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Claudia Monti : «Il faut remettre de l’humain dans la machine»


Le médiateur du Grand-Duché, Claudia Monti (à dr.), a présenté son rapport aux députés et n’a pas manqué de donner quelques coups de gueule. (photo Hervé Montaigu)

L’Ombudsman, Claudia Monti, a présenté un rapport d’activité qui ressemble étrangement aux précédents, en ce sens où les problèmes sont récurrents et les solutions, lentes à se mettre en place.

Parfois, c’est fatigant, admet l’Ombudsman, Claudia Monti, mais je ne cesserai jamais de batailler avec toute mon équipe pour que ça change», ajoute-t-elle dans le même souffle. Mardi, elle présentait aux députés le rapport d’activité 2021 qui révèle, surtout, que les choses bougent avec une extrême lenteur, quand elles bougent. Les rapports sont redondants qui appellent, au fil des ans, à une meilleure communication, une meilleure information, à plus de flexibilité et à plus de bonne volonté.

Pourquoi ces jargons juridique et technique, ces références à des textes de loi que l’administré doit aller chercher, pour finalement être encore plus désemparé ? «Les juristes dans les administrations nous disent que si c’est écrit dans un langage simple, ce n’est plus le texte de loi exact, que cela risque de générer des abus», explique Claudia Monti qui, dans son quotidien, doit expliquer des démarches qui auraient pu être plus claires dès le départ, ce qui, surtout, aurait évité des situations parfois inextricables quand elles ne sont pas rocambolesques.

«Faciliter le dialogue entre les citoyens et les administrations publiques de l’État et des communes, améliorer la communication et renforcer la confiance : ce sont les objectifs de l’action de l’Ombudsman», rappelle très justement la Chambre des députés. Force est de constater que Claudia Monti, comme ses prédécesseurs, est confrontée à des problèmes récurrents qui usent.

«La pandémie, qui a accéléré la digitalisation des démarches administratives, n’a rien arrangé», constate le médiateur. En entête de son rapport, elle a d’ailleurs fait inscrire une citation de la défenseure des droits en France, Claire Hédon, qui souligne l’importance de «maintenir les accueils physiques», encourageant à «remettre de l’humain dans la machine». Le médiateur, Claudia Monti, ex-avocate, se dit plus volontiers humaniste que juriste. Elles voient des situations parfois ubuesques, mais surtout des gens «au bout du rouleau, usés par le système administratif, qui n’ont plus la force de se battre, ou d’autres qui n’ont pas les capacités intellectuelles de comprendre une situation que personne n’a pris la peine de leur expliquer de vive voix, en répondant aux questions qu’ils se posent, regrette Claudia Monti, en marge de la présentation de son rapport.

Des services débordés

Bien sûr, il est difficile de faire des généralités. Si certaines communes voient d’un très mauvais œil le fait que le médiateur vienne mettre son nez dans leurs affaires, d’autres, au contraire, sont ravies de l’aide qu’il leur apporte dans leurs démarches. Pour les ministères et administrations étatiques, le constat est identique. «Les fonctionnaires sont parfois de bonne volonté, mais c’est le ministre qui bloque», explique Claudia Monti.

Les choses, effectivement, se compliquent dès lors que le problème à régler dépend de plusieurs ressorts ministériels. Reste à organiser une rencontre, mais cette option ne paraît pas être prioritaire.

Se pose, essentiellement, un problème de personnels. Les services sont débordés. «Quand il y a un ou deux fonctionnaires chargés de traiter les primes pour les vélos électriques, c’est sûr qu’ils font ce qu’ils peuvent», peut témoigner le médiateur. Elle se déplace souvent sur le terrain, aussi bien pour aller observer un arbre planté par la commune qui étend ses racines jusqu’à la cave de la maison voisine que pour aller démêler un dossier au Fonds du logement. Dans le premier cas, il est clairement fait référence à la mauvaise volonté de la commune, dans le second, Claudia Monti a pu mesurer l’ampleur de la tâche qui incombe aux personnels.

«Au Fonds du logement, ils ont été très transparents, très coopératifs. Mais il faut imaginer le nombre de dossiers qu’ils ont à traiter. Les lenteurs administratives s’expliquent aussi par un manque flagrant de personnels eu égard à la masse de travail», explique le médiateur.

Dans son rapport, elle attire l’attention sur des réfugiés, en particulier des Afghans, dont la décision de leur accorder ou non la protection internationale est suspendue parfois jusqu’à deux ans pour finalement obtenir une réponse négative. Même si le ministre Jean Asselborn se targue de n’avoir renvoyé personne en Afghanistan, il n’en demeure pas moins que ces demandeurs errent comme des âmes en peine, sans avoir ni le droit de travailler, ni même celui de s’inscrire à l’Agence pour le développement de l’emploi.

Elle a beau avouer qu’il est fatigant de se répéter, Claudia Monti ne lâchera rien. Elle attend maintenant le rapport des députés qui vont étudier ses différentes doléances au sein des commissions compétentes.