Réunis depuis lundi à Bruxelles, les ministres des Finances européens ont accouché dans la douleur, hier (mardi 8 décembre), d’un accord de principe sur un système de taxation des transactions financières, ou taxe Tobin. La fin du capitalisme sauvage et des transactions à haute fréquence, de l’actionnariat roi? Pas vraiment.
Ces discussions sur l’opportunité de taxer les transactions financières remontent à 2011. À l’époque, les 27 pays européens devaient y travailler. Un tel projet devait offrir, pour les plus optimistes, jusqu’à 35 milliards d’euros de recettes à l’Union européenne. Mais l’idéalisme, voire l’utopie, n’ont pas leur place en politique. Rapidement, le nombre de pays autour de la table a été réduit, officiellement pour faciliter les débats. Le Luxembourg a quitté l’assemblée et laissé un petit groupe (France, Allemagne, Italie, Portugal, Espagne, Estonie, Grèce, Belgique, Slovénie, Slovaquie et Autriche) avancer seuls. À onze, les délibérations devaient être plus faciles. Devaient, car depuis trois ans, ces pays ne parviennent pas à s’entendre. Même le ministre estonien a préféré se retirer. Ils n’étaient que dix, pour signer l’accord de principe, hier. Dix sur 28 pays membres de l’UE fin 2015. Soit un peu plus d’un tiers des représentants qui ont fait un tout petit pas en avant, après des années de reculades.
La taxe Tobin fait peur à la finance. Elle imposerait un prélèvement infime sur des plus-values instantanées, dans un domaine très peu réglementé. Autoriser la taxation des transactions financières, c’est faire entrer le loup dans la bergerie, prendre à quelques-uns pour servir le plus grand nombre. Et offrir à l’Union européenne une source de revenus propre. Dès hier, le ministre des Finances hollandais, Jeroen Dijsselbloem, a fait part de son scepticisme, suivi par son homologue belge, Johan Van Overtveldt. Londres s’est également inquiétée de l’impact d’une taxe Tobin sur l’activité de sa City. Des protestations de pure forme car, au fond, les ministres européens des Finances ont bien l’intention de prendre leur temps, beaucoup de temps.
Christophe Chohin