HORS STADE En fin de semaine dernière, l’ancien sélectionneur national a remporté un bras de fer juridique contre le F91, son ancien employeur. Il faut s’en faire pour Dudelange ?
Le tribunal du travail d’Esch-sur-Alzette a rendu son verdict en appel, après plusieurs années de procédure : le club dudelangeois va devoir rembourser une somme assez conséquente à son ancien responsable du centre de formation, licencié en 2016. «Abusif» a reconnu la justice, qui doit encore statuer sur le montant de l’indemnité. Un gros soulagement pour l’ancien sélectionneur national… et une grosse inquiétude financière à venir pour le leader de BGL Ligue ?
Vous venez de remporter votre bataille juridique avec votre ancien club du F91, qui a été condamné pour licenciement abusif. Vous nous refaites l’historique ?
Guy Hellers : Eh bien je me demande encore ce que l’on me reprochait à l’époque. J’étais directeur sportif, je m’occupais surtout de l’académie. Je venais de finir champion du Luxembourg avec les juniors. Je venais surtout de reprendre l’équipe 1 pour trois ou quatre matches, en fin de saison et Flavio Becca voulait me redonner un autre contrat de trois saisons et une rallonge financière en plus du contrat que j’avais déjà pour continuer.
Pourtant, les choses ne s’étaient pas faites alors que tout semblait en place.
J’avais exigé une seule chose de la part de Flavio Becca, parce que je le connaissais, je savais comment il fonctionnait et que plus d’une fois j’avais vu des entraîneurs venir pleurer qu’ils recevaient des SMS indiquant qui devait jouer ou pas, quelle tactique utiliser… Moi, je voulais être le seul maître à bord. J’étais d’accord pour que l’on échange de temps en temps, que je lui donne quelques justifications si nécessaire, mais mon projet, à moi, c’était de mettre le plus de jeunes de l’école de foot sur le terrain. Mais ce papier sur lequel j’avais écrit mes conditions noir sur blanc, il ne l’a jamais signé et il ne m’en a d’ailleurs plus jamais reparlé. J’imagine que tout vient de ça, mais la vraie raison de ma mise à l’écart alors que j’étais en contrat à durée indéterminée à l’académie, je ne la connais pas. Surtout que le travail était bon. Et il y a aujourd’hui plein de joueurs qui évoluent en BGL Ligue qu’on a formés.
Comment votre limogeage s’est-il passé ?
On m’avait donné rendez-vous au stade Meyer. Il y avait là Romain Brenner et Gerry Schintgen (NDLR : devenu depuis président en lieu et place de Romain Schumacher) ainsi que l’avocat du club. Ils m’ont juste dit « on a décidé de ne pas te garder, de faire autre chose ». J’ai alors décidé d’aller en justice parce que je perdais gros mais aussi parce que c’était important à mes yeux vis-à-vis des 400 jeunes et de leurs familles : pendant des années, je me présentais devant eux pour leur présenter un projet sportif et ils m’ont cru sur parole…
Sébastien Rémy m’avait prévenu en me disant « ne va pas te frotter à Flavio, tu vas perdre »
… Avez-vous eu l’impression qu’on enterrait le projet en même temps que vous ?
Quand j’ai quitté la fédération et que je suis arrivé au F91, c’était un ami à moi, Marc Grosjean, qui était coach de l’équipe 1. Le projet était clair. Quand j’ai rencontré Flavio Becca et Jean-Marie Kontz, la première fois, c’était clair. Et quand j’ai repris l’équipe 1, c’est ce que j’ai voulu mettre en œuvre en étant le seul chef au niveau sportif. Et c’est peut-être aussi pour ça que j’ai dû finir par partir. Après tout, quand j’étais arrivé, Sébastien Rémy, qui était un de mes capitaines en sélection et se retrouvait directeur sportif à Dudelange, m’avait prévenu en me disant « ne va pas te frotter à Flavio, tu vas perdre ». Et voilà…
Avez-vous l’impression que ce projet d’académie n’était qu’une façade ?
Après, je comprends les coachs qui sont passés et n’ont pas pris les jeunes du club. Ils avaient tous le stress du résultat immédiat.
Vous n’avez plus rien fait dans le football après votre départ du F91. Pourquoi ?
J’avais pris un coup sur la tête. C’était un projet fantastique et tout était mis en place pour que ça fonctionne. J’ai pris une claque, j’avais perdu ma boussole. Je me suis retrouvé deux ans au chômage et cela m’a pris du temps pour m’en remettre. Mais j’ai cherché un club ! J’en ai eu trois ou quatre, au pays, qui m’ont fait des offres. Et un autre à l’étranger. Je cherchais exactement le même type de projet et j’ai été tout près de finaliser avec un club du pays. Seulement à Dudelange, j’avais un bon contrat. Je refusais de refaire la même chose pour deux fois rien et du coup, dans ce club, on m’a dit « écoute, vu ton salaire, ça ne va pas, on ne préfère pas. » Et je préfère cette façon honnête de fonctionner. Mais bon maintenant, pour moi, le foot, c’est fini et après tout, tant mieux…
Puisqu’on parle d’argent : selon les calculs de vos avocats, combien le F91 devra-t-il vous verser au titre d’indemnités ?
Aucune idée. Enfin si, j’ai un chiffre que nous avons calculé, effectivement, mais je ne vous le donnerai pas parce que je suis sûr que cela ne sera pas ça. Quand ce sera écrit noir sur blanc, on en parlera.
On imagine qu’il s’agit au moins d’un montant à cinq chiffres.
(Il rit) Vous pouvez me poser la question plusieurs fois de façon différentes, vraiment, je ne sais pas ce que dira le tribunal. Mais a priori, selon mes avocats, le F91 devra vite se mettre en conformité avec le jugement.
Parle-t-on d’un montant qui pourrait être gênant pour le budget qui est le leur ?
Je ne sais pas si cela les mettra en danger, je ne connais pas leur situation financière. Et après tout, ce n’est pas mon problème.
Ce CDI vous liait en tout cas au F91, pas à Flavio Becca ?
C’est en face du F91 que je me suis retrouvé au tribunal, mais comme il en était le sponsor, peut-être ont-ils des arrangements ? Flavio, pas plus qu’au Swift, son nouveau club, n’avait de toute façon de rôle officiel au sein du club. Moi, comme les joueurs qui nous rejoignaient, on signait tous avec le F91, pas avec Flavio Becca.
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