Le festival Rock-A-Field qui s’est tenue ce week-end à Roeser est un terrain de jeu parfait pour faire la fête, même à 30 ans, un âge où l’on a encore envie de vivre des émotions fortes et de s’éclater.
Les festivals de musique sont souvent des lieux de perdition, des zones de non-droit pour la raison et la morosité où la fête et la musique sont un cocktail puissant qui, au fil des années, épuise les corps quoi que l’on en dise. Faire quatre jours de festival en Belgique, à Werchter, à Dour, aux Ardentes ou encore au festival allemand Rock am Ring, c’est assez simple à 20ans.À 30 ans, votre corps commence à vous faire comprendre qu’il serait préférable d’opter pour de longs week-ends pépères avec une soirée fromage et vin entre amis. Oui, avoir 30ans, c’est pompant, alors au diable les soirées pépères et en route pour le Rock-A-Field!
Dès l’entrée, les trentenaires prennent de plein fouet leur âge. À droite, à gauche, que des jeunes, des très jeunes! Ça fait mal sur le coup, mais après un petit rafraîchissement, on est vite attiré par la grande scène centrale (A Stage) où le groupe Tommek commence à mettre l’ambiance. Là, il n’y a plus d’âge. On retrouve nos 20 ans et notre corps aime ça pendant 40 minutes sous une chaleur dont on avait oublié qu’elle était possible au Luxembourg. On enchaîne avec Tuys, le groupe luxembourgeois d’indie-pop. Pour Tun, le chanteur du groupe, pas besoin de forcer, le public luxembourgeois était déjà tout acquis à sa cause.
Pas le temps de souffler, on se retourne et on revient devant la scène centrale pour découvrir pour la première fois au Luxembourg Tyler, the Creator, un rappeur californien iconoclaste. Dès les premières secondes, les mains se lèvent et le beat fait jumper les festivaliers. Du son, du lourd, où il est difficile de savoir qui bouge le plus entre le rappeur qui ne tient pas en place et la foule qui ne cesse de sauter sur le flow de ce vrai bad boy US. « Je ne connaissais pas du tout Tyler, mis à part une vidéo sur YouTube. Franchement, je ne suis pas du tout déçu, il a mis le feu», souligne Karla, une jeune festivalière. Même constat pour Mike, présent à ses côtés : « Je ne pensais pas qu’il mettrait autant d’ambiance sur la scène .»
Retrouver ses 20 ans à 30 ans
Après deux heures, il est temps de repasser par la case rafraîchissement, histoire de trouver un second souffle. Le site du Rock-A-Field est assez grand pour se poser sur l’herbe. Même un peu en retrait de la scène, on peut profiter des concerts. On ne nous a pas menti, l’ambiance est bien différente d’un festival traditionnel. On se croit presque sur une plage avec une très grosse sono.
Y a pas à dire, le «c’était mieux avant» ne tient pas une seule seconde. Une fois les batteries rechargées, on retourne dans la foule. Sur la grande scène, Ghinzu fait son apparition, et d’un coup nos 30 ans nous paraissent très, très loin. Le groupe de rock belge n’a pas pris une ride, enfin de loin. Mais au niveau du son, c’est toujours au top. « Je ne sais absolument pas qui est ce groupe, mais j’aime bien », avoue Christie, 19 ans. On enchaîne avec Prinz Pi sur la scène BGL BNP Paribas. Ce rappeur allemand, autoproclamé «meilleur rappeur à texte» d’Allemagne, a trouvé son public au Rock-A-Field si l’on en croit le monde devant la scène.
Il fait chaud sur le site du Rock-A-Field et les allers-retours vers le Food Village font du bien aux organismes. Cela laisse également le temps de se poser sur un hamac dans un espace à l’ombre, histoire de recharger les batteries pour se défouler devant Deichkind. Ce groupe allemand complètement barré est haut en couleur. Loufoques et multicolores, ces Hambourgeois réussissent à faire drôlement cohabiter l’electro et le rap. On termine cette première journée en apothéose avec l’electro puissante de Vitalic.
Après une courte nuit dans le camping, on retourne devant la BGL BNP Paribas Stage pour écouter When ‘Airy Met Fairy (WAMF), emmené par la chanteuse Thorunn Egilsdottir. Ouvrir le deuxième jour du Rock-A-Field n’est pas une mince affaire, entre le soleil qui tape et les organismes qui ont souffert lors du premier jour, WAMF a le mérite d’ouvrir les festivités en douceur avec un son electropop assez féerique. Il faut dire que cette seconde journée s’annonce assez brutale avec à la chaîne Gogol Bordello, The 1875, Puggy et les Pixies. De quoi bien s’échauffer avec la retransmission de la finale de l’Euro-2016 à côté de la Bofferding Stage.
22 h, on s’approche de la fin et on n’a franchement pas envie de penser au travail qui nous attend le lendemain. Alors on se déchaîne sur Austinn et enfin sur Steve Aoki, une valeur sûre pour clôturer ce festival. Un festival, à 30 ans, c’est comme une bonne cure de jouvence, et pour être franc, ça fait du bien de retrouver pendant deux jours ses 20 ans à 30 ans… Même si ça fait mal le lendemain!
Jeremy Zabatta / Photos Tania Feller
Une affiche moyenne ? Et alors !
L’affiche du festival n’est pas, en fin de compte, la priorité des festivaliers. Au contraire de la fête.
On ne va pas s’en cacher. Quand les noms des groupes qui allaient jouer au Rock-A-Field sont tombés il y a quelques semaines, les premiers commentaires furent assez négatifs.
Il faut dire que le public du RAF (Rock-A-Field) est un public trop gâté. Il a pris l’habitude de voir dans les champs du Herchesfeld depuis 2006, des groupes comme Placebo, Franz Ferdinand, The Killers, The Kooks, Kasabian, Arcade Fire, Artic Monkeys, Motorhead, C2C, Skrillex ou encore le mastodonte de l’édition 2015, Muse. « On n’est pas venues pour les artistes, mais pour passer deux jours entre amis, au soleil, avec des bières. On choisit d’aller voir tel ou tel concert le matin même. L’important est de s’amuser. Pour être franche, je ne connais pas la moitié des groupes qui passent au Rock-A-Field », expliquent Cindy et Maria, deux jeunes festivalières qui sont venues avec une bonne quinzaine d’amis.
Pour certains, l’essentiel n’était donc pas sur la scène. Pour d’autres, l’affiche a manqué d’un peu de peps, mais n’a pas déçu pour autant : « Avec Tyler, the Creator et Deichkind, l’ambiance a été dingue. Je ne crois pas qu’il faille forcément des grosses stars pour faire bouger les gens », a souligné Marco, un fidèle du Rock-A-Field depuis quatre ans. Pour Sarah, il faut être pragmatique : « On est au Luxembourg, il ne faut pas non plus s’attendre à avoir le même niveau d’artistes que les gros festivals des pays voisins », explique Jil, une festivalière, avant d’ajouter : « Les gens qui se plaignent, c’est ceux qui n’ont pas pu venir. Et je pense qu’au final, ils regrettent ou alors ils regretteront quand leurs amis vont parler des bons moments qu’ils ont vécus ici au Rock-A-Field .»
Vous l’aurez compris, au RAF, il n’y a pas de place pour les grincheux!