Lors de sa présentation des vœux, le sidérurgiste a appuyé ses objectifs de lutte contre la production de CO2 en passant par la relocalisation.
Comme en 2022, ArcelorMittal a continué à se débattre en 2023. Le sidérurgiste, dont le siège se trouve au Luxembourg, présentait ses vœux, hier, sur son site de Belval et profitait de cette occasion pour revenir sur l’année écoulée et pour annoncer les chantiers qui feront l’année à venir. En 2023, l’entreprise a, à nouveau, vu ses bénéfices chuter. En raison d’une demande mois forte, les prix de l’acier ont encore plongé.
En conséquences, un bénéfice avant intérêts, impôts, dépréciation et amortissement de 1,87 milliard de dollars pour le troisième trimestre 2023, soit une baisse de 28 % de ses bénéfices par rapport au trimestre précédent. Seul point positif, ce chiffre reste supérieur aux prévisions réalisées par les analystes.
Lors de son allocution de mercredi, Henri Reding, «Country Head Luxembourg» chez ArcelorMittal, tire la sonnette d’alarme vis-à-vis de la situation. «L’acier reste un produit qui sera consommé et qui va se développer, mais nous devons trouver des solutions pour que l’industrie ait un avenir en Europe. Il faut éviter le CO2», prévient celui qui a succédé à Roland Bastian durant l’été. «Dès que nous payons une taxe CO2, les coûts de productions sont plus élevés, ici. Par le passé, l’Europe était l’un des plus gros producteurs d’acier, aujourd’hui, le continent est devenu un importateur.»
Henri Reding rappelle qu’aujourd’hui 20 % de la consommation d’acier en Europe sont importés. «Sans soutien des politiques, cela va être difficile et ces investissements continueront à aller ailleurs dans le monde.»
Inflation, hausse des coûts de l’énergie, bénéfices en baisse… le «Country Head Luxembourg» admet tout de même que 2023 s’est bien passé. En termes de production, le sidérurgiste annonce environ 1,9 million de tonnes d’acier brut. Un chiffre qui stagne par rapport à 2022, mais qui ne diminue pas. Parmi les bons points de l’année écoulée, on retiendra une entente avec les États-Unis où sont achetées des poutrelles réalisées à Differdange et à Belval ou encore des projets tels que la fabrication des torches et des chaudrons pour les Jeux olympiques et paralympiques Paris 2024.
Relocaliser au Luxembourg
L’objectif phare d’ArcelorMittal, entamé depuis plusieurs années, reste de ne plus payer de taxe CO2, en baissant de 35 % ses émissions d’ici à 2030 et en atteignant la neutralité carbone d’ici à 2050. Un projet écologique qui amène avec lui des bénéfices financiers.
En mai dernier, le sidérurgiste annonçait un investissement de 67 millions d’euros dans un nouveau four à arc électrique sur le site de Belval, avec le soutien de 15 millions apporté par l’État. Et si le four électrique sera installé à Belval, le site de Rodange est également concerné. Le projet intitulé Steelup! a pour objectif «de relocaliser la production étrangère sur l’aciérie de Belval». Il a été détaillé, chier, par Michael Szefer, chef de projet.
Dans les faits, l’aciérie de Rodange est, à ce jour, majoritairement alimentée par deux hauts-fourneaux. L’un est situé à Dabrowa Górnicza, en Pologne, et l’autre se situe à Duisbourg, en Allemagne. Soit respectivement à 1 300 km de transport ferroviaire pour le premier et à 350 km pour le second. Grâce à ces hauts-fourneaux, elle peut confectionner un acier premium destiné aux rails. Belval n’intervient que très peu dans cette production en ne fournissant qu’une partie minime de cette alimentation. Qui plus est, cette participation est destinée à des produits de moindre qualité.
Un four électrique amène moins de consommation d’énergie et plus de production
L’idée derrière le projet Steelup! est de relocaliser et d’alimenter le site de Rodange uniquement depuis Belval via le fameux four à arc électrique. D’un rendement 10 à 15 % supérieur, ce four sera moins énergivore et permettra de réaliser de nouveaux produits spécialement pour le laminoir de Rodange. Seul hic souligné par Michael Szefer : la production d’un four électrique est moins qualitative que celle d’un haut-fourneau.
Pour résoudre cette problématique, ArcelorMittal a sorti le chéquier et a investi. C’est un four électrique tout neuf qui vient remplacer l’actuel datant de 1996. «Cela amène plus de sécurité et d’ergonomie, moins de consommation d’énergie, plus de production et une meilleure qualité de l’acier», liste Michael Szefer.
Au niveau du calendrier, la livraison et le prémontage de cette imposante structure aura lieu au début de cette année. À cheval entre décembre 2024 et janvier 2025 aura lieu la mise en place finale. «Le nouveau four est monté à côté de l’ancien. Afin de ne pas trop perturber la production, cette dernière étape sera faite au tout dernier moment, lors d’un arrêt collectif», indique le chef de projet. Dès le mois de janvier 2025, la première charge sera lancée. Le nouveau four qui sera labelisé XCarb, label qui rassemble tous les produits et activités de fabrication d’acier à teneur réduite, faible et nulle en carbone d’ArcelorMittal, devrait permettre l’économie d’un rejet de 200 000 tonnes de CO2 par an en Europe.
Un nouveau siège comme symbole
Dernier projet phare mis en avant lors de cette conférence de presse : le nouveau siège d’ArcelorMittal au Kirchberg. Les travaux qui ont débuté en juin 2023 devraient prendre fin en 2026. Conçu par Wilmotte et Associés, qui avait pour mission de «concevoir un bâtiment moderne et durable qui exploite tout le potentiel de l’acier de haut en bas», le nouveau siège d’ArcelorMittal veut être une vitrine de l’utilisation de l’acier dans la construction durable.
Le bâtiment incorpore 10 000 tonnes d’acier ArcelorMittal, principalement produit au Luxembourg à partir d’acier recyclé. Les poutres sont fabriquées à partir d’acier XCarb de sources recyclées et renouvelables, dont l’empreinte carbone est sept à huit fois inférieure à celle de l’acier conventionnel, ce qui représente une économie de plus de 10 tonnes de CO2 par poutre, selon l’entreprise. Près de 2 600 personnes devraient y travailler. «Le plus beau reste à venir», positive Henri Reding.
Comment fonctionne un four électrique ?
Un four électrique produit de l’acier à partir de ferraille recyclée et peut fonctionner uniquement à l’aide d’énergies renouvelables. Ce procédé, au-delà de ses avantages en matière de recyclage de ferraille, permet de diviser par six les émissions de CO2 par rapport à une production d’acier réalisée via la voie classique à l’aide de hauts-fourneaux.
ArcelorMittal au Luxembourg
3 368 employés – «Un chiffre en baisse d’année en année», souligne Henri Reding
6ᵉ employeur du Luxembourg
67 nationalités
6 unités de production ((deux aciéries et quatre laminoirs) et une unité d’usinage au Grand-Duché
1,9 million de tonnes d’acier brut produites en 2023
Une production d’acier réalisée à partir de 98,5 % de matériel recyclé en 2023 (95,4 % en 2022)
505 millions d’euros injectés dans l’économie luxembourgeoise via les salaires, les cotisations sociales et les paiements aux fournisseurs locaux
Le CO2 est le gaz de la vie.
Sans CO2, nous sommes tous morts.
Quant à son effet sur le climat, l’avenir prouvera qu’il est négligeable ou nul.