La séparation de l’Église et de l’État, actée depuis 2018, force le culte catholique à s’autofinancer. Hier, le nouveau Kierchefong a présenté son premier bilan. L’année 2021 s’est soldée par un déficit.
Les trois dernières années de transition ont été très difficiles.» Marianne Bausch-Koenig, la présidente du Kierchefong, ne cache pas que le divorce entre l’État et l’Église a été dur à avaler. «Dans l’ancien système, la gestion des églises ne nous coûtait pratiquement rien. Les communes ont très souvent pris en charge les déficits des fabriques d’église», complète la dirigeante du nouveau «Fonds de gestion des édifices religieux et autres biens relevant du culte catholique», en bref, le Kierchefong.
Les 102 fabriques d’église implantées dans les 102 communes du pays existent toujours. Elles sont désormais regroupées dans 33 paroisses. Toutes ces entités, en charge de la gestion des quelque 500 églises et chapelles que compte encore le Luxembourg, sont réunies depuis 2018 sous le toit du Fonds. Le soutien populaire reste entier. Les différentes fabriques comptent quelque 1 000 bénévoles. Par contre, le Kierchefong dépend en très grande partie des collectes, dons et legs.
23 paroisses sur 33 sont déficitaires
Le Fonds dispose en outre d’une manne immobilière assez considérable, même si ce patrimoine a une valeur limitée. «Nous sommes obligés de mobiliser notre patrimoine pour générer des revenus», souligne Marianne Bausch-Koenig. Ces revenus servent uniquement pour la gestion et le fonctionnement des fabriques d’église. «Les édifices doivent être entretenus, rester propres et êtres chauffés. De plus, il nous faut organiser des salles pour les cours de religion», résume la présidente. Même si le Kierchefong dispose de 1 410 hectares de terrains, dont 10 hectares qui sont constructibles, des difficultés demeurent pour garder le cap financier. «L’objectif n’est certainement pas de s’enrichir. Notre mission est de permettre aux paroisses d’assurer leur fonctionnement», insiste Marc Wagener, économe général de l’Église et administrateur du Fonds. Autre précision : «Le Kierchefong n’est pas l’Église. Nous ne sommes qu’une entité parmi d’autres».
Hier, le premier bilan a été présenté. Il ne s’agit pas d’une obligation légale, mais dans un souci de transparence et «pour permettre une discussion plus rationnelle», le conseil d’administration du Kierchefong a décidé de «mettre les chiffres sur la table». L’année 2021 s’est soldée par un déficit de 375 000 euros. En soi, pas énorme en tenant compte du patrimoine global (lire ci-contre). «Malheureusement, les différentes paroisses ne disposent pas des mêmes moyens. Les fabriques d’église ont en partie une ancienneté de plus de 200 ans. Chacune a un patrimoine et des liquidités qui varient», fait remarquer Marc Wagener. Le bilan présenté hier repose d’ailleurs sur les comptes séparés des 102 fabriques d’église. «Le Fonds n’est pas un seul grand pétrolier, mais plutôt une flotte de navires plus ou moins grands», reprend l’économe général. Sur les 33 paroisses, 23 sont déficitaires.
2 millions d’euros pour l’énergie
Avec l’explosion des coûts de l’énergie, le défi d’instaurer un mécanisme de solidarité entre les paroisses et les fabriques d’église gagne encore de l’ampleur. «Beaucoup ont compris que nous ne pouvons pas laisser tomber en faillite des paroisses», affirme Mgr Leo Wagener, évêque auxiliaire pour l’archidiocèse de Luxembourg. Les pourparlers avec le terrain sont engagés pour renforcer la solidarité entre les fabriques, à l’échelle des paroisses, le tout avec le concours du Fonds.
En attendant, des solutions à plus court terme sont recherchées pour passer l’hiver. «Au pire, nous allons chauffer une seule église par paroisse et chauffer a minima les autres édifices afin d’éviter le gel. Limiter la température entre 12 et 14 °C est une autre option», avance Marianne Bausch-Koenig. Pour 2022, les coûts d’énergie devraient atteindre les 2 millions d’euros. Un autre million d’euros devrait s’ajouter en 2023.
Afin de générer davantage de recettes, le Kierchefong va quitter la piste du logement abordable, à réaliser avec le ministère du Logement. Le rendement accordé par l’État ne serait pas suffisamment élevé pour que l’investissement soit rentable pour le Fonds. «Nous pouvons réaliser des logements sociaux, mais nous avons besoin de revenus. Il n’est pas souhaité par le ministère que des acteurs extérieurs s’investissent dans ce domaine», fustige la présidente.
Les chiffres clés du budget
TOTAL DU BILAN Le total des actifs au 31 décembre 2021 représente 128 millions d’euros.
ACTIFS PHYSIQUES Les «immobilisations corporelles» ont une valeur de 58 millions d’euros. Il est à noter que 17 millions d’euros de cette somme correspondent à des projets immobiliers qui ont été livrés en 2021.
LIQUIDITÉS Les paroisses disposent de liquidités à hauteur de 63 millions d’euros. Elles sont issues pour près de la moitié (28 millions d’euros) de cessions d’éléments d’actifs qui sont réinvestis. Le reste des liquidités est réparti entre les 102 fabriques d’église pour assurer le fonctionnement local des paroisses.
RÉSULTAT Le bilan 2021 se solde par un léger déficit d’environ 875 000 euros. Côté recettes sont à noter 27,4 millions d’euros. Il faut en déduire la vente d’actifs immobiliers pour une somme de 28,3 millions d’euros. Le retrait de ces actifs explique le déficit évoqué ci-dessus.
DETTE La dette cumulée par les différentes entités du Kierchefong se chiffre à 35,6 millions d’euros.
Bon exemple : la commune de Mersch a financé la rénovation des orgues! Un grand geste mérite un grand Merci!