Élus français et luxembourgeois ont signé lundi un contrat sur la dépollution de l’Alzette. La coopération est nécessaire sur ce dossier : l’eau ne connaît pas de frontière!
L’Alzette prend sa source à Thil en France. Elle coule vers le Luxembourg, impuissant à agir seul, d’où l’impératif d’un plan commun de dépollution. Soyons clair : on ne se baignera pas dans l’eau de l’Alzette avant un bout de temps. «Vos enfants peut-être…», glisse un élu eschois. La rivière transfrontalière, qui prend sa source à Thil et qui se jette dans la Sûre au niveau d’Ettelbruck, reste très polluée. «On y retrouve des métaux lourds, des hydrocarbures et même des « PCB »», détaille Amélie Léger, ingénieure au Sivom, syndicat qui gère les eaux usées du côté d’Audun-le-Tiche. Les PCB regroupent de nombreux produits chimiques visqueux… Appétissant!
Élus luxembourgeois et français ont signé lundi une convention au nom évocateur, «Alzette, objectif qualité», pour prendre en main le dossier. Voici ce qu’il faut retenir de ce grand élan européen, à ce titre principalement financé par l’UE.
La pollution de l’Alzette aujourd’hui
Outre la pollution héritée de la sidérurgie, la pollution organique est un gros problème aussi. Pour parler clairement, les eaux de nos toilettes ont longtemps étaient déversées dans l’Alzette! Pas à Esch, qui dès 1920 s’est dotée d’un système de gestion moderne. Mais les communes des environs (Sanem n’est rattachée à la station d’épuration de Schifflange que depuis quelques années!) ont longtemps fait avec les moyens du bord. Particulièrement du côté français…
Les efforts déjà réalisés
L’Alzette coule de la France vers le Luxembourg. Problème, ce sont les Luxembourgeois qui ont eu de l’avance sur le traitement des eaux. La station d’épuration d’Audun-le-Tiche n’a été construite qu’à la fin des années 90, quand celle de Schifflange tournait depuis les années 60. «Et vue de Paris, je ne crois pas que l’Alzette ait beaucoup d’importance», a gentiment taclé Roland Schreiner hier, le bourgmestre de Schifflange. Concrètement, tous les efforts luxembourgeois de dépollution étaient vains. En réalité, les élus français ont de la considération pour ce problème, surtout les élus locaux. Mais comme souvent, c’est un problème de «diminution des dotations des collectivités territoriales» qui a enraillé la machine. Comprendre : les élus locaux ont peu de moyens financiers en France. «De gros efforts ont été faits ces dix dernières années, note Éric Jacquin, le président du Sivom d’Audun-le-Tiche. Nous sommes aujourd’hui à moins de 5 % de rejets directs dans l’Alzette.» Encore trop, malgré tout. D’où le plan lancé, en sollicitant l’aide européenne.
Un plan transfrontalier
Côté français, l’objectif est de relier définitivement toutes les habitations à la station d’épuration. C’est le gros du travail, avec plus de cinq millions d’euros de travaux prévus. Côté luxembourgeois, l’idée est de démultiplier les gains de la dépollution en renaturant l’Alzette dans tout le sud du Luxembourg. «Renaturer ça veut dire enlever les canalisations en béton, retrouver un tracé naturel de la rivière – longtemps mise « toute droite » pour accélérer les évacuations –, favoriser une flore adaptée au cours d’eau», décrypte Martin Kox, l’échevin à l’Environnement. «La renaturation permet de laisser la nature travailler elle-même, ajoute Amélie Léger. La rivière peut « absorber » une petite partie de la pollution.» Les travaux s’élèvent à 3,6 millions d’euros.
Coût et calendrier des travaux
L’ensemble du projet s’élève à 9 millions d’euros. L’Union européenne, via le Feder, règle une grande partie de la note (de 35 % à 75 % des travaux selon les phases). De quoi fermer le clapet aux eurosceptiques qui ont toujours l’impression que l’UE ne sert à rien! Le reste est pris en charge par les communes ou les gouvernements. Les premiers travaux vont avoir lieu cette année. Aucune date de fin du plan n’a été donnée. De toute façon, il ne faudra pas s’attendre à des miracles en quelques années… «En 2020, l’eau de l’Alzette sera un peu plus limpide», a conclu Éric Jacquin. Il faudra ensuite régler le problème de la gestion transfrontalière des eaux de pluie, qui peuvent aussi drainer des polluants.
Hubert Gamelon