Au printemps 2018, les auteurs d’un home-jacking avaient volé plus de 12000 euros à une veuve à Frisange en pleine nuit. Au 2e jour du procès vendredi, la parole était au présumé instigateur âgé de 57 ans. Il conteste tout.
Trois hommes comparaissent depuis jeudi devant la 13e chambre criminelle pour avoir été impliqués dans un home-jacking à Frisange le 21 mars 2018. Deux d’entre eux reconnaissent les faits. Ce sont bien eux qui ont pénétré durant la nuit dans la maison et ont violemment tiré de son sommeil la veuve de 73 ans avant de lui ligoter pieds et mains avec des attache-câbles pour s’emparer du contenu de son coffre-fort et s’enfuir avec plus de 12 000 euros.
Si le déroulement des faits semble clair dans cette affaire, c’est plus la question d’où est venue l’idée du cambriolage qui donne du fil à retordre. Le troisième homme poursuivi pour être l’«instigateur» conteste en effet tout. Or c’est le seul qui connaissait la victime à l’époque. Il était en couple avec sa fille dans les années 80, mais ils avaient gardé contact par la suite. Ce qui fait de lui, selon les enquêteurs, le lien entre le duo de cambrioleurs et la victime. Car il était bien au courant du décès de son mari quelques semaines auparavant.
De l’enquête, il ressort également que Roman L. (57 ans) avait embarqué Constantin M. (32 ans) et Dietmar S. (46 ans) en voiture à Frisange peu de temps avant les faits. «Je voulais lui présenter mes condoléances», a répété vendredi matin le quinquagénaire à la barre. «C’était une action spontanée après avoir fait le plein de cigarettes à Schengen.» Or, ne voyant pas la Citroën bleue de la fille, ils avaient rebroussé chemin. «Qu’aurais-je fait seul chez une femme que je n’ai plus vue depuis 20 ans?», dira-t-il pour tenter de convaincre les juges.
L’enterrement, la voiture et les bijoux…
Mais quand on connaît la suite des événements, cette virée à Frisange depuis la Sarre suscite bien des interrogations. En gros, Constantin M. et Dietmar S. savaient que la septuagénaire vivait seule dans la maison. Ils savaient aussi que quand la Citroën n’était pas là, ils ne rencontreraient pas sa fille. Cela ne s’arrête toutefois pas là. Au fil des auditions du trio, il était apparu que Roman L. avait aussi montré des photos de bijoux à Dietmar S. Des photos que la fille avait prises en rangeant la maison de ses parents fin 2017… Bref, le duo qui a débarqué en pleine nuit à Frisange disposait de tous les éléments utiles pour le cambriolage.
«Ils savaient que le mari de la septuagénaire était décédé, ils savaient où se situait sa maison et qu’il devait y avoir des bijoux…», ne manquera pas de récapituler la présidente. La réponse du quinquagénaire : «Je n’ai encore jamais mis les pieds dans cette maison.» Il campera sur la position qu’il n’a rien à voir avec ce home-jacking. Mais il ne saura pas apporter d’explication quant au fait que Constantin M. et Dietmar S. ont eu l’idée de cambrioler cette maison en question.
La chambre criminelle ne manquera pas non plus de l’interroger sur le fait que le duo se soit présenté deux jours avant les faits avec un bouquet de fleurs à la porte de la veuve. Cette question avait mis le prévenu Dietmar S. en difficulté la veille. À demi-mot, il avait fini par dire que c’était peut-être l’idée de Roman L. «Quel est mon intérêt qu’ils s’y rendent avec un bouquet?», s’est défendu ce dernier vendredi.
«Je suis seulement là pour aider les gens»
Du butin, le quinquagénaire nie avoir vu le moindre sou. Et d’insister : «Je ne suis pas un criminel! J’ai assez d’argent pour vivre. Jamais dans ma vie je n’ai volé un clou. Je suis seulement là pour aider les gens.»
Son avocate prendra la parole mardi matin lors de la suite du procès. Dans leurs plaidoiries, les avocats du duo de cambrioleurs ont dès vendredi contesté l’infraction de la séquestration et la circonstance aggravante de l’association de malfaiteurs libellées par le parquet. «Ce n’était pas une expédition commando dans le but de commettre un home-jacking. Quand ils n’ont pas trouvé la clé du coffre-fort cachée dans la boîte de médicaments, ils ont eu la mauvaise idée de réveiller Madame. Le fait qu’ils l’aient ligotée est un élément constitutif du vol», a estimé Me Philippe Stroesser. Soulevant les aveux de son client après son identification par ses traces ADN, il ajoutera : «Constantin M. n’est pas l’instigateur. C’est la cinquième roue du carrosse.» Certes, le trentenaire aurait déjà des condamnations dans son casier en Allemagne, mais jamais aucune pour un home-jacking.
«La question du bouquet de fleurs n’a pu être clarifiée, mais sur tous les autres points, il y a des aveux», a renchéri Me Noémie Sadler, défendant Dietmar S. Elle a demandé que sa peine soit assortie d’un sursis partiel. Depuis leur extradition au Grand-Duché, les prévenus se trouvent en détention préventive à Schrassig.
Suite et fin du procès mardi matin avec le réquisitoire du parquet.
Fabienne Armborst
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