Après une Nations League ratée, une envie de changement souffle chez les suiveurs des Rout Léiwen. Est-ce crédible ou même nécessaire ?
Lundi soir et en dehors des horaires de bouclage du Quotidien, Luc Holtz s’est montré très détendu en conférence de presse. Le sélectionneur s’est attaché à parler du match contre l’Irlande du Nord (2-2) comme s’il n’était pas le point final d’une campagne ratée, ni même d’un cycle (le sien), mais bel et bien une étape très médiocre de plus dans la construction de Rout Léiwen qui ressemblent de plus en plus à une équipe dont ni l’un ni l’autre ne veulent se passer.
Holtz a fait, méticuleusement, calmement, ce qu’on nomme «remettre l’église au milieu du village». Pour ceux qui auraient du mal avec les vieilles expressions venues d’Alsace, celle-ci signifie, entre autres, «garder ses priorités en vue, ne pas dévier de ses objectifs». À l’échelle du bonhomme, que la caravane footballistique suit de près depuis 14 ans déjà, disons plutôt qu’il a remis SON église au milieu de NOTRE village : alors que de plus en plus de supporters demandent son remplacement (la fameuse versatilité du public), alors que pour la première fois depuis son arrivée, cette équipe semble avoir cessé de progresser (avec des circonstances atténuantes), Holtz a déroulé tout autant les motifs de satisfaction que les manquements de son équipe avec le ton de quelqu’un qui sait qu’il y aura un lendemain. Et qui semble vouloir qu’il y en ait un
À une question de savoir comment il vivait l’instant, il a répondu, visiblement apaisé, qu’il ne se sentait «pas éprouvé». «Si je l’étais, ou si j’étais frustré, je n’aurais pas le sourire! Non, je ne suis pas du tout éprouvé.» Pour le sélectionneur, le discours est rodé, peu discutable de par l’histoire du football luxembourgeois et la taille du pays, donc efficace : les attentes placées sur son équipe ont bien trop augmenté ces derniers temps. Un discours qu’il continue de marteler depuis des années et au sujet duquel il sera difficile de lui reprocher un manque de continuité. «Les gens croient que désormais, on doit toujours gagner. Même si je ne vais pas dire qu’aujourd’hui, on a fait un bon match, il faut être réaliste et regarder les adversaires qu’il y avait en face. Et considérer les noms de nos blessés (NDLR : notamment Yvandro Borges et Vincent Thill) et suspendus.»
Combien cela coûterait-il d’arrêter ?
Le problème étant désormais que l’on peut lui opposer une potentielle incapacité à transcender les problèmes, puisque Maxime Chanot a ébréché le récit holtzien en affirmant que le sélectionneur lui avait fait part, en juin, de son envie d’arrêter en arguant que cette équipe avait «atteint ses limites». S’il faut juger de la campagne qui vient de s’achever sous ce nouvel éclairage, alors parlons des adversaires, d’un niveau assez homogène.
Il y avait, au-delà d’une belle équipe d’Irlande du Nord, une Bulgarie faible et un Bélarus qui ne vivait que par son agressivité. Pour seulement deux points pris sur douze possibles. Parce qu’il y avait aussi, et malheureusement, un Luxembourg qui n’a pas conservé le fond de jeu dominateur de 2023. Un souci né uniquement à cause du vivier réduit de joueurs? C’est la thèse que défend le sélectionneur. Son église, sa chapelle même, au milieu d’un village de supporters et de techniciens qui continue de se dire qu’il y avait moyen de faire mieux.
Qui a raison, qui a tort? Ce serait un débat qu’il revient à la FLF de trancher si seulement elle en éprouve le besoin. Clairement, la première prise de parole de Paul Philipp après le coup de sifflet final de cette campagne n’incite pas à penser qu’il va ruer dans les brancards. Mais si son président voulait seulement envisager un changement, la fédération en aurait-elle les moyens ?
Écourter le contrat de Luc Holtz d’une année coûterait pas loin de 150 000 euros, selon nos informations, et ce n’est pas forcément dans les capacités financières de Mondercange de se permettre un tel revirement. Puisqu’il faudrait alors mettre une somme au moins équivalente pour attirer un technicien sur le banc (il est vraisemblablement exclu qu’un étranger, dont les prétentions seront plus élevées – à moins qu’il s’agisse d’un ancien coach de DN qui comprenne l’incapacité de la FLF à s’aligner sur les tarifs internationaux – obtienne ce poste). On pourrait donc bien repartir sur une année et une campagne, celle du Mondial-2026, avec Luc Holtz, qui a bâti des choses qu’aucun autre sélectionneur n’avait jamais bâties, mais dont le crédit s’est visiblement un peu épuisé.