Astrid Lulling a gagné. Exclue il y a quatre ans, avec sa fédération, du Conseil national des femmes, elle revient par la grande porte après une décision de justice. Reste à cohabiter.
La justice a définitivement tranché en faveur de la Fédération nationale des femmes luxembourgeoises qui contestait son exclusion du Conseil national des femmes du Luxembourg (CNFL). L’affaire avait fait grand bruit en décembre 2019 alors que la très pittoresque présidente de la FNFL, Astrid Lulling, criait au scandale et promettait de réintégrer le conseil d’administration dont elle avait été évincée après une entrevue qui avait tourné au vinaigre avec la Grande-Duchesse Maria Teresa.
Aujourd’hui, Astrid Lulling se fend d’un communiqué dans lequel elle remercie Me Gaston Vogel, avocat de la fédération, «d’avoir gagné définitivement le procès contre le Conseil national des femmes du Luxembourg». Sans manquer de rappeler, bien sûr, que la FNFL, sous la présidente Liliane Thorn-Petit, a été à l’initiative de la création du CNFL.
«Le bureau exécutif de la FNFL se concertera sans délai pour décider de la marche à suivre en vue de sa prochaine réintégration au CA du CNFL», s’empresse d’indiquer la FNFL qui savoure sa victoire.
Que s’est-il passé en 2019? Une réunion au château de Berg, dans le courant de l’été 2020, est à l’origine de ce désordre. Ce jour-là, le CNFL a une entrevue avec la Grande-Duchesse Maria-Teresa au cours de laquelle l’épouse du chef de l’État se plaint du traitement réservé aux femmes dans les monarchies et plus généralement de la situation des femmes au Luxembourg.
L’ancienne eurodéputée, au franc-parler légendaire, fait des bonds de son fauteuil. Selon une participante à cette réunion, l’ancienne femme politique se serait offusquée de ce constat dressé par la Grande-Duchesse qui signifierait que les combats que mènent les organisations depuis les années soixante au Luxembourg n’auraient pas porté leurs fruits.
La Grande-Duchesse avait également déclaré que les femmes en monarchie étaient discriminées. Décidément, Astrid Lulling ne peut partager ce constat et le fait savoir à la Grande-Duchesse. D’abord, elle lui rappelle que les épouses des rois sont des reines, alors que les époux des reines ont le titre de prince. Elle estime avoir démontré à la Grande-Duchesse que ce sont les hommes qui peuvent prétendre être des victimes de discrimination dans le gotha.
L’ombre de l’ADR
La conseillère stratégique de la Grande-Duchesse, Chékéba Hachemi, avait quant à elle estimé que le drapeau qui flotte au château de Berg et qui indique la présence ou non du chef de l’État, devait aussi être hissé pour la Grande-Duchesse. L’ancienne députée européenne s’était alors chargée de lui rappeler les règles en la matière, bien décidée à laisser l’église au milieu du village.
Pendant cet échange, les autres représentantes du CNFL fixaient le bout de leurs chaussures. Un moment extrêmement gênant. Astrid Lulling aurait «discrédité et humilié» le Conseil, comme il l’avait écrit à la présidente qui n’allait pas tarder à être durement sanctionnée pour ce comportement qui passe mal sous les ors du château. L’ancienne eurodéputée assume et finit par quitter Colmar-Berg, diplomatiquement escortée jusqu’à la sortie.
Une autre porte allait se refermer sur elle, celle du CNFL. Pas seulement sur elle, mais sur la FNFL. Aujourd’hui, les deux personnages qui la représentent sur la scène médiatique sont Astrid Lulling et Sylvie Mischel, secrétaire générale et accessoirement présidente des femmes ADR. Si la FNFL a été exclue de l’organisation faîtière, Sylvie Mischel y est pour quelque chose. Le Conseil national n’en voulait pas alors qu’elle avait fait sa demande d’adhésion au nom des femmes ADR, comme il existe les femmes socialistes. Le parti populiste et rétrograde qu’elle représentait cadrait mal avec les objectifs du CNFL.
Elle parvient néanmoins à faire son entrée au conseil d’administration par le biais de la FNFL d’Astrid Lulling. Elle ne tarde pas à éveiller les soupçons du CA qui l’accuse de servir de cheval de Troie à l’ADR. Il en veut pour preuve le dépôt d’une question parlementaire de Fernand Kartheiser au lendemain d’une réunion concernant le patronage de l’Orange Week. L’intéressée a toujours démenti être responsable des fuites.
Pour le Conseil national des femmes, il n’était plus question de tolérer plus longuement la présence de cette fédération en son sein. Il lui faudra pourtant la réintégrer.