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Au lycée de Bonnevoie, les jeans s’offrent une nouvelle vie


Avec sept de leurs camarades, Yara et Zhuvenal gèrent tous les aspects de leur entreprise, de la gestion du capital à la vente en passant par la fabrication de leurs produits. (Photos : hervé montaigu)

Créée par des élèves du lycée technique de Bonnevoie, la mini-entreprise SecondHome propose de récupérer de vieux vêtements pour en faire des coussins.

L’atelier n’a rien à envier à ceux des professionnels. Bien alignées sur les plans de travail, les machines à coudre attendent les membres de SecondHome, l’une des deux mini-entreprises du Lycée technique de Bonnevoie (LTB). Pour le moment, seuls deux d’entre eux sont là. En seconde commerce et gestion (classe 2GCG1), Yara et Zhuvenal reviennent sur la genèse de leur petite société qui a vu le jour quelques semaines après le début de la rentrée scolaire.

«L’idée est venue d’un de nos camarades qui se plaignait d’avoir mal au fessier à force de rester assis», raconte Zhuvenal. Très vite, les neuf créateurs de SecondHome (qui compte également Johnny, Elodie, Muhammadou, Rohit, Matteo, Denis et Samy), encadrés par deux professeurs, imaginent un coussin qu’ils pourraient vendre à leurs condisciples mais aussi dans d’autres lycées luxembourgeois. Reste à trouver comment les fabriquer. «Le thème de l’année, c’est l’écologie. On a donc décidé de récupérer des jeans que les gens ne portent plus.» Ils commencent à récolter la matière première directement chez eux ainsi qu’auprès de leurs proches. Ils collaborent aussi avec des associations locales comme Kolping Lëtzebuerg et Solina Jongenheem qui leur ont fourni gratuitement des paires de jeans ainsi que des chemises, car celles-ci peuvent également faire l’affaire. «Nous avons aussi mis des affiches dans le lycée pour récupérer des vêtements auprès des élèves.»

Une trentaine de coussins produits

Pour la fabrication, le procédé n’a rien de bien compliqué, d’autant qu’ils sont aidés par un coach issu du monde professionnel, qui leur a notamment appris à utiliser les machines à coudre. «Avec des ciseaux, on coupe le jean à partir des jambes. On le coud ensuite autour d’une coque qui est remplie de billes de polystyrène», détaille Yara. «Je les récupère dans un centre de recyclage où j’ai déjà travaillé», ajoute Zhuvenal. La coque, qui donne sa forme au coussin, est le seul élément que les jeunes entrepreneurs achètent. Chacun a sa tâche, ce qui permet d’optimiser le processus de fabrication. «Le plus dur, c’est de coudre les tirettes. Nous avons déjà fabriqué une trentaine de coussins et vendu environ la moitié.» Si SecondHome ciblait d’abord les lycéens et les chaises pas toujours confortables sur lesquelles ils passent leur journée, l’entreprise a rapidement opéré quelques changements dans sa stratégie marketing. «On s’adresse plutôt aux adultes qui ont besoin de décoration chez eux pour leur proposer des coussins uniques.» Les modèles faits à partir de chemises sont vendus 25 euros tandis que ceux en jean coûtent 30 euros l’unité. Les élèves ont découvert l’expérience de la vente lors d’un marché commun des mini-entreprises organisé au centre commercial de la Belle Étoile par Jonk Entrepreneuren Luxembourg, l’association instigatrice de ces projets.

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Les coussins sont remplis de billes de polystyrène récupérées au centre de recyclage.

Car le but est aussi de faire découvrir aux lycéens le fonctionnement d’une entreprise et le monde du travail. Les membres de SecondHome n’ont pas seulement dû réfléchir à un produit. Il leur a aussi fallu trouver des financements et gérer leur capital. Si le LTB met la main au portefeuille, c’est surtout grâce à leurs proches que les adolescents ont financé leur idée. «Nous devions tous vendre dix actions à 5 euros.» Mais à leurs yeux, l’entreprise va au-delà de cet aspect purement mercantile. «Nous voulions aussi inciter les gens à avoir un comportement plus écologique.»

Cette mission de sensibilisation, ils auront jusqu’à la fin de l’année scolaire pour la mener à bien. Mais rien ne les empêchera de continuer par la suite. D’ici là, d’autres challenges les attendent, notamment un partenariat avec Caritas ainsi que l’ouverture éventuelle d’un pop-up store. «Nous allons aussi participer à une compétition face à d’autres mini-entreprises.»

Le chiffre : 4

Quatre millions de tonnes de vêtements sont jetées chaque année en Europe. Un chiffre colossal, surtout si on le met en parallèle des 5 millions de tonnes produites. L’industrie textile serait aussi responsable de 20 % de la pollution des eaux à cause des teintures et des traitements. C’est en partant de ce constat qu’est née SecondHome et son idée de recyclage de jeans en coussins. «Un de nos buts était de sensibiliser les personnes à l’importance de l’écologie», explique Zhuvenal.

La mode est l’une des industries les plus polluantes au monde et l’une des plus consommatrices en eau (selon un rapport de l’ONU, il faut 7 500 litres d’eau pour fabriquer un jean). Arrivée au début des années 2000, la fast-fashion (des vêtements produits en masse au coût le plus bas possible) a accéléré ce phénomène. Fabriqués pour la plupart en Asie du Sud-Est, les vêtements sont aussi de gros émetteurs de CO2 puisqu’ils sont majoritairement transportés en avion, même si une grande part de leur empreinte carbone est due à la production en elle-même. Selon la Fondation Ellen MacArthur, la fabrication de coton ainsi que de matières synthétiques artificielles et naturelles entraîne le rejet de 1,2 milliard de tonnes de gaz à effet de serre.

 

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