La hausse continue de la taxation des émissions de gaz à effet de serre permettrait, selon le Statec, de réduire, d’ici 2030, de 68 % le bilan carbone du transport. Le frein du tourisme à la pompe est une des clés.
Le Luxembourg vise à réduire d’ici 2030 de 55 % les émissions de CO2. Selon les dernières projections du Statec, publiées ce jeudi, le gain en efficacité énergétique avec, en parallèle, le «développement massif» de technologies décarbonées, permettraient d’atteindre cette cible.
Un rôle prépondérant incombe au secteur des transports, émetteur de plus de 60 % du CO2 au Grand-Duché. Afin de contribuer à l’objectif global de réduction, les transports doivent atteindre d’ici 2030 une réduction de 57 % des émissions. À condition de réduire le tourisme à la pompe de 60 % (-50 % d’émissions) et d’accélérer le renouvellement durable de la flotte automobile, le seuil de 57 % pourrait être largement dépassé, selon le Statec, en passant à une réduction de 68 % des émissions de CO2.
Le «facteur clé» pour réussir cette entreprise est la taxe carbone, jugée «particulièrement efficace» à l’échelle du tourisme à la pompe. Il est à rappeler que deux tiers de la vente de carburants profitent à des transporteurs internationaux ou des personnes privées (en transit ou frontaliers). Leur réaction au différentiel de prix entre le Luxembourg et les pays voisins serait «assez prononcée». D’où l’intérêt de la taxe carbone, qui réduirait de manière «importante» le tourisme à la pompe.
Fin juillet, le gouvernement sortant a décidé de continuer à augmenter jusqu’en 2026 cette taxe de 5 euros par tonne et par an. De 30 euros en cette année 2023, le tarif passera progressivement à 45 euros. En parallèle, le crédit d’impôt, destiné aux ménages les plus défavorisés, augmente dès 2024 à un maximum de 144 euros, en attendant une autre majoration à 168 euros.
Le besoin de passer à 165 euros en 2050
Le Statec souligne l’importance de maintenir cette hausse annuelle de 5 euros de la taxe au-delà de 2026, pour atteindre les 165 euros en 2050. Pour ce qui est du carburant, chaque tranche de 5 euros réduit le différentiel de prix avec les pays voisins de 1 centime d’euro.
Le renouvellement rapide de la flotte de voitures est un autre facteur pour l’atteinte des objectifs de réduction. «Les régimes de taxation et de subsides (…) devraient contribuer à déboucher sur une part de l’électrique de près de 40 % dans le stock de véhicules à l’horizon 2030 (et près de 50 % si on y rajoute les voitures plug-in hybrides)», note le Statec.
La mission s’annonce plus délicate pour les camionnettes électriques, qui pourraient atteindre une part de 15 % du parc en 2030 et les camions à hydrogène, avec un stock d’à peine 1 % en 2030 et 10 % en 2050. «D’ici 2040, les émissions restantes (…) proviendraient ainsi majoritairement de camions, d’autocars, d’engins de chantier et de tracteurs agricoles, alors que les voitures seraient déjà électrifiées et les ventes de carburants aux non-résidents désormais marginales», met en perspective le Statec.
Par contre, pour atteindre la neutralité carbone d’ici 2050 dans le domaine des transports, le Statec souligne le besoin «de nouvelles avancées technologiques», dont la production d’hydrogène vert en grande quantité.
Pour la décarbonation, il faut
investir 8,3 milliards d’euros
Selon le Statec, un «investissement supplémentaire conséquent» est nécessaire pour atteindre les objectifs de réduction de CO2. Une enveloppe de 8,3 milliards d’euros serait ainsi à mobiliser par l’État et le secteur privé sur la période 2023-2030, soit en moyenne 1,2 % du PIB annuel. Une hausse des dépenses publiques, combinée à une baisse des recettes (moins de vente de carburants), résulterait à un coût de 1 % du PIB annuel pour les finances publiques. L’impact sur l’économie resterait «négligeable» selon le Statec, misant sur un différentiel de croissance à l’horizon 2050 variant entre -0,05 % et +0,1 %. Pour les ménages, la baisse des dépenses énergétiques compenserait l’investissement dans des technologies durables.
Pollueur ? Payeur !