L’association Etika fête ses 25 ans d’engagement pour la finance éthique avec une nouvelle plateforme de crowdfunding : baptisée «etiCrowd», elle servira à concrétiser des projets durables dans la Grande Région.
C’était il y a tout juste 25 ans : en décembre 1996, l’association Etika se lançait dans la création d’instruments de finance éthique au Luxembourg. À l’époque, la première COP vient d’avoir lieu à Berlin et la thématique du développement durable commence à gagner du terrain en Europe, mais sans véritable réactivité au niveau politique.
«Obtenir des crédits pour monter certains projets liés à l’agriculture biologique par exemple était impossible», se souvient Ekkehart Schmidt, porte-parole d’Etika.
L’idée de créer une coopération entre banques et ONG germe alors, poussant Etika à frapper à toutes les portes : «La Spuerkeess est le seul établissement bancaire luxembourgeois à nous avoir suivis dans cette aventure et c’est comme ça que notre compte épargne alternative a vu le jour», explique-t-il.
À la suite de la crise de 2008, le grand public prend davantage conscience de ce qui se joue dans le théâtre de la finance mondiale et cherche des solutions bancaires avec une philosophie différente. De quoi booster les ouvertures de comptes Etika qui grimpent au fil des années : plus d’un millier sont ouverts actuellement pour un fonds de 52 millions d’euros.
Ce qui permet à l’association de soutenir près de 250 projets en 25 ans dans des domaines comme l’accès au logement, les énergies renouvelables, l’insertion par le travail, l’agriculture biologique ou encore le secteur de la santé et de l’action sociale.
«Nous soutenons les supermarchés Naturata ou des parcs éoliens, mais aussi de plus petits projets comme les Paniers de Sandrine ou la Stëmm vun der Strooss», précise le porte-parole.
Mais, en plus de la pandémie, ces deux dernières années ont été marquées par le pas en arrière de la part du partenaire historique, la Spuerkeess, contraint de revoir à la baisse la part reversée à Etika, avec une perte de 60 000 euros à la clé.
«Cela nous a obligés à nous redynamiser, à trouver d’autres ressources, d’autres partenariats», note Ekkehart Schmidt, qui annonce notamment une assurance vie durable en collaboration avec Bâloise Assurances Luxembourg.
Ainsi, pour Etika, 2022 ne sera pas seulement une année anniversaire, elle marquera aussi un important renouveau pour l’association engagée plus que jamais dans le changement positif de nos sociétés via une gestion des fonds transparente et éthique.
Une opportunité pour les projets risqués
Des valeurs incarnées par la toute nouvelle plateforme «etiCrowd» qui sera lancée dans quelques semaines, en même temps que le nouveau site web de l’association. Il s’agit d’un crowdfunding visant à soutenir des projets qui nécessitent moins de 50 000 euros pour se concrétiser, au Luxembourg, mais aussi dans la Grande Région.
«Une vraie opportunité pour des petits projets à la fois risqués et innovants. Chacun pourra faire un don en faveur de ce en quoi il trouve du sens», ajoute-t-il. «Le but étant de créer un instrument de finance efficace pour des initiatives qui combattent les multiples crises que nous traversons.»
Alors qu’une telle offre n’existe pas encore au Grand-Duché, Etika recherche en ce moment même les premiers projets à financer et des synergies intéressantes, déterminée à s’imposer comme pionnière dans ce secteur.
Autre atout dans la manche de l’ASBL pour l’année à venir, la création d’un Think tank baptisé «Transition» pour élaborer des modèles alternatifs dans un contexte post-covid. Les travaux ont déjà bien avancé avec la constitution de plusieurs groupes de réflexion sur différents thèmes, dont le logement ou l’urbanisme. Ce réseau deviendra autonome dans les prochains mois.
Enfin, le temps fort de 2022 pour Etika sera incontestablement l’accueil au Luxembourg de la 15e Summer School on Social Banking & Sustainable Finance, une conférence internationale annuelle regroupant plus de 80 collaborateurs issus de banques sociales et durables, d’institutions financières alternatives, et de banques traditionnelles de 20 pays.
Ce rendez-vous phare du secteur de la finance durable pourrait insuffler l’élan qui manque encore cruellement à la place financière nationale dont seulement 4 % des produits proposés sont considérés comme «verts» à ce jour :
«Le problème c’est qu’on ajoute des produits durables sans réduire les produits fossiles», pointe Ekkehart Schmidt, en référence au greenwashing. «Mais l’économie nationale dépend tellement de la finance qu’on n’ose pas instaurer la moindre restriction de peur de faire fuir les banques.»
Davos à la Cinémathèque
En collaboration avec la Cinémathèque et ATTAC Luxembourg, Etika projettera le lundi 3 janvier prochain à 20 h 30 le documentaire Davos (en version allemande). Le film débute au moment où une petite station de ski suisse se transforme en centre mondial de la richesse et de l’ostentation politique : le Forum économique mondial a de nouveau lieu.
Davos est un film sur l’équilibre et les contradictions, sur le capitalisme dans notre monde fragmenté et sur l’influence des puissants sur le grand nombre. Le film sera suivi d’une discussion avec le public. Régime covid 2G+.
Comment éviter le greenwashing
Pour ne pas tomber dans les pièges de l’écologie de façade en tant que consommateur, voici les conseils d’Etika.
1. En privilégiant les valeurs : un prix attractif ne doit pas faire oublier les conséquences sociales et écologiques de la production.
2. En posant des questions : demander au commerçant si une alternative bio ou à la durabilité éprouvée est possible. Il s’agit de privilégier les vendeurs et les producteurs durables, et d’éviter les autres.
3. En menant sa propre enquête : le moyen le plus simple pour déterminer si une entreprise ou une marque se livre au greenwashing consiste à chercher des preuves (chiffres ou faits) étayant ses affirmations, au lieu de les prendre pour argent comptant.
4. En comparant : en présence de différences importantes entres les produits, se tourner vers des organismes neutres et indépendants permettant de les comparer, par exemple Öko-Test ou des associations de consommateurs.
5. En privilégiant les labels reconnus : pour les articles achetés fréquemment, persévérer dans la recherche de produits vertueux. Le meilleur gage de qualité (et de vérité) visible sur l’emballage demeure le label d’un organisme certificateur reconnu, délivré aux producteurs sérieux.
Christelle Brucker
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