SOS Faim et la commune de Schifflange ont ouvert la maison de la transition agricole et alimentaire Teranga, un tiers-lieu visant une réflexion collective sur les enjeux de l’alimentation.
Un tout nouveau projet SOS Faim a poussé à Schifflange. Teranga, la maison de la transition alimentaire, a été inaugurée mercredi dernier, avenue de la Libération. Elle a la vocation d’être un «lieu d’échange ouvert et à disposition» et d’être aussi «un lieu pour la communauté locale», explique Natalia Costea, responsable du tiers-lieu. Derrière la façade boisée du bâtiment et sa grande vitrine, un espace composé d’une cuisine et de coins pour s’asseoir se laisse entrevoir. Des pots de peinture posés çà et là et des bâches décorent encore les lieux. «On ne dirait pas que nous l’avons inauguré hier», rigole Delphine Dethier, directrice de SOS Faim. Sur les murs, une fresque reprend l’état du système alimentaire actuel et dépeint l’impact de notre alimentation sur les populations du Sud. Le «mur des possibles», quant à lui, présente les initiatives déjà existantes au Luxembourg et ailleurs.
C’est bien là tout l’enjeu de cette maison de la transition alimentaire : réfléchir et s’investir collectivement pour faire émerger des solutions et des initiatives. «L’un des volets du tiers-lieu, c’est d’apprendre, de s’informer, d’échanger autour de la transition alimentaire, de donner des pistes de solutions, de donner accès à ce qui existe déjà et d’inventer ensemble des nouveaux modèles», énumère la directrice. La transition alimentaire, c’est la réflexion qui mène à sortir de l’agrobusiness, qui a un impact néfaste sur la planète, pour aller vers un système plus respectueux du vivant. Et selon les équipes de SOS Faim, pour y arriver, l’effort ne peut être individuel. «Aujourd’hui, nos modes de vie ne sont pas en adéquation avec ça, nous n’avons pas le temps. Par contre, ce que nous pouvons faire, c’est de trouver ensemble des systèmes en commun.»
Selon Delphine Dethier, pour faire changer les choses, il faut «remettre de la logique» et «casser les normes de la société capitaliste». «J’ai le sentiment qu’il y a une perte de conscience des gens sur le fait que notre alimentation est politique, que l’on a un impact tous les jours avec notre assiette», appuie la directrice de SOS Faim. D’où l’importance de faire de l’éducation à la maison de la transition, pour permettre les changements. «Nous voulons créer une communauté autour de la thématique de l’alimentation durable.»
Bibliothèque, jardin collaboratif…
Concrètement, si quelqu’un passe la porte de Teranga pour améliorer son alimentation, que l’équipe lui conseille-t-il? «Nous prendrions le temps de regarder où cette personne en est dans sa vie», illustre Delphine Dethier. Si les démarches en sont à leurs balbutiements, l’équipe conseillera alors de suivre les dix premiers gestes à adopter pour réduire son empreinte alimentaire. Parmi eux : consommer locale, de saison, bio et équitable, privilégier des produits frais ou encore moins gaspiller… «Et puis si la personne est déjà au-delà de ça, on lui propose de rejoindre un groupe de travail pour réfléchir ensemble à ce qui manque à Schifflange, par exemple, pour rendre notre système alimentaire et notre chaîne d’approvisionnement plus juste.»
Au-delà des discussions, la maison se donne également d’autres moyens pour informer les curieux qui pousseraient ses portes. Une bibliothèque et ludothèque est à disposition pour offrir des ressources variées qui aident à s’informer, et ce de manière ludique. «Nous aurons des catégories différentes de personnes qui vont fréquenter les lieux, allant des personnes très informées aux familles avec de jeunes enfants», souligne Natalia Costea. L’année prochaine, un jardin collaboratif sera mis en place à l’arrière du bâtiment : «Il nous permettra de faire de la transmission de manière très pratique.» De la même façon, des ateliers apprendront à cuisiner de saison. «L’idée, c’est vraiment d’aller de très petits pas à faire dans sa vie de tous les jours à comment réfléchir de façon plus systémique le modèle agricole», explique Delphine Dethier. Une campagne de crowdfunding a été lancée sur la plateforme Eticrowd pour permettre à la maison de financer ces projets grâce aux dons du grand public.
«Ce projet a la particularité d’être fait avec des jeunes.» Huit jeunes vivent sur les lieux. Deux sont volontaires permanents et six sont étudiants mais consacrent du temps au projet. «L’idée, c’est de les former à ces thématiques pour qu’ils les transmettent par la suite», appuie la responsable de Teranga. La maison, ouverte les mardis, jeudis et samedis de 10 h à 18 h, se laisse trois ans pour se construire et évoluer. «Si dans trois ans, chaque habitant de Schifflange passé par la maison a pu retenir quelques petites choses, ce sera déjà un super pas pour nous», conclut Delphine Dethier.