Trente-quatre ans et un statut d’intouchable numéro 1 à la fois au Bayern Munich et en sélection : Manuel Neuer, qui égalera samedi le record de sélections pour un gardien allemand, écrase la concurrence depuis une décennie.
Le capitaine de la Mannschaft fêtera samedi à Leipzig à huis clos contre l’Ukraine (20h45) sa 95e apparition sous ce maillot, soit autant que le légendaire Sepp Maier, champion du monde 1974.
Si tout va bien, le champion du monde 2014 s’emparera ensuite seul du record mardi en Espagne, dans ce qui pourrait être une finale de groupe pour la première place.
Mais les chiffres et le palmarès (cinq fois désigné meilleur gardien du monde) ne disent pas tout de la place que Neuer occupera dans l’histoire du football. Il compte en effet parmi les très rares gardiens à avoir durablement fait évoluer leur poste, à l’instar du Russe Lev Yachine ou du Français Fabien Barthez.
Dans les années 1960, Yachine avait montré comment faire la loi dans sa surface, à une époque où les portiers préféraient garder les deux pieds sur leur ligne de but.
À la fin du siècle dernier, Fabien Barthez était devenu le premier contre-attaquant de son équipe, par ses relances fulgurantes et précises.
Neuer, lui, a étendu son rayon d’action bien au-delà de sa surface, avec des sorties à 30 mètres ou plus de son but, à la manière d’un libéro.
« L’assurance de Guardiola »
« Lorsqu’il s’agit d’être le 11e joueur de champ, il a été la référence absolue », constate d’ailleurs Bodo Illgner, champion du monde 1990 dans les buts de l’Allemagne.
Son jeu au pied va évidemment de pair avec ses autres qualités : impérial sur sa ligne, impressionnant dans les duels et millimétrique dans ses relances. « ‘Manu’ transmet un formidable sentiment de sécurité », s’enthousiasme Andreas Köpke, l’un de ses prédécesseurs en équipe nationale, aujourd’hui entraîneur des gardiens en sélection : « On peut dire qu’il a porté le jeu du gardien à un niveau supérieur ».
Apparemment, Neuer ne rassure pas seulement ses coéquipiers : au Bayern Munich, la légende raconte que Pep Guardiola, en 2013, n’a signé son contrat d’entraîneur qu’après avoir reçu l’assurance que le club ne laisserait pas partir Neuer.
Pour l’instant, les années semblent ne pas avoir de prise sur ce géant d’1,92 m, toujours indéboulonnable en équipe nationale, au grand dam de son concurrent du FC Barcelone Marc-André ter Stegen.
Lorsque le sélectionneur Joachim Löw a décidé, en 2019, de mettre d’office à la retraite internationale ses tauliers victorieux du Mondial-2014, il n’en a gardé que deux : Toni Kroos et Manuel Neuer.
« Neuer est un gardien de but d’exception, une chance pour le football allemand, s’est justifié le coach, il a été un facteur majeur de notre développement et de nos succès dans la décennie écoulée. »
L’Euro en ligne de mire
Le Munichois vient tout juste d’être désigné « gardien UEFA » de l’année, pour sa contribution majeure à la victoire du Bayern en Ligue des champions, laissant à son coéquipier Robert Lewandowski le titre de « joueur UEFA de l’année ».
Un classement que Löw a trouvé contestable : « Je n’ai rien contre Lewandowski », a-t-il commenté, « mais pour moi, le joueur de l’année c’est Manuel Neuer. Ce qu’il a arrêté dans ce Final 8 à Lisbonne ! Il a gardé la maison étanche. Une grande part de la victoire est pour lui. »
Brillant en quart et en demi-finale, il a surtout été décisif en finale contre le PSG : ses parades réflexes et ses sauvetages en grand écart, bras écartés, dans son style caractéristique de gardien de hockey sur glace, ont maintenu le Bayern dans la partie et permis aux Allemands de se contenter d’un seul but (de Kingsley Coman) pour soulever « la Coupe aux grandes oreilles ».
Sauf blessure, le portier va dépasser sous peu les 100 sélections sous le maillot aux quatre étoiles. Peut-être l’été prochain à l’Euro, où l’Allemagne retrouvera la France, le Portugal et la Hongrie en phase de groupes, avec l’indéboulonnable Manuel Neuer comme dernier rempart.
LQ/AFP