À seulement 18 ans, le nageur reckangeois a décidé de dire stop. Le mental ne suit plus. L’envie n’est plus là. Il veut désormais profiter de la vie. Et se concentrer sur son avenir.
Une journée entière. 24 heures. Imaginez que vous passez toute une journée à vous entraîner. À soulever de la fonte. À enchaîner les longueurs de bassin. Une journée entière.
Ça, c’était jusqu’à présent le programme hebdomadaire de Bob Sauber. Depuis qu’il a mis les pieds dans la piscine à Reckange à l’âge de cinq ans «pour apprendre à nager», le gamin s’est plu au jeu et il a franchi un à un les échelons vers le haut niveau.
Au début de sa carrière, il se concentre essentiellement sur les longues distances : «J’étais très constant et c’est ce qu’il faut. Sur un 1 500 m, on pouvait également la jouer tactique. Selon la concurrence, je pouvais attendre ou passer à l’attaque. J’avais beaucoup de liberté», confie le jeune homme, qui décrochera deux titres nationaux sur 1 500 m ainsi que deux meilleures performances 14 ans sur 800 et 1 500 m.
Mais il ne va pas se cantonner au long. En effet, à partir de 15 ans, il se met à la muscu. Et les résultats sont spectaculaires : «Très vite, je suis devenu trop costaud pour faire de la longue distance. Mais avec mon passé dans ce domaine et donc forcément une bonne endurance, je me suis dit que si je combinais vitesse et muscle, ce serait bien pour m’aligner sur les 100 et 200 m.» Voilà donc le fondeur qui se mue en sprinteur.
Et là encore, avec bonheur puisqu’il décroche même son troisième et dernier titre national individuel l’an passé, lors des championnats nationaux, sur le 100 m nage libre.
«Ce n’était plus la même joie qu’avant»
La natation prend une part immense dans sa vie. Et lui permet également de connaître les joies de l’équipe nationale. Il participera ainsi aux EYOF 2017, aux JO de la jeunesse en 2018 et l’an passé, il était du contingent luxembourgeois aux JPEE au Monténégro ainsi qu’aux championnats d’Europe juniors à Kazan…
Mais 2020 marquera un tournant. Avec le confinement, Bob Sauber a été privé de natation. Et pendant de longues semaines, il a eu le temps de se poser. Et de s’interroger : «J’ai réalisé le temps que me prenait la natation et je me suis demandé ce que je pourrais en faire. À me poser des questions sur mon avenir…»
Quand il a pu reprendre l’entraînement, début mai, quelque chose avait changé : «Ce n’était plus la même joie qu’avant. J’y ai longuement réfléchi et je me suis dit qu’il était préférable d’arrêter maintenant et d’avoir de bons souvenirs plutôt que de continuer quelques années et d’avoir, par la suite, des regrets de ne pas avoir arrêté plus tôt.»
Vendredi, il s’est donc rendu à la piscine pour discuter avec ses entraîneurs et les informer de sa décision : «Ils disent que c’est dommage, mais ils comprennent mon choix», indique encore Bob Sauber qui a énormément parlé avec son coéquipier et vieux pote Jacques Schmitz : «Il m’a dit de faire ce que je pensais qui était le mieux pour moi.»
Sport auto et alpinisme au programme
Même si la décision peut paraître brutale, il faut aussi comprendre la vie d’un nageur. À de rares exceptions près, on nage pour la gloire. On ne vit pas de son sport. L’entraînement est exigeant, ingrat et si on s’arrête quelques jours, il faut du temps pour revenir à son niveau. Tout cela pour gagner des dixièmes ou des centièmes de secondes… : «C’est beaucoup de pression, beaucoup de contraintes et cela je ne le supporte plus», confie-t-il. Et de donner un exemple : «Si je veux sortir voir des copains et que je rentre un peu tard, ma performance dans l’eau s’en ressentira le lendemain.»
Bob Sauber veut profiter de la vie. Et ne pas passer à côté de moments qu’il est difficile de vivre quand on s’entraîne autant. Et surtout, il veut mettre toutes les chances de son côté pour réussir dans la vie : «Depuis tout petit, j’ai un chemin devant les yeux. Je veux me concentrer sur les études pour avoir un travail qui me plaît. Tant qu’à travailler 40 ans, autant que ce soit agréable.» Et d’ajouter : «Si j’arrête maintenant, j’ai le temps pour passer mon bac et étudier.»
Passionné de mécanique et de sport auto – «Mon grand-père avait des voitures américaines et m’a emmené voir des courses» – il rêve de travailler dans ce domaine : «Je veux partir étudier à Stuttgart pour devenir ingénieur mécanique. Là-bas, il y a Porsche, Mercedes qui n’est pas loin et qui travaillent avec l’université et recrutent les meilleurs.» Bob Sauber bientôt en F1? «Ce serait le rêve. Mais je regarde beaucoup le GT3, avec des voitures à peine modifiées. J’espère faire un jour partie d’une écurie pour aider un pilote à gagner. C’est un sport d’équipe. Sans bon team, le pilote ne peut pas l’emporter.»
Mais avant de se pencher sur son avenir scolaire, place aux vacances. Avec une autre forme de défi : «Je vais partir avec un ami pour grimper le mont Blanc. Il le connaît comme sa poche et c’est un challenge qui m’attire.» Comme Bob Sauber n’aime pas faire les choses à moitié, il voit grand et se projette dans l’avenir : «J’aimerais m’attaquer aux 7 Summits, les sept plus hauts sommets sur chaque continent. Aucun Luxembourgeois ne l’a jamais fait…»
Si une page se tourne avec la natation, Bob Sauber est prêt à en écrire beaucoup d’autres. Encore plus belles.
Romain Haas