Il fallait oser planter des lentilles, adeptes des climats chauds, dans l’est du pays! L’agriculteur bio de Boursdorf Daniel Schaaf a lancé cette production originale en 2022.
Le produit
Le premier agriculteur luxembourgeois à planter des lentilles, c’est lui : Daniel Schaaf. Alors qu’il dirige une exploitation de 110 vaches (et 250 jeunes), c’est une discussion avec une amie végétalienne qui l’a convaincu. «Elle me disait que je ne produisais rien pour elle et elle avait raison, sourit-il. Comme je suis ouvert aux nouvelles idées, j’ai réfléchi sur le type de protéines que je pouvais apporter et je me suis arrêté sur les lentilles.» Depuis 2022, elles couvrent donc désormais près d’un hectare, au sud de Boursdorf. Celles qu’il a mises en terre sont de variété Beluga, «elles sont noires, parfaites pour les salades et les soupes».
Mais elles ne sont pas si faciles que cela à faire pousser. Originaires de Mésopotamie, les lentilles font partie des premières plantes domestiquées par l’Homme, dès le début du néolithique, il y a 9 000 ans. Elles aiment par conséquent la chaleur et une relative sècheresse, il a fallu donc attendre le réchauffement climatique pour envisager de les voir prospérer sous nos latitudes.
Autre difficulté, elles n’ont pas de tige rigide comme les blés, par exemple, et s’affaissent tout de suite au sol. Pour les faire tenir en hauteur, il faut adjoindre à leur culture une autre plante, qui fera office de tuteur. Daniel Schaaf a choisi la caméline (camelina sativa, Leindotter en allemand), une plante oléagineuse. «Bien sûr, lorsque je moissonne, je coupe tout ensemble, explique le fermier. Il faut ensuite trier les deux, mais comme il n’y a pas d’entreprise pour ça au Luxembourg, je vais en Allemagne.» Vient enfin le temps du séchage, puis du nettoyage.
Mais ce calendrier n’est valable que lorsque tout va bien… «C’est une culture à risques, assure Daniel Schaaf en connaissance de cause. L’an dernier, nous avons eu trois semaines de pluie juste au moment de la moisson, en août, et je n’ai rien pu sauver. Tout est parti dans le fourrage pour le bétail.» Une année normale, il espère récolter autour de 1 200 kg de lentilles.
Le producteur
Danief Schaaf, 48 ans, dirige l’une des trois plus grandes fermes bios du pays. Il a repris en 4e génération l’exploitation familiale il y a 30 ans, dès la fin de ses études au lycée technique agricole alors installé à Ettelbruck. Il cultive près de 200 hectares (dont 25 de vergers), principalement pour les prés et le foin puisque l’essentiel de sa ferme est tourné autour de la production de viande bovine. Elle est ensuite distribuée par l’IVLB (Interessegemeinschaft fir d’Vermaartung vu Lëtzebuerger Bio-Fleesch, Groupement d’intérêt pour la valorisation de la viande biologique luxembourgeoise).
Il s’est converti au bio en 2021 et vient donc tout juste de terminer sa période de conversion. S’il a pris ce chemin, c’est en partie grâce aux voisins des cidres Ramborn situés à moins de 2 km à vol d’oiseau et dont il est le plus gros fournisseur (autour de 100 tonnes les bonnes années). «Ils m’avaient informé de leur souhait d’élargir leur gamme vers le bio, je me suis dit : « pourquoi pas? » Et comme je n’aime pas faire les choses à moitié, j’ai décidé de convertir toute la ferme, pas seulement les vergers.»
Depuis, il est ravi d’avoir pris cette décision. Il estime notamment que le regard que les autres posaient sur lui a changé. «Avant, quand je disais que j’étais agriculteur, ça n’intéressait pas beaucoup les gens, glisse-t-il. Alors que maintenant, je vois bien qu’ils ont tout de suite un sentiment positif, ils m’acceptent mieux.»
Toujours prêt pour faire évoluer son métier, Daniel Schaaf participe aussi à un programme expérimental mis en place par le ministère de l’Agriculture et l’Ibla (Institut pour l’agriculture biologique et la culture agraire au Luxembourg) qui vise à développer la production de pois chiches pour notre alimentation. Il est également en train de préparer une curiosité : la farine d’avoine qu’il a découverte en Scandinavie. «Sans gluten, il faut la torréfier avant de la moudre, précise-t-il. Avec les moulins Dieschbourg, nous allons essayer avec 100 kg et nous verrons ce que ça donne!» Et puis, il profite aussi de la caméline qui pousse avec les lentilles pour faire de l’huile chez Charel Goedert, à Ospern (T’Charly’s Oil).
Comme je n’aime pas faire les choses à moitié, j’ai décidé de convertir toute la ferme au bio
Où les trouver ?
Les lentilles de Daniel Schaaf, emballées dans des sachets de 400 grammes, peuvent être achetées dans la petite boutique installée dans un cabanon, en face de la ferme de Boursdorf (Maison 13). Elles sont aussi disponibles dans la boutique de la ferme de Félix Miny, la Lilienhaff (Bech). On peut en manger dans quelques restaurants des environs et le Sicona les propose également aux cantines de l’ouest du pays, dans le cadre de son programme Natur Genéissen.
À retenir
- Daniel Schaaf fait pousser des lentilles depuis 2022, il est le premier agriculteur du pays à s’être lancé. Elles demandent un mode de culture particulier puisqu’elles ont besoin de s’appuyer sur une autre plante pour se tenir droites, ici de la caméline. Il peut en récolter près de 1 200 kg lors d’une bonne année.
- Boursdorf est un tout petit village, mais, avec environ 200 ha, la ferme de Daniel Schaaf se place sur le podium des plus grandes exploitations bios du pays! Il s’est converti en 2021 sur l’impulsion des cidres Ramborn, dont il est le plus important fournisseur. Aujourd’hui, toute la ferme est certifiée, y compris le bétail.
- Les lentilles sont en vente dans des sachets de 400 g. On les trouve dans la petite boutique située devant la ferme de Boursdorf (Maison 13) ainsi que dans celle de la Lilienhaff, à Bech. Elles sont servies dans plusieurs restaurants de la région et dans les cantines scolaires de l’ouest du pays.