Accueil | Editoriaux | Le «Biélorustre»

Le «Biélorustre»

En quelques heures, Roman Protassevitch est devenu un nouveau symbole du sort réservé à l’opposition biélorusse, marée humaine emmenée par Svetlana Tikhanovskaïa – en exil forcé depuis les élections d’août 2020, qui se fait canarder pour sa contestation pacifique contre l’élégant président Alexandre Loukachenko, accroché au pouvoir comme à sa kalachnikov depuis 1994. Un rustre comme on n’en fait heureusement plus beaucoup, fier héritier des vieilles dictatures communistes. Qui méprise et bafoue les droits humains quand il n’emprisonne pas à tour de bras. Depuis la vague de protestation inédite dans ce pays d’Europe où la peine de mort reste légion, quelque 35 000 personnes ont été arrêtées et nombre d’entre elles jetées dans les geôles du régime. Sans autre forme de procès que leur participation aux manifestations.

Dimanche, la démonstration de force a pris une tournure plus incroyable encore avec le détournement d’un avion de ligne Ryanair, entre Athènes et Vilnius, en raison d’une prétendue alerte à la bombe. Le hasard a bien fait les choses pour Loukachenko, puisqu’à bord se trouvaient le journaliste d’opposition de 26 ans et sa compagne. Tous deux attrapés au vol et aussitôt placés en détention à Minsk. À l’instar des autres militants pourchassés avant lui, il est reproché à Roman Protassevitch «l’organisation de troubles massifs» l’été dernier. Des faits qu’il a reconnus dans une vidéo aux allures de mise en scène, diffusée à la télévision publique. Ses proches y voient surtout des aveux obtenus sous la contrainte et sans doute par la violence. 

Pour une fois, l’Union européenne n’a pas tardé à réagir. Sans fausse note et de concert, ses États membres ont adopté un paquet de sanctions contre le pouvoir en place dont le contournement de l’espace aérien biélorusse. Les compagnies internationales se sont mises au diapason. Autant de décisions rabrouées par le Kremlin, l’allié stratégique. Les Occidentaux n’ont pas hésité à dénoncer un acte de «piraterie» et de «terrorisme d’État». Des méthodes de voyou, pour le dire plus simplement. Il appartiendra au prochain G7 de maintenir la pression sur Loukachenko et lui apprendre les bonnes manières.

Alexandra Parachini