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Payée au prix fort

Ce n’est que de l’argent.» Le Premier ministre letton, Arturs Krišjānis Kariņš, a trouvé des mots forts pour secouer ses homologues européens incapables de s’accorder sur un embargo sur le pétrole russe. Les États baltes, fortement dépendants des importations d’énergie fossile provenant de Russie, donnent le bon exemple. «Nous nous éloignons de cela et n’avons aucun problème avec cela. Cela va nous coûter plus cher, mais ce n’est que de l’argent. Les Ukrainiens le paient de leur vie», a martelé le chef du gouvernement de la Lettonie, lundi, à Bruxelles.

Sur le tard, les 27 ont réussi à trouver le fameux plus petit dénominateur commun. L’UE a-t-elle pour autant sauvé la face? L’unité affichée face au régime de Vladimir Poutine commence en effet à s’effriter. Comme si souvent, la Hongrie s’est montrée la plus récalcitrante à poser un nouveau signal fort. D’aucuns reprochent au Premier ministre Viktor Orban d’avoir pris en otage l’UE. Au moins, il a reculé sur les énormes compensations financières pour donner son aval à l’embargo sur le pétrole russe. L’accord a minima se limite certes aux importations maritimes. D’ici la fin de l’année, cette mesure devrait toutefois permettre de réduire de quelque 90 % le volume de pétrole fourni par Moscou.

Des experts continuent toutefois de douter de l’impact de cet embargo sur le financement de la guerre menée par la Russie de Poutine contre l’Ukraine. Il en va de même pour l’embargo sur le charbon qui sera d’application à partir du mois d’août. Seule la fin des importations de gaz pourrait vraiment heurter le Kremlin. Rien n’indique cependant que l’UE va rapidement statuer sur cette question. Pourtant, Vladimir Poutine pourrait mettre les 27 dos au mur. Avec les Pays-Bas, ce sont désormais cinq pays européens qui sont coupés des livraisons de gaz russe. En cause : leur refus de payer leurs importations en roubles.

La naïveté des pays de l’UE se trouve à l’origine de la dépendance à l’égard de l’énergie fossile russe. Aujourd’hui, les 27 devraient tous ensemble être prêts à payer au prix fort cette erreur stratégique. Des alternatives existent. Les exploiter est un devoir moral envers la population ukrainienne vivant depuis bientôt 100 jours un enfer sans nom.