Le régulateur boursier indien interdit à PWC d’auditer pendant deux ans les sociétés cotées et leurs filiales. Le cabinet est accusé de négligence dans l’affaire Satyam, du nom du groupe informatique dont les bilans avaient été falsifiés.
Le scandale Satyam avait éclaté en 2009 quand le patron du groupe informatique, Ramalinga Raju, avait reconnu avoir falsifié les bilans de son entreprise à hauteur de 1,7 milliards de dollars, afin d’en gonfler les bénéfices. Ce scandale avait été d’autant plus retentissant qu’il touchait le modèle du capitalisme indien, aux mains de grandes familles en principe réputées pour leur probité. À l’époque, les comptes de Satyam avaient été audités et certifiés conformes par PWC Bangalore.
Surnommé parfois l’«Enron indien», le scandale Satyam a refait surface ces derniers jours quand le gendarme boursier a interdit à PWC d’auditer pendant deux ans les sociétés cotées en Inde ainsi que leur filiale, selon une information du quotidien économique français Les Echos daté du 16 janvier.
« Anomalies flagrantes »
La Securities and Exchange Board of India (SEBI) a pris cette décision à l’issue d’une enquête qualifiée de « longue » et ayant mis en évidence la responsabilité de PWC dans le scandale, l’un des plus importants ayant touché le monde de l’entreprise privée sur le sous-continent. « L’auditeur a négligé de vérifier des anomalies pourtant flagrantes » dans les comptes de Satyam, écrit la SEBI dans un rapport de 108 pages détaillant son enquête.
De 2003 à 2008, Satyam avait gonflé ses bénéfices en émettant des milliers de fausses factures, rapporte la SEBI. Pour le gendarme boursier indien, si cette tromperie a pu durer cinq ans, c’est en raison d’un manque de « vérifications de la véracité des déclarations mensuelles ». Outre l’interdiction d’auditer pendant deux ans les grandes entreprises indiennes, la SEBI a également condamné PWC Bangalore à rembourser les « gains injustifiés » de 2,1 millions de dollars perçus par le cabinet pour la certification des comptes.
6,5 millions d’euros d’amende en Grande-Bretagne
Cet épisode indien fait suite à une autre condamnation de PWC à une amende de 6,5 millions d’euros, le 16 août dernier, par le Financial Reporting Council (PRC), le gendarme des marchés au Royaume-Uni. Dans cette affaire, le cabinet est sanctionné pour des erreurs lors de la vérification de l’exercice clos le 30 juin 2011 de l’entreprise de services RSM Tenon Group. Faisant profil bas face au FRC, des responsables de PWC avaient reconnu que « son comportement était bien en dessous de ce qui est attendu de la part d’un cabinet et qu’il n’avait pas réussi à se conformer au principe fondamental de compétence professionnelle et de diligence de l’ICAEW – l’Institut des comptables agréés en Angleterre et au Pays de Galles ».
Bien qu’il ne soit pas directement poursuivi ou mis en cause, PWC Luxembourg voit la Commission européenne contester la légalité du tax ruling qu’il a accordé à Amazon, condamné par l’exécutif européen à rembourser 250 millions d’euros d’impôts non perçus au Grand-Duché. Le gouvernement luxembourgeois a fait appel de cette décision devant la Cour de justice de l’Union européenne. PWC Luxembourg défend pour sa part la conformité des accords fiscaux anticipés qu’il a secrètement négociés avec les autorités luxembourgeoises pour le compte de multinationales et qui avait été révélés à la faveur du scandale LuxLeaks.
En Inde, PWC est également réticent à reconnaître une erreur : le cabinet se dit « déçu par le verdict » et nie avoir « agi de manière intentionnelle». Il affirme avoir «tiré les leçons de l’affaire Satyam» et assure avoir désormais « investi dans un audit de qualité ». Ce n’était donc pas le cas avant cela ?
Fabien Grasser