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Vote des étrangers : au Chili, ce droit est une évidence


Depuis 2012, tous les électeurs, Chiliens comme étrangers, sont automatiquement inscrits sur les listes électorales pour toutes les échéances, locales et nationales. (Photo AFP)

Le Chili est l’un des trois pays au monde à accorder le droit de vote aux étrangers lors des scrutins nationaux. La question ne fait pas débat.

« Si les étrangers votent au Chili ? Oui, je crois l’avoir entendu à la télévision…», répond avec hésitation Francisca qui presse le pas pour aller faire ses courses. Quant à Juan, qui passe à ses côtés à bicyclette, il avoue ne pas le savoir, et ajoute dans un haussement d’épaules : «Mais si c’est le cas, je trouverais ça logique, du moment qu’ils suivent ce qui se passe dans le pays !»

Un simple micro-trottoir montre qu’au Chili, le vote des étrangers n’est pas un sujet en soi, ni de débat ni de discussion. La plupart des gens ne sont pas au courant qu’il existe et quand ils le savent, ils ne voient pas le problème. Même Patricio Santamaria, qui dirige l’institution chargée d’organiser les élections au Chili, le Servel, avoue méconnaître la date à laquelle le droit de vote a été donné. «C’est une question qu’on ne me pose jamais», sourit-il, confus.

«Il existe depuis la Constitution de 1980», précise-t-il, quelques minutes plus tard. C’est le général Augusto Pinochet qui a donné le droit de vote aux étrangers à toutes les élections. Jusqu’ici et depuis 1934, ils n’avaient le droit d’élire que les conseillers municipaux. Seules conditions pour bénéficier de ce droit : avoir la majorité, résider dans le pays depuis au moins cinq ans, ne pas avoir été condamné à une peine afflictive. Le dictateur l’a fait pour gagner des voix, il était particulièrement apprécié dans les colonies étrangères du pays, allemande, croate, espagnole, notamment.

«Le Chili est un pays né de la colonisation», explique le professeur de droit Francisco Leturia. «Et ses élites sont en majorité composées de migrants : Allemands, Croates, Espagnols, Italiens, Palestiniens… Nous n’avons pas de sentiment d’appartenance à une race, si on peut dire. Du coup, le fait qu’un étranger puisse voter fait partie, pour nous, de l’ordre naturel des choses.» Ce fils de migrant espagnol ajoute pour illustrer son idée : «Andrés Bello, dont le buste apparaît sur nos billets de banque, était vénézuélien…»

Claire Martin, correspondante spéciale

Dossier à retrouver en intégralité dans Le Quotidien papier de ce jeudi