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Schmit / Scholtus : un clash qui fera date


Avec l'imbroglio à sa tête, l'Adem se trouve aujourd'hui dans le flou. Une situation qui est à rectifier au plus vite pour le Premier ministre, Xavier Bettel, qui garde sa confiance dans son ministre du Travail. (photo archives lq)

Les reproches d’incapacité formulés vendredi dans nos colonnes par le ministre du Travail contre la directrice réhabilitée de l’Adem ont fait d’importantes vagues. Le CSV fulmine, le Premier ministre temporise.

Le coup de gueule du ministre Nicolas Schmit a été retentissant. Visiblement énervé par l’attitude affichée par Mariette Scholtus, qui, pour son retour à la tête de l’Adem, s’était contentée de revendiquer deux postes supplémentaires dans des conseils d’administration, le ministre du Travail avait décidé de vider son sac. La phrase choc  «Elle est incapable» fera date. Le dernier mot n’est pas encore dit dans cette affaire embarrassante.

Les yeux étaient rivés vendredi sur le Conseil de gouvernement. Après sa sortie remarquée dans nos colonnes au sujet de Mariette Scholtus, l’ancienne et donc depuis cette semaine nouvelle directrice de l’Adem, le ministre du Travail, Nicolas Schmit, était attendu de pied ferme par ses collègues ministres. «Il nous a informés sur la teneur et la motivation de l’arrêt de la Cour administrative», s’est contenté d’annoncer lors du briefing pour la presse le Premier ministre, Xavier Bettel. Nicolas Schmit s’est-il fait taper sur les doigts après les graves reproches qu’il a formulés dans nos colonnes à l’encontre de celle qu’il avait chassée en 2012? Aucune précision n’a été donnée à ce sujet vendredi.

Bettel renvoie la balle à Schmit

Mais le chef du gouvernement ne semble pas trop s’être éloigné du ministre du Travail, même s’il lui a rapidement renvoyé la balle. «Il est vrai qu’Isabelle Schlesser (NDLR : la directrice sortante de l’Adem, redevenue adjointe) a fait du bon travail. J’ai l’espoir que la dynamique, l’activité et l’attitude positive resteront les mêmes au sein de l’Adem. Mais ce n’est pas moi le ministre de tutelle. Il ne me revient donc pas de dire à Nicolas Schmit ce qu’il doit faire dans la mesure où il connaît la voie à suivre pour poursuivre la réforme de l’Adem», a indiqué Xavier Bettel.

Tout cela n’empêche pas que le gouvernement se trouve face à un important imbroglio. Le précédent du colonel Ries, renvoyé au placard par l’ancien ministre Jean-Marie Halsdorf après avoir gagné une première bataille judiciaire à la suite de sa révocation par Jean-Louis Schiltz, fait hésiter le gouvernement à relancer la procédure de nomination.

«La situation juridique doit encore être clarifiée. Il s’agit d’un vice de procédure. Un ministre garde cependant son droit de procéder à des révocations, à condition de respecter les procédures», a fait remarquer le Premier ministre, qui, à l’image de son ministre du Travail, a appelé à ne pas perdre de vue le principal souci : la lutte contre le chômage. «Il est évident que la sérénité doit être de mise au sein de l’Adem. Les placeurs doivent garder leur motivation pour continuer à entretenir une relation de confiance avec les demandeurs d’emploi mais aussi les entreprises», souligne Xavier Bettel.

Quelle sera donc la solution que le ministre Nicolas Schmit va en fin de compte choisir pour redresser une situation devenue intenable. Jeudi, le rendez-vous avec Mariette Scholtus avait tourné court. «Le seul vœu de Mme Scholtus était de récupérer son poste de directrice mais aussi ses deux postes de conseil d’administration auprès des CFL et du Fonds national de solidarité. Sur le fond, rien n’a été dit», nous avait confié en substance le ministre.

Une réaction «indigne», selon le CSV

C’est visiblement cette attitude qui a fait sortir de ses gonds Nicolas Schmit, qui reproche ouvertement à Mariette Scholtus d’«être incapable» de mener à bien la réforme de l’Adem. C’est d’ailleurs la raison principale qui a provoqué en 2012 le divorce entre le ministre et sa directrice de l’Adem. «Je ne comprends pas qu’elle se dise surprise par la décision», avait indiqué dès mercredi Nicolas Schmit. Le vice de procédure acté par la Cour administrative concerne un délai non respecté.

Ce détail administratif risque d’occuper encore longtemps le gouvernement. Et il s’agit d’une occasion en or pour l’opposition et plus particulièrement le CSV d’attaquer la coalition en place. Vendredi, le Parti chrétien-social a qualifié d’«indigne» la sortie médiatique du ministre Nicolas Schmit. «Mercredi encore, le ministre nous a confirmé à la Chambre qu’il allait exécuter l’arrêt de la Cour. Maintenant, il vient de lancer une querelle ouverte sur la place publique, ce qui est inacceptable. S’il existe des problèmes entre M. Schmit et Mme Scholtus, qu’ils les règlent comme des adultes, en interne», tranche le président du CSV, Marc Spautz.

Le député chrétien-social n’hésite pas à en remettre une couche : «Il n’est pas le temps de polémiquer. Il est vrai que le ministre a un problème car il a désormais une directrice et trois directrices adjointes à l’Adem, alors que la loi n’en prévoit que deux. C’est à lui d’agir, mais cela ne peut se faire ni sur la place publique ni sur le dos des demandeurs d’emploi, qui n’ont certainement aucune compréhension pour cette querelle.»

Schmit se défend, Scholtus reste muette

Interrogé sur les piques lancées dans nos colonnes contre son parti et notamment l’ancien ministre du Travail François Biltgen, Marc Spautz est resté ferme. «Je sais que des choses ont traîné à l’Adem. Mais encore une fois : des différences de vue entre un ministre et un directeur d’administration peuvent se produire. Mais ce n’est pas une raison pour les porter sur la place publique», souligne-t-il.

Resté discret vendredi, Nicolas Schmit a finalement riposté sur Twitter. «La décision de réaffecter Mme Scholtus a été prise par le Conseil de gouvernement présidé par Jean-Claude Juncker et avec accord du ministre Biltgen qui l’avait nommée», a ainsi rappelé le ministre sur la toile en réponse aux reproches du CSV de ne pas se prononcer sur la «révocation illégale» et «sa part de responsabilité» dans ce dossier.

Reste une partie qui ne s’est pas encore manifestée dans cette affaire : Mariette Scholtus. Malgré plusieurs tentatives, Le Quotidien n’a pas réussi à joindre l’avocat de la directrice réhabilitée de l’Adem, Me Jean-Marie Bauler, vendredi. Dont acte.

David Marques

D’autres recours à venir ?

Le cas Mariette Scholtus pourrait ne pas rester le dernier qui viendrait contrecarrer les plans du gouvernement. «Je pense notamment à Daniel Miltgen, mais aussi Christiane Martin, révoqués de la tête du Fonds du logement et de l’Office luxembourgeois de l’accueil et d’intégration», note le député CSV Marc Spautz. Le président du Parti chrétien-social tient aussi à rappeler les problèmes que rencontre actuellement l’Inspection du travail et des mines (ITM), également sous la tutelle de Nicolas Schmit.