L’eurodéputée et ancienne garde des Sceaux Rachida Dati (Les Républicains) a estimé mardi que la France se trouve « quasiment au point zéro » de la lutte contre la radicalisation islamiste.
« En France, on est très en retard sur la radicalisation, on est quasiment au point zéro, car tout ce qui existe en termes de déradicalisation, ce sont des structures ou des associations qui sont fondées sur le volontariat », a expliqué Mme Dati.
L’eurodéputée présentait mardi un rapport sur ce thème au Parlement européen, qui donnera lieu à une résolution non contraignante, votée mercredi. « Le modèle du centre de déradicalisation est totalement à construire », a-t-elle dit, soulignant la nécessité que « ces centres puissent accueillir de manière contrainte ces individus radicalisés pour éviter qu’ils passent à l’acte, mais aussi pour les déradicaliser ».
Alors que le modèle danois, qui privilégie l’approche sociale en amont du passage à l’acte, est souvent mis en avant, Mme Dati relève que « pour les individus qu’on est en train de surveiller, fichés, considérés comme dangereux, il faut qu’on ait des centres beaucoup plus opérationnels », qui fonctionnent dans le cadre d’une contrainte pénale.
En France, le tribunal de grande instance de Mulhouse a annoncé en septembre qu’il allait tester un programme judiciaire de déradicalisation destiné aux personnes poursuivies pour des infractions en lien avec l’islam radical, à l’exception des actes terroristes. Ce programme sur mesure pourra être utilisé en amont d’un procès pour un prévenu soumis à un contrôle judiciaire ou bien en tant que peine.
Alors que le nombre de citoyens de l’UE ayant rejoint des organisations terroristes en Irak et en Syrie est estimé à 5 000, Mme Dati pointe le rôle clé d’internet.
« 90% de la radicalisation se fait en prison ou sur internet »
« La radicalisation se fait aujourd’hui à 90%, pour ne pas dire plus, sur internet ou en prison; les mosquées, c’est totalement subsidiaire », a expliqué l’ancienne garde des Sceaux, qui souhaite que la responsabilité pénale des géants du net soit engagée quand ils tardent à coopérer avec les États pour la suppression des contenus illégaux en ligne.
Lire aussi : Radicalisation : la Shoura inquiète pour la prison de Schrassig
Pour contrer la radicalisation en prison, elle prône la séparation des détenus radicalisés des autres détenus. En France, « pendant longtemps, on a refusé ces expérimentations parce qu’on craignait de stigmatiser les détenus », a-t-elle déploré, alors que des voix s’élèvent à gauche pour dire que regrouper ces détenus pourrait accélérer la radicalisation de certains d’entre eux.
Son rapport préconise également la mise en place rapide d’un PNR européen (fichage des passagers aériens), des contrôles systématiques aux frontières extérieures de l’UE et une meilleure transparence dans les flux financiers venant de certains pays du Golfe.
AFP