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Asselborn : «Poutine a perdu son omnipotence»


Jean Asselborn (2e de g.) a notamment échangé, hier, avec les ministres des Affaires étrangères d’Espagne (1er à g.), d’Allemagne, de Bulgarie, de Finlande, de Belgique et de Roumanie (de g. à d.). (Photo : union européenne)

Pour le ministre luxembourgeois des Affaires étrangères, Jean Asselborn, la mutinerie avortée du groupe Wagner a fait perdre au président russe son «omnipotence». Des inquiétudes existent pourtant.

Quelles sont les répercussions des évènements de samedi en Russie sur la guerre en Ukraine, mais aussi sur la sécurité sur le Vieux Continent? C’est avec cette interrogation dans leurs bagages que les chefs de la diplomatie des 27 États membres de l’UE sont arrivés, hier matin, à Luxembourg pour une réunion régulière du Conseil des Affaires étrangères. La conclusion la plus claire est que la «seule chose que l’UE doive faire, c’est de continuer à soutenir l’Ukraine». Sur ce point, les ministres étaient tous d’accord, validant d’ailleurs au passage une nouvelle dotation de 3,5 milliards d’euros pour la Facilité européenne pour la paix (FEP), notamment utilisée pour financer leurs fournitures d’armes à l’Ukraine.

Jean Asselborn, le ministre luxembourgeois des Affaires étrangères, s’est également montré clair sur un point. «En premier lieu, il faut constater que Poutine a perdu son omnipotence», a-t-il lancé devant la presse internationale. Le doyen du Conseil a qualifié d’«extraordinaire» la mutinerie avortée du groupe Wagner contre le régime russe. «Poutine a voulu négocier d’égal à égal avec le président américain, Biden. Maintenant, il a dû négocier avec un dictateur et un bandit», ironise à peine un Jean Asselborn qui fait illusion au président biélorusse, Loukachenko, qui a joué les intermédiaires, pour stopper la marche sur Moscou des troupes d’Evgueni Prigojine, leader de la milice Wagner.

Une certaine inquiétude accompagne néanmoins ces propos. Le chef de la diplomatie luxembourgeoise voit un double problème. À commencer par le fait que «la seule raison d’être du régime de Poutine est la guerre en Ukraine. On peut craindre que des attaques encore plus brutales soient lancées». Le coup de théâtre de samedi peut-il néanmoins constituer un tournant? «Je l’espère, mais rien n’est moins sûr», répond Jean Asselborn.

«Ce qui s’est passé au cours de ce week-end montre que la guerre contre l’Ukraine est en train de fissurer le pouvoir russe et affecte son système politique», estime de son côté Josep Borrell, le chef de la diplomatie de l’UE (lire également ci-dessous). «Il est devenu très clair qu’avec la brutale guerre d’agression qu’il a déclenchée, Poutine détruit son propre pays», renchérit Annalena Baerbock, la ministre allemande des Affaires étrangères.

6 000 têtes nucléaires, des douzaines de milices

Cette évolution comporterait toutefois aussi un danger, comme le fait remarquer son homologue luxembourgeois. «Le monopole de la violence en Russie n’appartient plus à l’État. Il est très fragmenté. Or, nous parlons du plus grand pays au monde qui compte 6 000 têtes nucléaires. C’est pourquoi la situation est très dangereuse», développe Jean Asselborn. Il s’empresse de préciser «ne pas vouloir défendre Poutine. Mais si le pouvoir se fissure et si plus personne ne sait vraiment qui détient le pouvoir, cela peut devenir dangereux pour l’Europe et le monde entier». Le ministre luxembourgeois des Affaires étrangères tient à rappeler que le groupe Wagner n’est pas la seule menace : «Le danger est qu’une des douzaines d’autres milices existantes en Russie obtienne la mainmise sur les têtes nucléaires.»

La mise en garde de Jean Asselborn est partagée par plusieurs collègues. «Ce n’est certainement pas une bonne chose qu’une puissance nucléaire comme la Russie puisse entrer dans une phase d’instabilité. C’est aussi quelque chose qu’il faut prendre en compte», affirme Josep Borrell. «Nous ne pouvons pas rester indifférents à ce qui se passe en Russie», abonde le chef de la diplomatie autrichienne, Alexander Schallenberg.

Les ministres européens des Affaires étrangères avaient aussi à cœur, hier, de souligner que les évènements de ces derniers jours sont une affaire intrarusse. «Il s’agit d’un bras de fer interne. Il n’est pas question d’une immixtion de l’UE», insiste Annalena Baerbock. «Notre seule intention est de soutenir l’Ukraine et de lui permettre de retrouver la paix et son intégrité territoriale», complète Alexander Schallenberg.

La meilleure nouvelle de la réunion d’hier est probablement l’unité toujours affichée par les 27. «Je n’ai pas ressenti la moindre division entre les États membres. Ces évènements ont constitué un catalyseur pour notre unité», conclut Josep Borrell lors de la conférence de presse de clôture de la réunion, organisée hier à Luxembourg.

David Marques avec AFP

Un commentaire

  1. Quand a M. Asselborn, il a perdu tout sens de la mesure, sinon le sens commun.