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Il faut s’attendre à des ouragans de plus en plus puissants


On distingue sur cette image du 7 septembre Katia, Irma et Jose. (Photo AFP)

La Martinique et la Guadeloupe sont passées ce lundi en alerte rouge en prévision de l’arrivée de l’ouragan Maria. Il y a une dizaine de jours, Irma avait déjà ravagé Saint-Martin et Saint-Barthélemy. Et fin août, Harvey avait noyé le sud-est du Texas, le Missouri et la Louisiane. Coup sur coup, ces puissants ouragans sèment la peur, la mort et la dévastation. Cet enchaînement est-il exceptionnel ? Le réchauffement climatique est-il en cause ? Décryptage avec l’aide d’Oliver Proust, prévisionniste à Météo France.

Dans l’Atlantique, les ouragans s’enchaînent depuis quelques semaines. Ce phénomène est-il exceptionnel ?
Oliver Proust, prévisionniste à Météo France : C’est la saison ! Dans le bassin atlantique, les ouragans se forment de mai à novembre. Ils naissent des systèmes orageux qui se décalent de l’Afrique de l’ouest, gagnent les eaux chaudes de l’Atlantique, puis se dirigent en s’intensifiant vers le bassin des Caraïbes et le continent américain.

Il est vrai que la saison 2017 est assez active, un peu au-dessus de la moyenne, mais pas exceptionnelle. Il y en a eu d’autres dans le passé : 2005, par exemple, l’année de Katrina. En outre, cette forte activité n’est pas une surprise, elle était annoncée du fait des conditions météo générales favorables à la formation d’ouragans.

Ils semblent toutefois particulièrement vigoureux…
On a eu effectivement Irma, qui était d’une intensité exceptionnelle. Avec des vents jusqu’à 300 km/h, c’est l’un des ouragans les plus puissant jamais enregistré dans l’Atlantique… Maria aussi est très intense. Mais des phénomènes cycloniques, il y en a partout, dans tous les bassins, toutes les années, là on en parle encore plus de ceux-là parce qu’ils touchent des zones habitées et a fortiori des îles françaises.

Quelles sont les causes de cette forte intensité ?
La température de l’eau, tout d’abord. En ce moment, l’océan est trop chaud par rapport à la normale. Si on étudie les moyennes sur les 30 dernières années, l’eau de l’Atlantique tropical est environ 2°C au-dessus de la moyenne.

La structure des cyclones, ensuite. Car l’intensité d’un ouragan varie en fonction de ce que l’on appelle le « cisaillement vertical ». Il s’agit de la variation des vents selon l’altitude. En fait, il faut imaginer un cyclone comme une cheminée, s’il y a beaucoup de cisaillements, votre cheminée va se tordre, et donc perdre de la puissance. Là le cisaillement est faible et donc les ouragans puissants.
Enfin, en altitude, les conditions atmosphériques sont très calmes et donc propices au renforcement des cyclones.

Pourquoi la zone des Antilles est-elle particulièrement touchée ?
Car c’est une zone tropicale. Là-dedans se trouvent les éléments qui permettent aux amas orageux qui circulent depuis l’Afrique sur l’Atlantique de grossir et de s’intensifier en cyclone.

Un cyclone est par ailleurs un phénomène océanique. C’est-à-dire qu’il a besoin de l’eau comme carburant. Et surtout, il a besoin de circuler sur une zone au faible relief. S’il y a des montagnes, ça lui casse sa structure. Du coup, le bassin des Caraïbes et le golfe du Mexique présentent les conditions idéales !

Le réchauffement climatique va-t-il intensifier le phénomène ?
On ne s’attend pas à ce que le réchauffement climatique entraîne un nombre plus important de cyclones, mais à ce qu’il conduise par contre à des phénomènes plus violents, en termes de vents mais aussi de précipitations. Cela s’explique du fait que l’air plus chaud est capable d’avoir plus d’humidité et donc de déverser plus de précipitations.

Qu’en est-il des différents types d’alertes ? Car entre l’échelle de Saffir-Simpson de 1 à 5 et la vigilance Météo-France de jaune à violette, il est parfois difficile de s’y retrouver…
L’échelle de Saffir-Simpson classe l’intensité des cyclones, de 1 à 5 en fonction de la force des vents [voir l’infographie ci-dessous]. C’est une échelle internationale utilisée pour tous les types de cyclones, qu’ils restent en mer ou qu’ils touchent des terres habitées. Elle est définie par rapport aux dégâts que peut occasionner un cyclone, et permet de les comparer à travers le monde, un peu à la manière de l’échelle de Beaufort pour les vents.

Après, dans chaque pays, il existe des systèmes de vigilance et d’alerte. Ainsi, le cyclone le plus puissant du monde pourrait ne déclencher aucune vigilance d’aucun pays s’il reste en mer.

La vigilance Météo France, elle, est classée de jaune à violette. Le jaune est une préalerte-cyclonique : c’est-à-dire qu’on attend une tempête tropicale dans les 48 à 72 h , en orange : la tempête arrive dans moins de 48 h, etc. Au niveau violet, la zone se trouve au coeur de l’ouragan et au maximum de son intensité. Il y a aussi un niveau gris, qui est déclenché après le passage du cyclone, quand il y a encore du danger pour les hommes, notamment du fait de crues etc.

Autrement dit, l’échelle de Saffir-Simpson est intrinsèque au phénomène météo tandis que la vigilance Météo France traduit l’impact sur les populations.

Le Républicain Lorrain