Alors qu’il a annoncé sa volonté d’obtenir un passeport luxembourgeois, Stéphane Bern a confié au Quotidien son amour pour le Grand-Duché mais aussi sa volonté de défendre le pays de ses racines.
De ses vacances passées au Luxembourg chez ses grands-parents, Stéphane Bern garde un souvenir impérissable. Une madeleine de Proust à l’origine de sa passion pour l’histoire et les familles royales, mais surtout de son attachement pour le Grand-Duché. Cet amour le suit aujourd’hui au quotidien et il tient à l’entretenir. Que ce soit à travers ses billets ou dans ses déclarations, il est aujourd’hui l’un des plus grands défenseurs du Luxembourg auprès de ceux qui ont tendance à penser que la richesse du pays ne réside que dans ses banques.
Vous avez récemment annoncé officiellement votre volonté de demander un passeport luxembourgeois à partir du 1er avril. Que représente cette démarche pour vous ?
Stéphane Bern : C’est quelque chose de naturel pour moi. Comme toutes les personnes qui sont concernées par la nouvelle loi, je m’estime en droit de demander le recouvrement de la nationalité luxembourgeoise. C’est un retour aux sources, vers mes origines luxembourgeoises. Malheureusement, j’ai perdu ma grand-mère il y a six ans et depuis je me sens orphelin du lien que j’ai avec le Luxembourg. J’ai besoin de retrouver un ancrage affectif avec mon pays.
Vous avez publié en novembre dernier Mon Luxembourg, un livre dans lequel vous racontez notamment les vacances que vous passiez ici étant enfant. Quels souvenirs en gardez-vous ?
Je pense que tous les enfants ont un royaume enchanté de l’enfance. Il se trouve que la discipline chez mes parents à Paris était un peu sévère et que ça se relâchait quand j’étais chez mes grands-parents à Luxembourg. J’ai assimilé le Luxembourg à un havre de paix, de tranquillité et de liberté. C’est d’ailleurs mon grand-père qui m’a initié au goût de l’histoire. Je n’aurais jamais été ce que je suis sans le Luxembourg, mon amour pour l’histoire et les familles royales est né pendant ces vacances.
Vous parlez dans votre livre d’un lien puissant et mystérieux qui existe entre vous et la famille grand-ducale. Comment l’expliquez-vous ?
Mon amour pour la famille grand-ducale est apparu très tôt et mon rêve était évidemment de pouvoir la rencontrer. Ce lien mystérieux dont je parle est aussi lié à mon amour pour ce pays. Je suis d’ailleurs le seul de ma fratrie à avoir ce sentiment. J’avais plus de facilité que mes frères à venir ici et je détestais aller chez mes grands-parents paternels à Lyon. Je me suis d’ailleurs fâché avec une partie de ma famille, car j’ai osé l’écrire dans l’un de mes livres quand j’avais 20 ans.
Dans le cadre d’une interview, vous avez été le premier journaliste reçu au château de Colmar-Berg par le Grand-Duc Jean. Qu’avez-vous ressenti ?
C’était un rêve, mais je dirais que c’était avant tout un sentiment d’accomplissement. Avec ce moment, j’ai pu guérir une réelle névrose de mon enfance. Dès l’âge de 10, 12 ans, j’avais pour habitude d’écrire au Grand-Duc Jean les 5 janvier à l’occasion de son anniversaire. Je lui souhaitais une bonne santé, je commentais l’actualité et je lui présentais mes vœux pour lui et le pays tout simplement. Il était un symbole très puissant pour moi.
Ce symbole, vous l’évoquez très souvent comme un véritable héros…
Oui, c’est vraiment le héros de mon enfance. Pour beaucoup c’était Bob Morane, mais pour moi c’était le Grand-Duc Jean. J’ai rencontré beaucoup de chefs d’État qui ont participé à la Seconde Guerre mondiale et il est le seul à avoir vraiment risqué sa vie pour son pays. Il n’a pas été protégé quand il a débarqué en Normandie, c’était un soldat des Irish Guards comme un autre et il aurait pu y rester. C’est vraiment un héros de la guerre et j’aurai toujours une déférence pour lui.
Si on vous demandait de décrire rapidement le Grand-Duc Jean, vous répondriez quoi ?
Le Grand-Duc Jean est un gentilhomme au sens XVIIIe du terme. C’est-à-dire un homme qui a eu une éducation incroyable, profondément pudique et timide, né pour servir les autres. Une chose qui me frappe toujours, c’est la modestie qu’il a malgré ses grands exploits. Il a une bienveillance non feinte. Il a été élevé pour servir son pays et son peuple sans pour autant se mettre en avant.
Que représente à vos yeux Mon Luxembourg ?
Quand les gens me demandent « pourquoi Mon Luxembourg? », je leur explique que c’est finalement ma vraie biographie. Si vous voulez me comprendre, je suis là. Ce pays m’émeut, ce pays me touche. Dans ce livre, j’explique pourquoi j’aime l’histoire et surtout pourquoi je suis tel que vous me voyez aujourd’hui. Plus jeune, j’ai eu quelques problèmes familiaux et avec la famille grand-ducale je me suis trouvé une famille idéale. Une famille que j’ai aimée sans rien demander en retour.
Elle a comblé un manque ?
Oui, sans doute, car ma famille n’était pas très aimante, un peu sévère. Je reste à ma place : la famille grand-ducale n’est pas ma famille au sens premier du terme, mais je me la suis appropriée. C’est une famille que j’ai appris à connaître. Si elle n’était pas là, personne ne pourrait d’ailleurs incarner l’identité, la culture et la continuité de cet État. Quand on va au bout du monde, on ne peut pas citer beaucoup d’entreprises luxembourgeoises, en revanche, tout le monde connaît la famille grand-ducale. J’ai une dévotion pour elle et je la considère, au fond, comme mon souverain, bien que je sois franco-luxembourgeois.
Entretien réalisé par Mathieu Rosan
Retrouvez l’intégralité de notre interview consacrée à Stéphane Bern dans Le Quotidien papier de ce lundi.