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Un trafic sans filtre

Les trafiquants ont même des cartes de fidélité dans des commerces luxembourgeois! Nos confrères du Républicain lorrain n’ont de cesse d’évoquer les condamnations d’amateurs de tabac acheté au Grand-Duché. Le rythme effréné des comparutions se poursuit encore et toujours chez nos voisins.

Lors d’une récente affaire, les policiers et les juges ont eu la stupeur de constater qu’un prévenu avait en sa possession non pas une, mais deux cartes de fidélité d’un magasin de Rodange vendant du tabac. La première était tamponnée à hauteur de 129 000 euros d’achats et l’autre à 20 000 euros. Difficile de plaider la consommation personnelle. L’audience a dû être surréaliste. Le commerçant de Rodange n’était évidemment pas dans la salle du tribunal. Ne connaît-il pas la législation en France ? Ne s’est-il pas posé de questions en chargeant les dizaines de kilos de tabac dans le véhicule de cet individu venant, non pas de la région frontalière, mais du fin fond de la France ? Évidemment, on ne se mêle pas des oignons des autres… C’est bien plus pratique quand on fait des affaires et que l’on fait tinter le tiroir-caisse. 

Pour ces trafiquants français qui se font pincer (une infime partie, on imagine bien), c’est amende record et destruction des cigarettes et autres pots de tabac. Ils finiront bien en fumée, mais pas dans les poumons des Français. C’est déjà ça. Au-delà de faire la fortune des commerçants à la frontière et des grands manufacturiers de tabac, l’argent de ce trafic sert aussi à alimenter les caisses de l’État luxembourgeois grâce aux accises. Le tabac est la véritable star grand-ducale des produits d’exportation. Et ce commerce parallèle ne va pas s’arrêter.

Le gouvernement français a annoncé une augmentation du prix des paquets de 50 centimes à partir du 1er janvier. Le paquet de clopes sera alors plus de deux fois moins cher au Luxembourg (environ 5 euros contre 11,50 euros dans l’Hexagone). Et d’autres hausses sont attendues chez nos voisins. Le business luxembourgeois va faire un tabac. Mais gare à la réaction de Paris, qui voit de plus en plus d’un mauvais œil ce petit jeu loin d’être innocent.