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«Bridderhaus» à Esch : de l’hôpital à la résidence d’artistes


Bientôt, la bâtisse va sortir de la torpeur dans laquelle elle avait été plongée et reprendre vie. (Photos Julien Garroy)

Le premier hôpital d’Esch-sur-Alzette, un temps légué à l’État, a été rendu à la commune. Remis en état, il sera exploité dans le cadre du projet «Capitale culturelle européenne Esch 2022».

Les clés du Bridderhaus remis officiellement à la Ville d'Esch/AlzettePortes et fenêtres du rez-de-chaussée sont condamnées. Sombre et abandonné, le bâtiment se dresse, tel un vaisseau fantôme, à l’angle des rues Léon-Metz et Mathias-Koener à Esch-sur-Alzette. Une lourde porte en fer à l’arrière donne accès au bâtiment. La lumière du jour se fraye un chemin entre les lattes de bois et la poussière qui obstruent les vitres. L’électricité est débranchée et certaines pièces sont plongées dans l’obscurité. Au sol, les carreaux de ciment sont recouverts de poussière et de gravats tombés du plafond. Des lambeaux de tapisserie ancienne tombent des murs. Les peintures s’effritent et les cloques d’humidité explosent les plâtres.

L’endroit est étrange et pourtant apaisant. Des petites pièces, d’anciennes chambres, bordent les couloirs. Sur certaines portes figurent encore les noms des personnes qui ont occupé les bureaux sur lesquelles elles ouvrent. Des ampoules nues tombent de plafonds que seules des lattes en bois retiennent. L’escalier en bois qui monte à l’étage n’a qu’un rôle provisoire. Au bout d’un long couloir se dresse une ancienne chapelle. Une pièce vide en demi-cercle dont seules les alcôves en forme d’ogives renseignent sur la fonction.

Bientôt, la bâtisse va sortir de la torpeur dans laquelle elle avait été plongée et reprendre vie. Rénovée, elle accueillera et hébergera des artistes en résidence pour Esch 2022. Cette idée de résidence et d’atelier d’artistes pourrait perdurer au-delà du projet. La «Bridderhaus» doit sa sauvegarde aux caractères artistique et atypique de son architecture. Ses pignons à gradins sont plutôt typiques des bâtiments type Renaissance des Flandres et des Pays-Bas. La rareté de ce style architectural dans notre région a valu au bâtiment d’être classé monument national.

Les clés du Bridderhaus remis officiellement à la Ville d'Esch/Alzette

L’histoire continue

Si le futur de cette grande maison reste encore à écrire, son passé est fort riche. La «Bridderhaus» a été construite en 1878 par les dirigeants de l’usine métallurgique Metz qui avaient besoin d’un hôpital pour prendre la santé de leurs ouvriers en charge. À l’époque, la localité ne disposait pas d’un tel établissement. L’essor de la sidérurgie grandissant, la population d’Esch-sur-Alzette en fit de même– à la veille de la Première Guerre mondiale, elle comptait plus de 21 000 habitants –et l’hôpital dut se développer.

Les clés du Bridderhaus remis officiellement à la Ville d'Esch/Alzette

Au début du XXe siècle, la fondation Norbert-Metz (du nom du plus célèbre des frères ayant fondé l’usine d’Esch-Schifflange et obtenu l’autorisation pour la transformation du minerai de fer) a mis deux frères religieux, «Bridder» en luxembourgeois, à la tête de cet hôpital qui comptait 42 lits et des infrastructures de pointe pour l’époque, dont une salle d’opération et un solarium.

Quand le centre hospitalier Émile-Mayrisch (CHEM) fut construit en 1930, le bâtiment a perdu sa vocation et est devenu une maison de soins pour les retraités et les invalides de l’ARBED. Elle sera administrée par des religieux jusqu’en 1981. En 1963, l’ARBED en a fait don à la ville d’Esch-sur-Alzette qui en a relégué la propriété à l’État. La fondation Hëllef Doheem a pris le relais des religieux de 2003 à 2010. Depuis, la bâtisse était à l’abandon.

L’histoire de la «Bridderhaus» continue d’être étroitement liée à celle de la ville d’Esch-sur-Alzette. Jeudi, le ministre des Finances, Pierre Gramegna, a remis les clés de la bâtisse au bourgmestre de la ville, qui en récupère la jouissance. Les transformations vont pouvoir commencer.

Sophie Kieffer