Les ambitions technologiques de la Chine, qui produit ses propres semi-conducteurs pour rivaliser avec les Etats-Unis, alimentent l’inquiétude de Washington et compliquent le différend commercial entre ces deux puissances, bien au-delà de l’acier et de l’agriculture.
Une délégation américaine s’apprête à discuter jeudi à Pékin des contentieux commerciaux bilatéraux, mais un autre sujet pourrait s’inviter dans les pourparlers : les efforts tous azimuts de la Chine en vue de créer des champions technologiques à l’horizon 2025. En amont des applications mises au point par les géants chinois de l’internet que sont Tencent, Alibaba ou Baidu, rivaux déclarés de la Silicon Valley, les semi-conducteurs font partie des technologies de premier plan dans lesquelles ce pays veut rattraper son retard.
La Chine importe 80% des puces dont elle a besoin, un élément crucial entrant dans la fabrication des produits électroniques, des smartphones aux ordinateurs. L’objectif est de perfectionner la production nationale pour réduire sa dépendance vis-à-vis des onéreuses importations de composants essentiellement en provenance des Etats-Unis, où Intel, Qualcomm et Micron dominent le marché.
La Chine «doit être autosuffisante»
Cette dépendance a été mise en exergue mi-avril, quand les Etats-Unis ont soudainement bloqué leurs exportations de composants destinés au géant chinois des télécoms ZTE, fer de lance des infrastructures 5G, accusé d’avoir violé des embargos commerciaux, une sanction qui menace la survie de l’entreprise. La Chine « doit être autosuffisante » pour les technologies-clefs et « rassembler ses forces pour faire de grandes choses », a martelé le président Xi Jinping la semaine dernière en visitant une firme high-tech, rappelant les exploits passés de son pays, de la bombe atomique à l’aventure spatiale. Or le « Plan 2025 » du régime communiste doit justement transformer la Chine, usine du monde connue pour ses produits manufacturés bon marché, en puissance des technologies de pointe. Un projet qui inquiète vivement de l’autre côté du Pacifique. « La propriété intellectuelle est le point le plus épineux », commente le représentant américain au Commerce (USTR) Robert Lighthizer. Washington a épinglé les pratiques chinoises dans ce domaine, fustigeant notamment les coentreprises et les transferts de technologies imposés aux groupes étrangers. La Chine est désormais sous la menace de taxes sur quelque 50 milliards de dollars de produits exportés vers les Etats-Unis.
Concurrence faussée
Les Etats-Unis dénoncent en outre le soutien massif de l’Etat chinois, qui fausse les règles de la concurrence. Selon des statistiques citées par l’USTR, gouvernement central et collectivités locales ont injecté environ 100 milliards de dollars depuis 2014 dans le secteur des semi-conducteurs, la Chine ambitionnant d’être en mesure de répondre elle-même à hauteur d’au moins 50% à ses besoins en puces électroniques. Quelque 20 milliards ont alimenté un « Fonds d’investissement pour l’industrie chinoise du circuit intégré » et, après la récente sanction visant ZTE, Pékin a confirmé préparer la création d’un deuxième fonds national.
AFP et le Quotidien.