Notre système de soins de santé, un des plus performants et plus généreux au monde, se trouve-t-il en danger de mort? Ou du moins, est-il gravement malade? Il n’est plus si simple d’établir un diagnostic. Les médecins exerçant dans un cabinet privé estiment que seule une libéralisation – quasi intégrale – peut guérir un système au bord de la fracture. La différence de traitement entre médecine hospitalière et médecine libérale serait à qualifier de «proxénétisme», pour reprendre le terme balancé par le Dr Carlo Ahlborn, vice-président de l’AMMD. En même temps, le syndicat des médecins ne compte pas mettre en place un système à l’américaine. Libéraliser oui, mais pas à tout prix. Le principe d’un conventionnement avec la CNS, et donc l’accès aux indemnités de l’assurance maladie, ne serait pas remis en cause. Pourtant, l’AMMD exige aujourd’hui une «autonomie tarifaire» pour les médecins libéraux. La tarification devrait être «établie avec tact et mesure». À la CNS de définir la hauteur de sa participation. La prise en charge des patients serait complétée par des assureurs privés. Un premier pas vers une médecine à deux vitesses, voire une privatisation de la médecine?
Les annonces successives d’ouverture de nouvelles entités ambulatoires, en partie financées par des investisseurs immobiliers, suscitent du moins des craintes. La médecine ne doit pas être exercée comme un commerce, affirment les défenseurs du système solidaire. «Dans un modèle où des capitaux privés tiers financent des structures médicales, la tentation devient forte d’orienter les activités vers les actes les plus rentables et les moins risqués, au détriment de la prise en charge globale du patient», préviennent les conseils médicaux des grands hôpitaux du pays (lire ci-dessus). Le camp syndical se trouve également en état d’alerte.
La mise en opposition des hôpitaux et des cabinets privés risque de provoquer une jalousie… maladive entre les médecins hospitaliers et médecins libéraux. Ce ne serait pas leur volonté, assurait dans nos colonnes le Dr Chris Roller, le président de l’AMMD. Le bon traitement est à trouver pour maintenir en vie un système reposant sur la solidarité, avec à la clé un accès universel, égalitaire et rapide aux soins.