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[Littérature] Johnny Weissmuller ressaute à l’eau


Photo non datée de Johnny Weissmuller. (photo AFP)

À n’en pas douter, on est bien dans la belle saison. Après L’Étreinte de l’eau, l’impeccable air de liberté vanté par l’académicienne française Chantal Thomas, et Le Nageur, la brillante et émouvante biographie d’Alfred Nakache par le juré Goncourt Pierre Assouline, nous voilà invité(e)s à plonger tête la première dans L’Art de nager le crawl.

L’auteur de ce texte paru originellement en 1930 ? Johnny Weissmuller ! Oui, le Tarzan d’Hollywood, le roi de la jungle sur grand écran. Surtout celui qui fut, dans une première vie aux alentours de la vingtaine dans les années 1920, le plus grand nageur de l’époque.

Les experts prennent plaisir à rappeler ses exploits aux Jeux olympiques de Paris en 1924 avec trois médailles d’or (100 m, 400 m, relais 4×200 m) et une de bronze avec l’équipe états-unienne de water-polo. Né János Péter Weissmüller en Hongrie en 1904 dans une famille allemande qui émigre aux États-Unis alors qu’il n’a que 7 mois, il vient à la natation à 9 ans pour corriger les effets d’une polio. À 18 ans, il devient le premier au monde à nager le 100 mètres sous la minute : 58 secondes 6/10, et s’entraîne, depuis deux ans, à l’Illinois Athletic Club de Chicago, avec Bill «Big» Bachrach (1879-1959).

Celui-ci lui lancera, lors de leur première rencontre : «Tout d’abord, tu dois oublier tout ce que tu as appris. Jure que tu travailleras avec moi sans te poser de questions et sans chercher d’excuses. Tu seras un esclave et tu me haïras. Mais tu battras tous les records que tu voudras». Johnny Weissmuller remportera des médailles olympiques à Paris (1924) et Amsterdam (1928) et battra en effet des records… La presse européenne de l’époque avait été bluffée par ce jeune Américain, beau gabarit (1,90 m pour 85 kg), allure décontractée avec toujours un peigne dans la poche de sa veste… Weissmuller sera, un temps, nageur professionnel et maître-nageur, avant de devenir acteur à Hollywood enfilant le pagne de Tarzan, le roi de la jungle.

J’eus mes hauts et mes bas, comme tout le monde

Maître de nage, naturellement, il écrivit un livre – entre méthode et réflexions. Paru en 1930, l’opuscule était titré Swimming the American Crawl – il est réédité cette année en français, c’est L’Art de nager le crawl. Dans le chapitre 4 intitulé «Détails importants dans les courses», page 31, l’auteur précise : «La natation, à la différence de presque toutes les autres branches de l’athlétisme, demande un certain lâcher-prise. Elle requiert cette détente non seulement pour vous faire économiser vos forces, mais aussi pour vous permettre d’exécuter vos mouvements à la perfection».

Et dans les pages de ce texte, on a la confirmation que nager le crawl est un art… En 19 chapitres, le maître de nage alterne les conseils et préceptes techniques (sur, entre autres, la posture corporelle et la respiration) et les confidences personnelles, comme les temps faibles («Ma carrière, dans les championnats, ne fut pas un bonheur sans mélange, du début à la fin. J’eus mes hauts et mes bas, comme tout le monde») et forts de sa carrière.

Au hasard des pages, entre les lignes d’eau, en quête du mouvement parfait pour accéder à la fluidité des grands champions, Weissmuller préconise aussi un régime alimentaire strict sans viande mais avec fruits, rappelle que la victoire est la conséquence de l’accumulation de petits détails (comme l’angle très précis à respecter lorsqu’on lève le coude).

Interné dans un hôpital psychiatrique à Acapulco (Mexique), Johnny Weissmuller est mort en 1984, dévasté par les pensions versées à ses cinq ex-épouses et la consommation abusive de whisky. N’empêche ! L’Art de nager le crawl, curiosité littéraire, demeure le bréviaire des rudiments essentiels et nécessaires pour pratiquer la nage libre et plonger dans le bain de la vie avec style!

L’art de nager le crawl, de Johnny Weissmuller aux éditions Seguier.