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[Cyclisme] Christine Majerus : «C’est pour ça qu’on fait du vélo !»


Christine Majerus, ici avec Demi Vollering : «J’étais contente de finir ce Tour mieux que je ne l’avais commencé!»

Christine Majerus revient sur le Tour de France et son grand succès populaire, mais pas seulement…

Après ce Tour de France, dans quelles dispositions vous trouvez-vous?

Christine Majerus : Je suis un peu fatiguée, c’est sûr qu’on a eu des journées intenses avec la course, les transferts. Mais cela reste des courses par étapes d’une semaine comme on en a déjà disputé auparavant. Mais c’est vrai qu’avec le profil des deux derniers jours, on en sort un peu fatiguée (elle rit).

Votre chute dans la première étape a semblé contrarier votre rendement dans les étapes suivantes, puis on vous a retrouvée dans les derniers jours…

Surtout que j’avais déjà chuté la veille du départ, le samedi à l’entraînement. Du coup, ça faisait deux chutes d’affilée. C’était beaucoup et j’étais clairement à côté de la plaque pour les deux premières étapes. Cela n’était pas comme je l’avais espéré. J’ai essayé de survivre à ce moment-là, en essayant d’aider mon équipe là où je le pouvais.

C’était un peu frustrant et j’étais déçue de ne pouvoir en faire plus. Puis, à partir de mercredi, je me suis sentie mieux et, à partir de là, j’ai fait ma part de boulot, j’ai travaillé dans les échappées. J’étais contente de finir ce Tour mieux que je ne l’avais commencé!

Et on vous a retrouvée comme sur les autres grandes courses…

C’était plaisant en effet, car au début, ce n’était pas la joie… L’étape du lundi à Provins était une étape de placement, de bordures, quelque chose qui me réussit bien habituellement. Le lendemain, à Épernay, c’était peut-être un peu trop dur pour moi, mais lors de l’étape de graviers (Bar-sur-Aube), je me sentais mieux, mais pas encore au top.

C’est surtout pour l’étape de Provins que j’ai des regrets. Ce n’était pas moi. Mes coéquipières ont bien réussi, ce qui m’a permis de ne pas baisser les bras et de me dire que ça irait mieux. Preuve en est. Je suis fière d’avoir pu continuer à croire en moi et de m’être battue. Fière de ne pas avoir abandonné.

Car tout aurait pu aller très vite…

Oui, on dit qu’il n’y a pas de petite chute. Et c’est vrai. Sur les Champs-Élysées, lors de la première étape, ce n’était pas une chute importante. Contrairement à celle du samedi, où j’avais glissé sans raison apparente. D’ordinaire, je n’ai pas l’habitude de chuter… Au final, il faut garder en tête qu’avec ou sans ça, mes objectifs n’étaient pas personnels. Ce qui m’a permis de continuer.

Que retenez-vous de marquant dans ce Tour de France?

Je retiens que le public a répondu présent, tout simplement. J’étais un peu sceptique au départ et j’avais dit que je voudrais bien me laisser convaincre du contraire. On m’a convaincu du contraire. Les gens étaient là, au bord des routes. C’était comme on peut se l’imaginer au Tour de France, que ce soit hommes ou femmes. Ça fait plaisir de constater que ce public n’est venu que pour nous.

C’était plaisant et on se dit que c’est pour ça qu’on fait du vélo! Ce n’est pas pour passer à la télé et voir son image dans le journal le jour d’après. Mais pour partager des émotions avec ceux qui nous encouragent. Cela a pris tout son sens. Je suis contente d’avoir pu vivre ça. J’espère que ça va devenir la norme pour les coureurs qui vont suivre ma génération et j’espère qu’ils n’auront pas à se demander si ça va continuer ou non.

Cet engouement populaire, on peut le retrouver ailleurs, dans d’autres épreuves?

