Avec l’adaptation du best-seller de Tatiana de Rosnay, François Favrat signe son troisième film : Boomerang. Avec un formidable Laurent Laffitte.
Originellement, il y a un best-seller : Boomerang, de la romancière française Tatiana de Rosnay. Un roman vendu à près de 1,5 million d’exemplaires dans 27 pays (plus de 500 000 en France, presque autant aux États-Unis…). Et puis, il y a un réalisateur, François Favrat, alors deux longs métrages sur son CV : Le Rôle de sa vie (2003) et La Sainte Victoire (2009). Quand celui qui, depuis longtemps, veut réaliser un film sur le secret de famille, lit le roman de Tatiana de Rosnay, il trouve là un sujet qui le touche personnellement.
Il confie : « Comme Antoine, le personnage principal du livre, j’ai affronté ce long périple pour mettre à jour les vérités cachées. Comme lui, je me suis retrouvé à devenir le vilain petit canard, celui qui divague, dont il faut ignorer les délires. D’ailleurs, ma grand-mère est morte cette année et je n’ai pas pu aller à son enterrement tant les tensions sont restées vives au sein de la famille! »
Il poursuit : « Et puis, en apprenant à parler de ma propre histoire, j’ai découvert que beaucoup d’autres gens souffrent de ces mêmes secrets devenus tabous au fil des années. À force, je me suis dit que malgré la singularité du propos, cela pouvait toucher aussi des spectateurs. » Et nous voilà partis sur l’île de Noirmoutier. On y retrouve Antoine et sa sœur Agathe. Tous deux sont revenus sur cette terre, berceau de leur enfance. Là, quadragénaire hypocondriaque et père célibataire de deux enfants, Antoine va découvrir un passé qui, contre toute attente, se rappelle à lui. Il y a des secrets, des non-dits, des mensonges…
«Le passé n’en a jamais fini avec nous!»
Une question surgit : de cette famille, ne faudrait-il pas réécrire l’histoire? À cette interrogation, s’ajoutent la disparition (mystérieuse, bien sûr) de la mère 30 ans plus tôt, le penchant du père pour le silence, une sœur qui refuse de voir et d’admettre la situation… Et puis, surgit une inconnue. Elle est séduisante. Elle va heureusement bousculer la vie d’Antoine… Racontant son travail, le réalisateur explique qu’il a condensé le roman de Tatiana de Rosnay et de sacrifier plusieurs personnages en centrant le sujet sur la recherche d’Antoine et ses relations de plus en plus tendues avec sa famille.
« Au-delà du travail même d’adaptation, retraduire les phrases du roman en scènes et en ellipses, il s’agit surtout de réécrire en images mon point de vue personnel. Et ce point de vue, me concernant, c’est qu’on voudrait tous en avoir fini avec le passé mais que, lui, il n’en a jamais fini avec nous! » Chronique familiale, Boomerang vu et présenté par Favrat, c’est aussi un thriller avec du suspense, des fausses pistes, une tension croissante au fil du film. Le réalisateur ajoute : « Par rapport au roman, j’ai voulu conserver la tension, l’envie de savoir et ces conflits qui vont crescendo . »
L’un des charmes du film tient en de nombreuses références (indirectes) à Alfred Hitchcock. « Même si mon film est, par sa trame, moins policier que ceux de Hitchcock, je me suis amusé avec le spectateur à travailler les fausses pistes et la montée de la tension, dit François Favrat. Et puis cette maison fascinante de Noirmoutier, plantée sur les hauteurs face à la mer menaçante, elle a quelque chose du manoir de Psychose ! »
Autre atout du film de François Favrat : le casting. Les personnages féminins sont dessinés avec application et justesse par la délicate Mélanie Laurent et Audrey Dana. Vladimir Yordanoff brille dans sa proposition d’un père alternant le mutisme et la colère. Mais surtout, dans le rôle d’Antoine, il y a Laurent Laffitte. Sociétaire de la Comédie-Française, il prouve une fois encore qu’il peut tout jouer. Humblement, il glisse : « J’ai essayé d’aborder ce personnage de cette manière, non pas qu’il soit une victime, loin de là, mais en lui donnant l’énergie d’une victime. » C’est réussi…
S. B.
Boomerang, de François Favrat (France, 1h41), avec Laurent Lafitte, Mélanie Laurent…