Comment a-t-on pu oublier le coing ? On se pose la question en dégustant les quatre boissons différentes produites avec ce fruit par Ramborn, aussi délicieuses les unes que les autres.
Les produits
Le coing est un fruit en passe de tomber dans l’oubli. Pourtant, originaire d’Iran et du Caucase, il a eu la cote au siècle dernier, principalement transformé en gelée ou en eau-de-vie. Les cognassiers étaient plantés dans les vergers avec les pommiers, poiriers et pruniers. Mais le fruit, dur et granuleux, n’est pas facile à travailler. Il est impératif de le cuire avant de le manger.
Mais on peut aussi boire son jus, sous de nombreuses formes, et c’est ici que Ramborn intervient. En effet, la cidrerie installée sur les bords de la Sûre a décidé de ne pas laisser tomber ce fruit méconnu, mais qui possède de très beaux atouts gustatifs. Comme les pommes et les poires, la cidrerie récolte également les coings et en tire quatre produits différents.
Il y a tout d’abord un jus non alcoolisé, où le coing se marie à la pomme pour davantage de douceur. Ensuite, trois autres boissons très originales sont élaborées à partir des coings pressés.
Commençons par le Garden Quince, dont la méthode de fabrication est similaire au cidre. «Nous faisons fermenter le jus en prenant garde de respecter le bon équilibre entre sucre et acidité, explique Bill Hein, le responsable du marketing et de la communication à Ramborn. Ensuite, nous l’embouteillons et le gazéifions.»
Tributaire des caractéristiques des fruits de chaque saison, ce produit artisanal aura un goût qui pourra être légèrement différent d’une année sur l’autre, comme le vin. Le Garden Quince, qui titre autour de 6,5 % d’alcool, livre un goût si délicat et original qu’il est bien difficile de ne pas s’en servir un deuxième verre !
Pour le Luxembourgish Quince, «le jus de coing fermente une première fois en cuve, puis nous lançons une deuxième fermentation lors de l’embouteillage, grâce à l’ajout d’une liqueur de dosage dont la recette est secrète ! Les bulles apparaissent d’elles-mêmes pendant cette étape, pas besoin de la gazéifier artificiellement.»
En profitant d’un temps de repos sur lattes d’au moins six mois, il acquiert des arômes et des saveurs complexes et profonds, tout en restant très désaltérant et très facile à boire, car sa sucrosité contrebalance une amertume maîtrisée. Avec 6 % d’alcool, il est donc une bouteille idéale pour un apéritif ensoleillé en terrasse.
Enfin, le quatrième produit utilisant des coings de la région est l’Ice Quince. Le jus pur est ici congelé à -25 °C pendant quatre semaines et seule la partie la plus concentrée est récupérée, l’eau restant congelée. Ce jus très riche est ensuite mis à fermenter très doucement, la patience étant le maître-mot. Après deux filtrations, il est très précautionneusement mis en bouteille. Cet Ice Quince est d’une merveilleuse délicatesse, dont la rondeur est habilement complétée d’une fine amertume lui donnant beaucoup d’énergie.
Le producteur
À l’est du Luxembourg, le long de la Sûre qui marque la frontière avec l’Allemagne, Ramborn a non seulement ressuscité, mais aussi transcendé une tradition ancestrale : la production de cidre. On appelait Viez ce jus fermenté par chaque ferme pour sa consommation personnelle. C’est pourquoi, dans cette contrée vallonnée, les vergers de toutes tailles se succèdent à chaque virage, à chaque colline.
Il y a une dizaine d’années, la plupart étaient en friche, abandonnés. Les usages agricoles se sont perdus et, avec eux, l’utilité de ces plantations qui livrent des fruits parfaits pour élaborer du cidre, mais trop acides pour être croqués.
C’est un peu par hasard que trois copains (Carlo Hein, Gérard Bisenius et Gilles Dimmer) se décident à produire leur propre cidre. Originaires des environs de Born (commune de Rosport-Mompach), ils ont vu dans les vergers abandonnés de la région une formidable matière première. Après s’être formés à la Cider Academy de Gloucester (Royaume-Uni), ils se sont lancés avec enthousiasme.
Aujourd’hui, Ramborn compte plus de 300 fournisseurs. Certains n’apportent que quelques seaux de fruits, d’autres des remorques pleines à ras bord. «Nous les incitons aussi à planter de nouveaux arbres, y compris des cognassiers», avance Bill Hein. Grâce à la nouvelle valorisation de ces fruits, c’est tout un patrimoine biologique qui est conservé, puisque beaucoup de ces variétés ne sont présentes nulle part ailleurs. Rendre un usage économique à ces vergers est donc une façon de contribuer à la préservation de la biodiversité.
Où les trouver ?
Comme souvent, le plus intéressant est de se rendre directement chez le producteur, d’autant que Ramborn a bien fait les choses (23, Duerfstrooss, 6660 Born, ouvert du mercredi au dimanche de 14 h à 18 h). En plus de la belle boutique, il est possible de profiter d’un tour guidé et d’une dégustation qui permettront de tout comprendre à la production.
Plusieurs références sont aussi présentes dans les supermarchés et dans le secteur de l’Horeca autour du Luxembourg.
À retenir
· Ramborn produit quatre boissons à base de coings, un fruit presque oublié. Un jus sans alcool, mélangé à de la pomme, mais aussi le Garden Quince (produit comme un cidre), le Luxembourgisch Quince (avec une deuxième fermentation en bouteille, à l’image d’un crémant) et l’Ice Quince (similaire à un vin de glace).
· Profitant des fruits de vergers qui n’étaient plus utilisés jusque-là, Ramborn fait revivre une grande tradition luxembourgeoise : le Viez, un cidre luxembourgeois. Animée par la passion et la mise en valeur d’un patrimoine qui périclitait, la cidrerie conçoit des produits artisanaux de haute qualité.
· La boutique de la cidrerie, au cœur du village de Born (23, Duerfstrooss), le long de la Sûre, est le meilleur endroit pour découvrir et acheter jus, cidres, poirés et, bien sûr, toute la panoplie autour du coing. On trouve également certaines bouteilles en grande surface ou dans l’Horeca.