La seule course où réellement j’ai ressenti ça, c’était lors des championnats du monde, c’était lors des JO de Londres, c’est de temps en temps des compétitions en Angleterre, car ils font sortir les enfants des écoles. Ou encore cette année au Tour des Flandres, le même jour que la course hommes. J’étais entrée en première position dans le Quaremont et c’était la folie. Pour ce Tour de France, les gens ont choisi d’être là. Du départ à l’arrivée, tout au long du circuit. Cela fait chaud au cœur. Cela intéresse beaucoup de monde.

Le meilleur moment, c’était la montée du Petit Ballon où j’ai fait une bonne performance. En plus, ma famille avait inscrit nos noms tout au long de la montée, c’était très motivant

Qu’avez-vous pensé de la médiatisation?

La médiatisation est plutôt bonne ces dernières années sur les réseaux sociaux. Elle était au top. Qui dit médiatisation dit aussi côté qu’on ne veut pas trop. Là, en début de Tour, on a parlé beaucoup des chutes, alors que franchement, il y en a tous les jours, que ce soit chez les garçons ou chez les filles.

Il y avait une chute qui a choqué avec l’Australienne (NDLR : Nicole Frain, qui a percuté Marta Cavalli dans la deuxième étape) qui fauche tout le monde. Cela a mis le feu aux poudres et cela nous a énervées. On a trouvé ça un peu sexiste. Du coup, cela a caché le fait que ce Tour était un succès populaire et on trouvait qu’il fallait parler de ça et pas d’autre chose. On ne peut pas plaire à tout le monde, mais cela s’est vite calmé.

Au niveau sportif, Demi Vollering, qui termine deuxième (derrière Annemiek Van Vleuten) et remporte le classement de la montagne, a bien joué son rôle…

Oui, je suis fière d’elle. Franchement, c’est comme une victoire, très clairement. Elle a montré qu’elle avait les capacités de remporter le Tour. Elle a tout fait bien dans sa préparation et était au top de sa forme. Preuve en est, samedi (la veille de l’arrivée), elle a battu tous ses records de puissance et, pourtant, elle prend trois minutes et demie.

Oui, il n’y a pas de regrets à avoir. Deuxième, c’est sa place et, en plus, elle remporte le maillot à pois. Avec le succès d’étape de Marlen (Reusser), d’un point de vue collectif, on repart satisfait. Demi (Vollering) reviendra avec l’idée de faire encore mieux. Si (Annemiek) Van Vleuten prend sa retraite, ça devrait aller.

Comment voyez-vous l’avenir du Tour de France Femmes?

J’ai toujours été très claire sur ça, avec des équipes de six, il ne faut pas que ce soit plus long en jours de course. On a fini à quatre après une maladie et une chute. Devoir défendre une place de deuxième au général en étant seulement trois, c’est compliqué. On ne peut pas excéder huit à dix jours. Au niveau de la difficulté, il faut garder raison. Pour l’étape de samedi, au lieu des trois cols, deux auraient suffi. Cela aurait mis moins de monde en difficulté.

Pour finir, quel meilleur moment et quel pire moment garderez-vous en tête?

Le meilleur moment, c’était la montée du Petit Ballon où j’ai fait une bonne performance. En plus, ma famille avait inscrit nos noms tout au long de la montée. C’était très motivant et lorsqu’on voit qu’on marche et qu’on se retrouve dans le bon wagon, avec tous les spectateurs, ça pousse un peu plus. Et dans le Grand Ballon, une fois lâchée, les gens étaient là pour m’acclamer quand même.

J’ai fait coucou à tout le monde. C’était vraiment sympa. Mon pire moment, c’est dans l’étape de Provins, où je me fais lâcher comme une grosse m…, on peut dire ça comme ça. Je pédalais dans la semoule, j’étais l’ombre de moi-même. J’essayais juste de rallier l’arrivée, mais même ça, cela m’était difficile. J’étais contente quand ça s’est arrêté. C’était aussi la moins bonne étape de l’équipe, avec cette échappée qui part sans nous, alors que mes coéquipières avaient les moyens d’y aller. C’était une déception générale.