Un policier décédait et sa coéquipière était gravement blessée en service dans un accident il y a quatre ans. Le procès a débuté ce lundi après-midi au tribunal de Diekirch.
Ce qui ne devait être qu’un simple contrôle routier sur la N7 a viré au drame. Dans la nuit du 13 au 14 avril 2018, un automobiliste a tenté d’échapper au contrôle en faisant demi-tour sur la route près de Weiswampach. Il est immédiatement pris en chasse par une voiture et une camionnette de police qui le perdent.
Les policiers décident d’arrêter une voiture pour demander à sa conductrice si elle n’a pas croisé le fugitif. La réponse est négative. La voiture de police fait demi-tour et est percutée de plein fouet par la camionnette. Un policier de 39 ans est tué et sa coéquipière est très gravement blessée.
Le conducteur en fuite avait caché sa voiture sur le parking d’une station-service à Weiswampach. Steve S. comparaît cette semaine face au tribunal d’arrondissement de Diekirch pour conduite en état d’ivresse. Il avait un taux de 1,22 gramme d’alcool par litre de sang.
Le chef d’inculpation d’homicide involontaire a été abandonné à son encontre en mars dernier par la chambre du conseil de la cour d’appel de Luxembourg qui a estimé qu’il n’existait pas de lien direct entre son refus d’obtempérer et l’accident mortel. S’il pouvait prévoir que des policiers chercheraient à le suivre, il ne pouvait envisager que par la suite, les deux véhicules de police entreraient en collision.
Le policier, Steve R., au volant de la camionnette au moment des faits, doit répondre seul d’homicide involontaire et de coups et blessures involontaires. La victime est décédée sur les lieux de l’accident des suites de complications dues à ses blessures au crâne, selon une médecin légiste.
Elle a évoqué hier la possibilité d’un choc entre la tête du policier et le toit de la voiture et incriminé la grande vitesse à laquelle l’impact a eu lieu. Sa passagère a pu être sauvée, malgré, elle aussi, de graves blessures à la tête. La jeune femme, lourdement handicapée, subira les séquelles de l’accident à vie.
«Sur les chapeaux de roues»
«J’ai vu un policier nous faire signe de nous arrêter. Si je l’ai vu, Steve S. a dû le voir aussi», se souvient l’ami du prévenu qui l’accompagnait le soir des faits. Ils étaient allés dîner et boire des verres. «Il est parti sur les chapeaux de roues. J’ai vu que la voiture fonçait à 180 kilomètres à l’heure.» Steve S. vire à gauche et cache sa voiture sur le parking d’une station-service avant de reprendre la fuite en passant par la Belgique.
Les images de vidéosurveillance de la station-service permettront à la police de retrouver la voiture, une Audi A5, puis son propriétaire. La gueule de bois a été sévère et pas uniquement en raison de la demi-bouteille de pinot noir d’Alsace et de la dizaine de bières consommées. L’automobiliste reconnaît les faits.
«On ne savait pas qu’ils allaient faire demi-tour», note un des policiers-stagiaires assis dans la camionnette. «Je pense que dans la précipitation, les deux chauffeurs ont mal réagi. Il n’a pas dû regarder dans son rétroviseur avant de faire sa manœuvre et nous arrivions trop vite.» Trop vite, mais pas assez pour mesurer un quelconque danger, selon lui.
«Manque de communication»
Cette nuit-là, sept agents de police, un chien et quatre policiers-stagiaires étaient occupés à un contrôle antidrogue lancé par la policière gravement blessée. Différentes patrouilles de la région étaient impliquées, raconte l’enquêteur de l’Inspection générale de la police (IGP) qui a mené l’enquête. Il avait été décidé de contrôler les trains en provenance de Belgique, un établissement de nuit et un bal qui avait lieu à Weiswampach. En attendant l’arrivée des premiers fêtards, il a été décidé de procéder à un contrôle de papiers de véhicules.
«Un stagiaire a fait signe à la voiture de s’arrêter avec une matraque lumineuse. La nuit était claire, le conducteur n’a pas pu ignorer les signes», explique le jeune policier dont une des jambes a été cassée dans l’accident. Steve S. aurait fait demi-tour à 87 mètres du lieu du contrôle.
Reste à comprendre comment l’accident a pu avoir lieu. La conductrice de la voiture arrêtée par le binôme aurait dit au policier décédé, après qu’il lui a permis de reprendre sa route, qu’elle ne pouvait pas, parce «qu’une autre voiture de police arrivait». Le choc est violent. Le moteur de la voiture de patrouille a été expulsé à une centaine de mètres du lieu d’impact.
Selon l’enquêteur de l’IGP, «le manque de communication» et «un manque d’instruction» seraient en cause. Le passager de chaque véhicule de police aurait dû, en cas de course poursuite, selon une brochure interne à la police qui ne fait pas office de règlement, indiquer en permanence la position de l’équipage avec la radio.
En outre, lors de ce genre de contrôles, il serait d’usage de mettre en place «une voiture précurseur pour identifier ou arrêter les voitures qui tournent». Ce qui n’était pas le cas.
Le procès se poursuit jeudi, vendredi et lundi prochain.