airbnb poussent les loyers à la hausse. Il faut vraiment investir dans le logement au niveau européen. Je suis persuadée que l’Union européenne peut en faire plus.
Le LSAP souhaiterait-il revenir sur le pacte immigration voté récemment ?
Marc Angel a voté pour ce pacte, mais je sais qu’il est loin d’être parfait. Ce n’est pas une solution à long terme pour résoudre ce défi. Pour Marc, ce n’était pas facile de voter en sa faveur, mais il l’a fait pour avoir au moins une base. Pour lui, c’était toujours mieux que rien.
En tant que sociaux-démocrates, on veut une coordination plus efficace sur les dossiers de politique d’immigration au niveau européen. On veut que les droits de l’homme soient respectés et surtout que l’aide humanitaire ne soit pas punie. Avec ce nouveau pacte, ce qui m’inquiète, c’est le fait que des États membres peuvent payer pour ne pas prendre des réfugiés.
Pour avancer sur certains dossiers, comme l’immigration, il faut qu’on abandonne le principe de l’unanimité. Il y a beaucoup de projets sur la politique étrangère ou la défense qui sont bloqués par d’autres pays. On veut vraiment se lancer dans ce débat. Parce que, pour réagir efficacement, surtout dans des situations d’urgence, si on attend que tout le monde vote favorablement, on ne va jamais y arriver.
Cette dernière mandature a été marquée par un certain nombre de crises (guerre en Ukraine, covid, inflation…) dont l’Europe a réussi à sortir, mais est-ce qu’elle ne doit pas se renouveler ?
Quand je parle aux gens des élections européennes, tout d’abord, ils disent qu’ils ne sont pas très intéressés. C’est difficile, à chaque crise, de regagner la confiance des gens à travers l’Union européenne. C’est un grand défi, en tant que candidate, de rendre cette campagne importante. Il faut souvent rappeler qu’à la base, l’UE est un projet de paix, qu’unis on est plus forts, et qu’il ne faut pas voter pour des partis qui veulent diviser notre société.
L’Europe, ce n’est pas seulement quelque chose qui est loin, à Bruxelles ou à Strasbourg, et qui ne nous concerne pas. Il faut montrer aux gens qu’on vit l’Europe tous les jours; ce sont les frontières, c’est l’euro, le multiculturalisme…
La montée de l’extrême droite est une des craintes de ce scrutin. Est-ce un danger au Luxembourg ?
Ce sont vraiment des choses qui nous inquiètent. Parce que nous, on veut faire une politique qui ne divise pas la société. L’extrême droite joue avec la peur des gens et c’est un problème. Au Luxembourg, l’ADR s’est renforcé aux dernières élections, c’est une réalité.
Peut-être qu’il va aussi avoir un bon score aux élections européennes. Ça serait dangereux, parce qu’on irait dans une direction plus conservatrice qui mettrait en danger les droits des femmes, par exemple. On l’a vu en Italie avec l’avortement.