Le parti conservateur d’Angela Merkel a essuyé un vote sanction dimanche lors de trois élections régionales en Allemagne en raison de la politique d’accueil des réfugiés de la chancelière, une claque aggravée par la percée exceptionnelle des populistes de l’AfD.
Dans son fief historique du Bade-Wurtemberg, l’Union chrétienne-démocrate (CDU) n’arrive que deuxième (27% environ), derrière les Verts (30-31%), une première même si les écologistes dirigent déjà ce Land depuis cinq ans.
En Rhénanie-Palatinat, la région de l’ancien chancelier Helmut Kohl, elle est battue par les sociaux-démocrates du SPD (32% contre 36%), selon les estimations publiées par les chaînes de télévision publiques ARD et ZDF sur la base de résultats partiels vers 20 heures.
Ce sont les populistes de l’Alternative pour l’Allemagne (AfD), parti fondé il y a seulement trois ans, qui apparaissent comme les grands vainqueurs des scrutins, en particulier en Saxe-Anhalt où ils se placent deuxième (24%) et talonnent la CDU qui arrive en tête (29-30%).
L’AfD engrange respectivement près de 15% dans le Bade-Wurtemberg et 12% des voix en Rhénanie-Palatinat, se classant ainsi 3e. Cette percée va aussi compliquer la tâche de la CDU, du SPD et des Verts pour bâtir des coalitions régionales stables.
« Horreur pour Merkel »
Le secrétaire général de la CDU, Peter Tauber a relevé « des temps difficiles » et estimé « ne pas attendre » de changement dans la politique sur les réfugiés d’Angela Merkel qui doit s’exprimer lundi à la mi-journée.
Le patron du SPD et vice-chancelier Sigmar Gabriel a lui aussi exclu tout changement de politique sur les réfugiés « Nous avons une ligne claire (…) et nous la gardons ». Le quotidien populaire Bild, le plus lu d’Allemagne, a pointé la « débâcle de la CDU », la « soirée d’horreur de la chancelière Merkel » et relève que « l’AfD choque l’Allemagne ».
Les populistes seront désormais représentés dans la moitié des 16 régions allemandes, à dix-huit mois des législatives et alors que d’autres scrutins régionaux sont attendus d’ici là.
Le vice-président de l’AfD, Alexander Gauland s’est réjoui que ses nombreux électeurs aient « voté contre la politique sur les réfugiés » de Mme Merkel martelant le thème central de sa formation qui « ne veut plus de réfugiés » après l’arrivée de 1,1 million de demandeurs d’asile en 2015. La co-présidente du parti, Frauke Petry a salué le fait que « les électeurs se détournent en masse des partis établis ».
L’envolée de l’AfD, qui a multiplié les dérapages verbaux anti-migrants, constitue un scénario inédit depuis 1945 dans un pays toujours en quête d’exemplarité morale après l’horreur nazie.
Le Quotidien / AFP
Un coup de semonce pour les deux grands partis, CDU et SPD
Angela Merkel, au pouvoir depuis plus d’une décennie, n’a eu cesse de battre le pavé pour défendre sa politique devant des électeurs souvent déboussolés. Nombre de ministres avaient aussi appelé à la mobilisation contre l’AfD, accusée de flirter toujours plus avec l’extrême-droite après avoir été lancée à l’origine comme un parti anti-euro.
Malgré cela, les populistes ont creusé leur sillon en haranguant les foules contre les partis traditionnels.
Partenaires de la CDU au niveau fédéral, les sociaux-démocrates ont aussi connu une soirée très difficile. S’il arrache la victoire en Rhénanie-Palatinat, le SPD est laminé dans les deux autres régions, avec moins de 13% en Bade-Wurtemberg et 10% en Saxe-Anhalt.
Ces résultats apparaissent comme un coup de semonce pour les deux grands partis qui dominent la vie politique du pays depuis 70 ans.
La chancelière n’a pas encore dit si elle briguerait un quatrième mandat à l’issue des législatives prévues pour septembre 2017. Néanmoins Mme Merkel, dont la popularité personnelle reste élevée, ne semble pas menacée dans l’immédiat, aucun rival sérieux n’ayant émergé. Elle devrait pousser encore pour des solutions à l’échelle européenne et un accord entre la Turquie et l’UE, en cours de négociations avant un sommet les 17-18 mars.
Mais la chancelière, isolée, peine à rallier les autres Européens à sa cause. Sur la route migratoire des Balkans, les pays ont fermé une à une les frontières, laissant des dizaines de milliers de migrants, notamment des Syriens fuyant la guerre, coincés en Grèce dans des conditions jugées catastrophiques.