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Abus sexuels : selon l’OKaJu, les enfants seront mieux protégés


L’ombudsman fir Kanner a Jugendlecher (ombudsman pour enfants et jeunes), Charel Schmit, salue les avancées du projet de loi qui renforce le droit pénal en matière d’abus sexuel. (Photo : Didier Sylvestre)

Le médiateur pour les droits des enfants, l’OKaJu, a avisé le projet de loi de Sam Tanson qui renforce le droit pénal en matière d’abus sexuel sur des mineurs. Un grand pas en avant.

Le Luxembourg s’était fait rappeler à l’ordre par la Commission en octobre 2019 pour avoir tardé à mettre en œuvre les règles relatives à la lutte contre les abus sexuels et l’exploitation sexuelle des enfants ainsi que contre la pédopornographie. La ministre de la Justice, Sam Tanson, a depuis présenté un projet de loi qui satisfait Charel Schmit, l’ombudsman pour les droits des enfants (OKaJu), qui émet cependant quelques critiques.

«Le renforcement projeté du droit pénal en matière sexuelle est une étape importante dans la lutte contre les violences sexuelles et l’exploitation sexuelle contre les enfants», a déclaré Charel Schmit.

Si les auteurs d’infractions sexuelles issus du milieu familial sont plus sévèrement punis, il manque toujours au Luxembourg des statistiques qui renseignent sur l’origine des auteurs. Or quand il s’agit de parent proche, cela provoque les pires traumatismes, qui ne peuvent souvent être abordés que des décennies plus tard.

Une étude allemande indique que dans les cas d’abus dans le cadre familial, les victimes affirment que ce sont le plus souvent leurs parents qui sont les auteurs. Près d’un auteur sur deux est le père biologique, le beau-père ou le père nourricier, selon cette étude. Au total, l’étude dénombre 87 % d’hommes et 13 % de femmes. «Le Luxembourg n’est certainement pas une exception, mais il manque de telles études», regrette le médiateur.

Des faits imprescriptibles

Dorénavant, il n’y a plus de prescription pour les abus sexuels commis sur des mineurs, et érigés en infraction autonome, quand ils ont lieu dans le cercle familial ou de confiance.

«L’imprescriptibilité retenue pour les abus sexuels les plus graves sur mineur va dans le sens d’une reconnaissance de la gravité de ces actes ainsi que des traumatismes et circonstances personnelles pouvant empêcher le mineur victime, y compris une fois devenu adulte, d’une dénonciation rapide des faits», relève l’OKaJu dans son avis sur le projet de loi.

La victime doit avoir la possibilité de dénoncer les crimes bien des années plus tard, et selon l’experte allemande Susanna Greijer qui a conseillé l’OKaJu, en plus des poursuites pénales par la justice, «il faut réfléchir à d’autres voies pour traiter et reconnaître les crimes commis il y a de nombreuses années».

Les poursuites pénales ne sont toutefois pas la seule chose qui doit être améliorée en matière de lutte contre les crimes sexuels. «À partir du moment où une agression est signalée aux autorités policières, la personne concernée doit également bénéficier d’un accompagnement psychothérapeutique dès la première heure», affirme Charel Schmit.

L’OKaJu estime encore que l’introduction de la notion d’«atteinte à l’intégrité sexuelle» pourrait mener à confusion. Il préfère évoquer «une atteinte sexuelle» qui se suffit à elle-même sans aller chercher ses effets sur la victime.

Formation et thérapie

Si des efforts en termes de formation ont été déployés au niveau de la police et de la justice, il faut les poursuivre, encourage l’OKaJu, surtout en ce qui concerne le dépistage précoce de la violence sexuelle et de l’exploitation sexuelle ainsi que l’accompagnement socio- et psychothérapeutique, précise l’experte allemande.

L’OKaJu demande en outre une interdiction d’exercer certaines professions pour les personnes qui travaillent avec des enfants et qui les agressent. Une interdiction qui pourrait aller de dix ans à la perpétuité, selon la gravité de l’acte.

La répression est une chose, la thérapie en est une autre, et elle mérite d’être développée dans la mesure où «les thérapies pour les délinquants sexuels sont un élément important de la prévention des agressions sexuelles», souligne Charel Schmit.

Traque sur le net

Les auteurs du projet de loi ne font pas de différence entre les abus sexuels commis dans la vraie vie ou en ligne.  À ce propos, l’OKaJu attire l’attention sur la nouvelle initiative pour une législation européenne renforcée visant «à prévenir et à combattre les abus sexuels sur internet à l’encontre des enfants», présentée le 11 mai dernier.

Les services en ligne seront obligés de passer au crible les contenus de leurs utilisateurs à la recherche de représentations, d’abus et de manipulation psychologique, même dans les chats cryptés. «D’aucuns y voient une brèche dans la protection des droits fondamentaux et mettent en garde contre une surveillance généralisée sans motif et sans aucun soupçon», indique l’OKaJu.

Nulle part dans le monde ne sont diffusées autant d’images et de vidéos sur les abus sexuels d’enfants que dans l’Union européenne. Près de 90 % des sites internet contenant du matériel d’abus sexuels des enfants dans le monde se trouvent sur des serveurs européens.