Amnésie ou stratégie de défense? Le père du petit Bastien, accusé d’avoir tué son fils en l’enfermant dans un lave-linge, a affirmé ne se souvenir de rien tandis que son ex-femme récusait toute « complicité ».
« Pour le moment je ne me souviens de rien du tout de la journée du 25 » novembre 2011, a déclaré l’accusé Christophe Champenois à Catherine Katz, présidente de la cour d’assises de Melun, au sud-est de Paris, où il comparaît toute la semaine au côté de son ancienne femme de 29 ans, jugée pour « complicité ». La présidente de la cour lui demandait de préciser son « positionnement » par rapport à ce crime. Car le principal accusé, 37 ans, a beaucoup varié dans ses dépositions au cours de l’enquête, affirmant que son fils était tombé dans l’escalier, puis accusant sa compagne de l’avoir mis dans la machine à laver avant d’admettre qu’il pouvait l’avoir fait et de plaider enfin la « surdose médicamenteuse ».
Poursuivie pour complicité de meurtre, Charlène Cotte, 29 ans, s’est contentée d’affirmer: « Pour moi, il n’y a pas de complicité ». Cheveux blonds ramassés en chignon, la jeune femme a raconté d’une voix éteinte une enfance « heureuse » auprès de « parents aimants ». A l’âge de 15 ans, elle rencontre Christophe Champenois, le « premier et unique amour de sa vie ». Cinq ans plus tard naît Maud, enfant désirée.
C’est à partir de la naissance de Bastien, le 19 mai 2008, que les choses se gâtent. Charlène Cotte a fait un déni de grossesse et Christophe Champenois, qui ne voulait pas d’un second enfant, « se venge » sur son fils, trop « turbulent » à ses yeux. Il le bat et, en guise de punition, l’enferme régulièrement dans un placard, pieds et mains liés avec du scotch pour l’empêcher de sortir. Les services sociaux qui suivent la famille depuis 2006 ont certes décelé des « carences éducatives », mais pas de signes « avérés » de maltraitance. Il faut dire que Charlène, soucieuse de protéger son compagnon qu’elle dit craindre, sait donner le change.
Ce 25 novembre, au retour de l’école, la mère au foyer raconte à son conjoint que Bastien s’est une nouvelle fois mal comporté à l’école. Un mensonge qui excite la colère du père et constitue, pour les enquêteurs, une incitation au meurtre. La suite, les témoins appelés mardi à la barre -l’adjudant-chef qui a dirigé l’enquête, le médecin et l’infirmier présents le soir des faits- en ont livré un récit à la limite du soutenable.
Dans le box, Christophe Champenois, dont la « froideur » et le « manque d’empathie » a été souvent relevé, ne cille pas. Charlène Cotte, qui comparaît libre, garde la tête baissée, tassée sur sa chaise. Le père enferme son fils dans la machine et lance le programme essorage. Pendant cinq minutes, selon le témoignage de la mère, l’enfant hurle, supplie qu’on le laisse sortir. Puis le silence. Pendant ce temps, Mme Cotte est occupée avec sa fille à faire un puzzle dans le salon. Le père, lui, surfe sur internet.
Principal témoin à charge, la grande soeur, qui a confié au médecin urgentiste appelé sur place: « Papa a mis Bastien dans la machine à laver car il fait des bêtises à l’école. » Une accusation qu’elle réitérera à chacune de ses auditions. Quant à sa mère, après avoir endossé la version de son conjoint d’une mort accidentelle, elle soutient désormais s’être opposée physiquement à lui pour tenter de sauver leur fils.
L’un des enjeux du procès sera d’ailleurs de cerner la responsabilité de la mère, qui avait d’abord été renvoyée devant les assises pour non-assistance à personne en danger et non-empêchement d’un crime. Mais au vu de plusieurs éléments troublants, comme l’absence de traces de lutte dans la salle de bains et sa tentative pour dissimuler les preuves du crime après sa commission, les faits ont finalement été requalifiés en « complicité de meurtre ».
« Madame se présente comme une victime de violences conjugales. Et Monsieur comme une victime de sa maladie, puisqu’il est atteint d’un méningiome, et de l’alcoolisme », a ironisé Isabelle Steyer, avocate de l’association « La Voix de l’enfant », qui s’est portée partie civile.
Christophe Champenois « passe pour avoir commis un acte monstrueux », mais ce « n’est pas un monstre », a déclaré son avocat, Me Jean-Christophe Ramadier. Le verdict est attendu vendredi soir.
AFP / S.A.