Le Luxembourg est le deuxième pays le plus cher de l’UE en matière de produits alimentaires, derrière le Danemark et à égalité avec l’Autriche. Les «restrictions territoriales de l’offre» sont pointées du doigt.
Se nourrir au Grand-Duché coûte en moyenne 25 % plus cher que dans les autres pays européens. C’est ce qui ressort d’une étude dirigée par l’office statistique de l’Union européenne (Eurostat), d’après des enquêtes de prix menées sur l’année 2018. Cette étude est basée sur une méthode intégrant les parités de pouvoir d’achat, qui supprime l’effet des différences de niveaux de prix entre les pays.
C’est surtout au niveau du pain et des céréales ainsi que du lait, du fromage et des œufs que le Luxembourg applique des tarifs plus importants que la moyenne européenne. Il arrive ainsi dans ces catégories au troisième rang européen.
Les prix de ces produits sont bien plus élevés que ceux pratiqués par ces voisins limitrophes, l’Allemagne, la Belgique et la France, ce qui peut assurément avoir une incidence sur le marché luxembourgeois.
Ainsi, au Grand-Duché, le pain et les céréales coûtent 27 % plus cher que la moyenne européenne, quand ils coûtent respectivement 1,5 %, 14,5 % et 11,2 % plus cher que la moyenne en Allemagne, en Belgique et en France.
Dans la catégorie «lait, fromage et œufs», les prix au Luxembourg sont 30 % plus élevés que la moyenne européenne. Avec un indice de 131, le Luxembourg dépasse largement la Belgique (112) mais plus encore l’Allemagne et la France qui proposent même des prix inférieurs à la moyenne de l’UE (indices respectifs de 96 et 99).
À l’inverse, le Luxembourg propose des prix moins élevés que la moyenne pour ce qui est des boissons alcoolisées et du tabac.
Des commerçants sous contrainte
Difficile toutefois de déterminer les causes principales de telles différences. Dans sa réponse à une question parlementaire sur ce sujet soulevée début août par le député Mars Di Bartolomeo (LSAP), le ministre de l’Économie, Étienne Schneider, a précisé que «le rapport publié par Eurostat ne permet pas de déterminer les raisons principales des écarts de prix constatés. Il s’agit uniquement d’une comparaison des niveaux de prix pour les consommateurs (…) il n’est pas possible d’analyser les facteurs de divergence de prix, comme par exemple les loyers, les salaires et le niveau des taxes».
Néanmoins, l’une des pistes pouvant expliquer ces disparités serait celle des restrictions territoriales de l’offre (RTO), ces restrictions «imposées par un fournisseur empêchant le revendeur de s’approvisionner librement, notamment dans les pays de son choix».
En effet, comme l’a signalé l’Observatoire de la compétitivité (ODC) dans une enquête publiée en 2018, «de nombreuses entreprises luxembourgeoises affirment régulièrement faire face à des problèmes récurrents pour s’approvisionner librement auprès du fournisseur de leur choix au sein du marché intérieur de l’UE», du fait de ces RTO.
«Le commerce de détail luxembourgeois est très souvent en concurrence directe avec le commerce de détail limitrophe», explique l’ODC. «Or le consommateur luxembourgeois est demandeur de produits des trois pays (du Benelux). L’impossibilité pour certains commerçants luxembourgeois de choisir le circuit de distribution le plus efficient en termes de prix et d’adéquation des produits à la demande luxembourgeoise peut représenter un désavantage compétitif considérable.»
En attendant les résultats d’une étude plus approfondie lancée par la Commission européenne au sujet de ces RTO, susceptibles «d’entraîner une triple pénalisation pour les entreprises au Luxembourg : en matière de prix (impossibilité de s’approvisionner aux meilleurs prix); en matière d’offre de produits et de services (disponibilité limitée); en matière d’efficience (services après-vente, formations inadéquates imposées par le distributeur, etc.)», Étienne Schneider a assuré que le «gouvernement suit de près ce dossier d’une importance structurelle pour le Luxembourg».
Tatiana Salvan