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Accord tripartite : des doutes persistent


Gouvernement, patronat et syndicats ont ficelé, tard mardi soir, un accord de principe. La signature définitive du paquet «anti-inflation» est attendue pour mercredi.  (Photo : hervé montaigu)

Le paquet «anti-inflation», ficelé mardi soir par la tripartite, suscite des réactions très controversées. Le manque de sélectivité sociale est notamment fustigé. De plus, un important flou persiste.

Au bout de trois jours et de plus de 30 heures de tractations, le soulagement était palpable, tard mardi soir, au château de Senningen. Le Premier ministre, Xavier Bettel, a souligné l’importance que le gouvernement, les syndicats et le patronat aient réussi à dégager un accord de principe sur un paquet de mesures «sans précédent». L’objectif est clair : «Notre souci premier a été de briser la spirale inflationniste. C’est dans l’intérêt des citoyens et des entreprises», souligne la ministre des Finances, Yuriko Backes. L’État va débloquer une enveloppe de 1,1 milliard d’euros pour amortir le choc de la flambée généralisée des prix.

L’optimisme affiché par les membres de l’équipe gouvernementale n’est cependant pas partagé par tout le monde. «Il n’y a aucune raison de se réjouir. Nous sommes toujours confrontés à une guerre et à la crise énergétique qui en découle», est venu souligner, hier sur RTL Radio, le président de l’Union des entreprises luxembourgeoises (UEL), Michel Reckinger. Dès mardi soir, il s’était montré «peu enthousiaste» sur l’accord trouvé.

L’UEL n’est pas ressortie rassurée de la tripartite. Les régimes d’aides décidés pour les entreprises nécessitent, en effet, encore l’approbation par la Commission européenne. Le plafonnement des prix du gaz et de l’électricité, ainsi que le subventionnement du mazout vont profiter aux seuls ménages. La réduction de la TVA profitera, par contre, à la fois aux salariés et aux patrons.

D’une manière plus globale, un doute persiste quant à savoir si les mesures retenues (lire ci-dessous) vont effectivement permettre de freiner l’inflation, comme le prédit la ministre des Finances. «La hausse de 6,6 % annoncée par le Statec doit, grâce au paquet ficelé, être réduite de 4 points de pour cent pour se limiter à un plus de 2,6 %», avançait mardi soir Yuriko Backes.

Si les calculs du Statec ne se confirment pas, le compromis trouvé sur l’index risque aussi de devenir caduc. Pour l’instant, il est prévu qu’une prochaine tranche régulière ne tombe pas avant février 2023. Un second index sera à verser deux mois plus tard. Il s’agit de celui reporté de juillet dernier à avril 2023. Importante précision : le crédit d’impôt énergie, visant à compenser le non-versement de la tranche indiciaire de cet été, restera bien d’application jusqu’à fin mars 2023.

Le pouvoir d’achat des citoyens sera augmenté par la hausse mécanique du salaire social minimum (+3,3 %) en janvier prochain. Ce qui est bien pour les ménages pèse par contre plus lourdement sur les patrons. «Les entreprises, tout comme les gens, sont fortement impactées par la situation. Nous faisons néanmoins partie de la solution. On se montre, donc, solidaires et nous espérons que l’économie va réussir à surpasser ces temps difficiles», fait remarquer Michel Reckinger. 

Le son de cloche est bien plus positif dans le camp syndical. OGBL, LCGB et CGFP se félicitent que la manipulation de l’index, décidée par la tripartite de fin mars, soit levée. De plus, le pouvoir d’achat des personnes est renforcé. Ces deux grands acquis font que la revendication d’une adaptation du barème d’imposition à l’inflation a été mise entre parenthèses. «Nous avons pleinement conscience que cette discussion ne pouvait pas être menée lors de cette tripartite. Cela ne veut pas dire que le sujet soit classé», met toutefois en garde Nora Back, la présidente de l’OGBL. 

Les partis d’opposition peu enchantés

Les partis de l’opposition parlementaire ne sont pas très enchantés par le résultat de la tripartite. «L’index est sauf», se félicite notamment Gary Diderich, le co-porte-parole de déi Lénk sur Twitter. «Mais le propriétaire d’une villa de 4 000 m2 se voit subventionné par le contribuable», fustige-t-il en faisant référence au manque de sélectivité du plafonnement des prix de l’énergie.

Sven Clement (Parti pirate) dit «OK» à l’accord. Le député fustige, lui aussi, le manque de sélectivité. «Il existerait à mes yeux de meilleures approches pour agir, mais le compromis trouvé est à respecter», lance l’élu sur les réseaux sociaux.

Le CSV estime que le paquet «va dans la bonne direction». Si le plafonnement des prix est salué, le principal parti d’opposition regrette toutefois la non-adaptation du barème fiscal à l’inflation.

L’ADR martèle toujours que ce sont les sanctions décrétées contre la Russie qui plongent le pays dans la crise. Quoi qu’il en soit, le parti réclame la réintroduction d’un rabais à la pompe et l’abolition de la taxe carbone.