Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ? C’est ce que reproche le syndicat de l’enseignement (SEW) à Claude Meisch et à sa politique néo-libérale pratiquée ces dix dernières années.
Égalité des chances, inclusion, pénurie d’enseignants, réforme du cycle inférieur, digitalisation… «On ne peut pas reprocher à Claude Meisch de n’avoir rien fait. Nous dénonçons un activisme et des décisions qui n’ont pas été prises en concertation avec les acteurs du terrain.»
Le SEW reproche à Claude Meisch de faire cavalier seul et de vendre la peau de l’ours avant de l’avoir tué. Le ministre aurait un peu trop tendance à pratiquer l’auto-promotion sans attendre de résultats concrets sur lesquels baser ses analyses et à «justifier ses mesures et réformes par des interprétations personnelles de rapports plus ou moins pertinents». «Il a systématiquement recours à un procédé pseudo-scientifique pour légitimer ses actions», regrette Joëlle Damé, présidente du syndicat enseignant.
Ces dix dernières années de politique néo-libérale en matière d’enseignement n’auraient été qu’un échec. Elles n’auraient contribué qu’à compliquer inutilement le système scolaire luxembourgeois et à creuser encore davantage les inégalités.
Joëlle Damé ne mâche pas ses mots et souligne au stylo rouge l’échec du ministre de l’Éducation nationale, qui aurait notamment «manqué de courage». «Claude Meisch a choisi la voie la plus simple pour résoudre la crise de l’enseignement au Luxembourg en laissant les écoles internationales se développer en un système parallèle», note-t-elle.
«Elles sont présentées comme des tremplins pour les enfants qui ont des difficultés scolaires, mais ce n’est pas vrai. L’élève lusophone au statut socio-économique faible n’atterrit pas dans ces établissements.» Lundi après-midi, l’une de ces écoles internationales a été inaugurée à Differdange. Elles proposent une alphabétisation dans la langue maternelle des élèves, ce qui doit doper leurs chances de réussite scolaire, selon le ministre.
Les élèves, notamment lusophones, issus de milieux aux statuts socio-économiques bas resteraient les grands perdants d’un système scolaire complexe composé de passerelles et d’innombrables sections dès l’école primaire, critique le syndicat qui le compare à un labyrinthe. Les solutions proposées sont inadaptées car elles ne prennent pas en compte l’expertise des professionnels du terrain.
«Pas un grand pédagogue»
«La réponse du ministre est une sorte d’externalisation du problème aux écoles internationales. Il délègue la responsabilité à un système scolaire parallèle pensé à la base pour les enfants de diplomates et hauts fonctionnaires européens. Ces écoles ne sont pas adaptées aux problèmes et à la situation spécifique du Luxembourg. (…) Elles ne réduisent pas les inégalités», regrette Vera Dockendorf. Elle assure qu’un système scolaire très (trop ?) stratifié n’aide que les familles socio-économiquement stables et perd les autres. «Claude Meisch a démontré qu’il n’était pas un grand pédagogue et que la recherche de solutions pédagogiques ne l’intéressait pas.»
Le SEW s’est dit, hier matin, lassé des promesses non tenues et d’être considéré comme quantité négligeable, fatigué de devoir se battre contre les incohérences et les failles du système. Il espère entretenir de meilleurs rapports avec le prochain ministre de l’Éducation nationale qui, le syndicat l’appelle de ses vœux, l’écoutera et le prendra au sérieux. «Nous espérons avoir à nouveau les moyens de pouvoir remplir notre mission principale qu’est l’éducation», annonce Joëlle Damé.
Pour cela, le syndicat apparenté à l’OGBL a développé un catalogue de mesures qui vont d’une utilisation plus réfléchie de la digitalisation lors des cours à une formation continue des chargés de cours, en passant par une expertise indépendante du projet pilote d’alphabétisation en français ou par une réforme complète du système d’apprentissage des langues du cycle 1 aux classes de première secondaire. Le syndicat demande également, entre autres, un débat public pour déterminer si un système scolaire morcelé est une solution pour plus d’égalité des chances.
Reste à savoir si Claude Meisch sera recalé ou passera en troisième cycle à l’issue des prochaines législatives. Le syndicat des enseignants n’est, quant à lui, clairement pas favorable à sa reconduction au poste de ministre de l’Éducation nationale.