Frank Schleck reprendra la compétition demain sur l’une des quatres épreuves du Challenge de Majorque.
En 2016, il a sauvé sa saison en remportant une très belle étape de montagne sur la Vuelta. Comme il a manifestement l’envie de poursuivre sa carrière, le Mondorfois se montre encore ambitieux.
La saison reprend pour vous avec les épreuves du Challenge de Majorque. Dans quels états d’esprit et physique vous trouvez-vous?
Frank Schleck : C’est vrai que ça fait dix jours que nous sommes là en stage à Majorque et on enchaîne avec les courses du Challenge de Majorque. Ce sont des courses d’entraînement, mais ça reste des courses. Souvent, par le passé, j’ai eu l’impression de me jeter dans l’eau froide, ici. Ces premières courses rappellent que le vélo est très dur et que ce n’est pas aussi facile que l’on imagine. Je débuterai demain et j’enchaînerai samedi et dimanche.
Il s’agit de votre quatorzième saison…
Oui, merci de me rappeler mon âge (il rit). C’est bien, je me fais toujours plaisir et cela me rend fier de constater que j’ai toujours envie de courir, d’être avec l’équipe, de me faire mal. J’aime toujours ça, oui. C’est le plus important. Après, les années sont là, mais ça compte moins que la motivation.
Alors, qu’attendez-vous de cette saison?
Comme d’habitude, vous savez qu’on essaie de faire un tri. La première partie se résume aux classiques. J’enchaînerai sans doute avec le Tour de Romandie puisqu’ensuite, il n’y aura plus rien avant le Tour de Suisse et le Tour de France. On ne fera pas non plus le Tour de Luxembourg. Désolé. La deuxième partie, c’est donc le bloc Tour de Suisse – Tour de France. C’est le grand but. J’aimerais faire un beau Tour. J’enchaînerai avec les Jeux olympiques, si je suis retenu, et la fin de saison. L’année des Jeux, c’est toujours spécial. Mais bon, il faudra attendre de voir comment la saison va se passer. Et attendre ensuite la sélection du Luxembourg.
Ce n’est pas un secret, a priori, le parcours pour pur grimpeur vous conviendrait parfaitement…
Oui, mais ce sera à moi de prouver que je peux montrer les couleurs du Luxembourg à Rio.
Avez-vous des idées précises de ce que seront vos temps forts?
C’est toujours difficile de se projeter. Mais si je pouvais d’abord faire une, ou deux belles étapes sur Paris-Nice pour prendre de la confiance… J’aimerais briller dans les classiques. Je ne vais pas dire top 5 ou podium. Mais ce serait bien d’arriver en forme là. Idem sur le Tour. J’aimerais faire un beau Tour de France et être content de moi. Comme l’an passé, après tous les pépins que j’ai eus, j’espérais faire une belle Vuelta et avec l’étape que j’ai gagnée, je pouvais être content. Mais les possibilités restent vastes.
Vous n’aviez pas pu participer au Tour 2015 à cause d’une blessure à un genou. Cela vous avait-il frustré?
J’étais beaucoup plus frustré que les gens ne l’ont pensé ou cru. Ils se disaient : « Il a déjà beaucoup couru, il a de l’expérience, ce n’est pas si grave. » Mais le Tour de France reste un but dans une saison. Ça reste la légende du cyclisme. Ne pas pouvoir faire le Tour, et le décider de soi-même, ce n’est pas évident. J’ai un caractère très dur envers moi-même. Je me suis convaincu que je devais me mettre deux semaines au repos pour partir ensuite plusieurs semaines aux États-unis et me concentrer sur la suite et la Vuelta. Ça m’a fait du bien pour évacuer cette frustration.
Cette blessure au genou est-elle complètement réglée aujourd’hui?
Pas complètement, non. Je n’ai pas mal sur le vélo, mais lorsque je reçois des soins d’ostéopathie, je sens encore une gêne, mais cela ne m’empêche pas de rouler. Je fais attention et ça va.
Avec vos coéquipiers, Bauke Mollema, Ryder Hesjedal, Peter Stetina, d’autres bons grimpeurs, comment se passera la répartition des tâches?
J’étais avec Ryder (Hesjedal) à Calpe en décembre. Il est en Australie. Ici, je suis avec Bauke (Mollema), avec qui je m’entends bien. On verra en fonction des courses et de la forme des uns et des autres. Lorsque Mollema sera en grande forme et mieux que moi, ce sera ma responsabilité de l’aider, de travailler pour lui. C’est mon métier, mon job. Je le ferai avec le respect que je dois à l’équipe. Nous sommes payés pour réaliser le meilleur résultat pour l’équipe, quel que soit le leader. J’ai assez d »expérience pour savoir qu’on doit respecter l’équipe.
Justement, votre équipe, vous la voyez comment?
On a eu beaucoup de départs, beaucoup d’arrivées. On a l’expérience avec des coureurs comme moi, on est même l’équipe la plus âgée du peloton. Mais nous avons aussi des jeunes qui vont vite au sprint, comme Felline, Nizzolo, Stuyven, Bonifazio, Theuns. Ils auront un programme différent de moi. J’espère que tout se passera bien et qu’on gagnera des courses. Il y a moins de coureurs pour la montagne, mais avec Haimar (Zubeldia), Bauke (Mollema), Peter (Stetina) et Ryder (Hesjedal), on sera là. Il ne faut pas le nier, notre saison 2015 n’a pas été bonne, on aurait pu faire mieux. On va essayer de redresser la barre et de gagner plus de courses.
Vous êtes de la génération de Fabian Cancellara qui a annoncé son retrait des pelotons à l’issue de cette saison 2016. On imagine que ce ne sera pas votre cas. Quel sera votre avenir?
Non, pour le moment, c’est prématuré. Je ne me vois pas m’arrêter. Je ne suis pas parti… Je me fais plaisir, j’aime faire ce métier. Pour être honnête, je sais que je ne ferai pas cinq années de plus.
Si on vous propose une prolongation dans votre équipe, vous signez?
Oui, mais je ne sais pas. C’est trop tôt. Pourquoi ne pas voir une autre équipe pour deux années de plus? On verra bien le moment voulu. C’est difficile de dire ça de soi-même, mais je suis respecté dans le peloton, j’ai de l’expérience. Je me sens capable de gérer une équipe comme capitaine, pas forcément toujours comme un leader. L’équipe Trek est bien, je m’y sens bien, si je peux prolonger, pourquoi pas? Ou aller voir ailleurs… Je ne sais pas et la saison ne fait que commencer (il rit).
Recueilli par D. B.