« L’heure est grave », va expliquer Emmanuel Macron aux Français mercredi soir avant d’annoncer de nouvelles mesures contraignantes, voire des couvre-feux qui devraient surtout toucher les grandes villes où le Covid-19 s’emballe.
Depuis plusieurs jours, l’exécutif ne cesse de distiller publiquement comme en privé des messages alarmistes sur le regain de l’épidémie de coronavirus qui menacerait de submerger le système de santé, notamment à Paris où la situation est jugée « dramatique », selon plusieurs sources.
Les derniers chiffres montrent encore une augmentation globale du nombre de personnes en réanimation (1 633 pour une capacité actuelle nationale d’environ 5 000 lits) et 84 décès en 24 heures, avec un bilan global de près de 33 000 morts en sept mois. Une résurgence inquiétante de la pandémie qui conduit d’autres européens à durcir aussi les mesures pour tenter d’en limiter la progression et éviter un confinement dévastateur pour l’économie, le FMI tablant sur une contraction du PIB mondial de 4,4% cette année.
« Toutes les options sont sur la table »
C’est à cette aune et alors qu’un rapport pointe le manque d’anticipation de l’exécutif dans la crise que le chef de l’État doit trancher mercredi soir en s’adressant aux Français à partir de 19h55, pour 45 minutes d’interview à la télévision.
Mais dans la panoplie de restrictions à sa disposition, qui peuvent aller jusqu’à un couvre-feu total à partir de 20h ou 21h dans les zones les plus frappées par la virus, lesquelles Emmanuel Macron retiendra-t-il ? « Toutes les options sont sur la table », répond son entourage, en soulignant à quel point « l’heure est grave ». A priori, tout reconfinement national ou local, apparenté à l’arme ultime, semble toutefois écarté, et les dispositions actuellement en vigueur pour les écoles, collèges et lycées devraient être prolongées, comme l’a indiqué mardi soir le ministre de l’Éducation.
Mais Macron pourrait aussi frapper fort, en naviguant sur l’étroite ligne de crête entre impératifs sanitaires, économiques et sociaux. « En cas de couvre-feu, tous les acteurs seront concernés. Comment expliquer à un restaurateur qui doit fermer qu’un théâtre peut rester ouvert ? Ce sera extrêmement clair », assure son entourage, ajoutant qu’il faut des mesures « bien plus longues » que pour 15 jours. « La différence du nombre de morts se chiffre par dizaine de milliers selon les choix qui seront faits. Y compris l’horaire d’un couvre-feu compte : une heure change la donne », souligne l’entourage du chef de l’État. Le curseur pourrait aussi bouger sur le recours au télétravail, la régulation des transports ou encore l’ouverture de lieux publics le soir.
« Cadre très fouillis »
Les professionnels de l’hôtellerie restauration indépendante se sont alarmés mardi soir, d’un possible couvre-feu qui selon eux « condamnerait à la faillite des milliers d’établissements ». Ce secteur fait partie des professions durement éprouvées par la crise qui a également plongé des centaines de milliers de personnes supplémentaires dans la pauvreté.
Le président sera donc aussi attendu sur ce terrain là mercredi soir. « Les Français ont autant peur pour leur santé que pour leur emploi. Il faut parler des deux », relève un proche du président, qui pointe aussi le besoin de visibilité, « à moyen et long terme », c’est-à-dire sur « 6 à 8 semaines », de la population. Le même résume aussi le dilemme actuel : « le gros problème c’est que les lieux de diffusion du virus sont d’abord des lieux privés » où se rassemblent notamment les jeunes qui diffusent le plus le virus, et sur lesquels l’exécutif n’a que très peu de prise juridique. « On appelle à la responsabilité des gens mais dans un cadre très fouillis », regrette pour sa part un cadre de la majorité, en épinglant la communication souvent floue au sommet de l’État.
LQ/AFP