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Violences faites aux femmes : bientôt une loi européenne ?


(photo AFP)

Le Parlement européen se prononcera ce mercredi 24 avril sur la première loi de l’Union européenne contre les violences faites aux femmes, un texte qui exclut cependant le viol, faute d’accord entre les États-membres sur une définition commune.

La législation prévoit de criminaliser au niveau européen les mutilations génitales féminines, le mariage forcé, le partage non consenti d’images intimes, ou encore le cyberharcèlement, ouvrant ainsi la voie à des sanctions harmonisées au sein des 27 pays de l’UE.

Elle vise aussi à donner aux victimes un meilleur accès à la justice et à la santé.

Pour Lola Schulmann, chargée des droits des femmes à Amnesty international, le texte présenté au vote des eurodéputés est « un premier pas important ».

« Dans les États qui n’ont pas aujourd’hui d’ambitions fortes concernant les violences faites aux femmes, ça peut permettre à la société civile de maintenir une pression sur ces États », souligne-t-elle.

Mais la loi est aussi une « occasion ratée », estime-t-elle, « à la fois parce qu’on n’intègre pas le consentement dans la définition du viol et parce que les personnes les plus ciblées par les violences basées sur le genre, que ce soient les femmes sans papiers, les travailleuses du sexe, des femmes lesbiennes, ne sont pas clairement identifiées comme particulièrement vulnérables »

Le texte a fait l’objet d’intenses discussions pendant des mois, en particulier sur la question de la définition juridique du viol, qui diffère selon les pays.

Le projet, tel que présenté en mars 2022 par la Commission européenne, prévoyait dans son article 5 une définition du viol fondée sur l’absence de consentement. Le Parlement européen et des pays comme la Belgique, la Grèce, l’Italie, le Luxembourg et la Suède étaient sur la même ligne.

Mais une douzaine d’États membres, notamment la France, l’Allemagne et la Hongrie, étaient opposés à l’inclusion du viol dans la législation, estimant que l’UE n’a pas de compétence en la matière et que le texte risquait d’être retoqué par la justice européenne en cas de recours.

« On ne peut attendre cinq ans »

Lors d’un débat mardi au Parlement européen, la corapporteure du texte, la Suédoise Evin Incir (S&D, gauche) a regretté « qu’à cause du président Macron, à cause du président libéral Orbán, nous n’ayons pas réussi à aller plus loin que cela ».

« Le travail n’est pas terminé, mais cette directive est extrêmement importante », a-t-elle défendu, soulignant que les États « devront davantage protéger et défendre les victimes en ligne et hors ligne ».

Lors du même débat, la Française Manon Aubry, coprésidente du groupe La Gauche, a exprimé sa « colère » face au blocage français sur la définition européenne du viol.

Nathalie Colin-Oesterlé, membre du PPE (droite, premier groupe au Parlement européen) a, elle aussi, déploré la position du président français. « Une directive sur les violences faites aux femmes sans parler du viol, ça me semble invraisemblable », a-t-elle déclaré.

Les tenants d’une définition commune du viol autour de la notion de consentement font valoir qu’elle est conforme à la Convention d’Istanbul sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes, ratifiée par l’UE.

Avec une quarantaine d’eurodéputés de tous bords politiques, Nathalie Colin-Oesterlé soutient un amendement pour réintégrer la question du viol dans le texte. Mais celui-ci a peu de chances de passer, faute de soutien suffisant.

Soulignant qu’une révision de la directive n’est prévue que dans cinq ans, l’élue française juge qu' »on ne peut pas attendre cinq ans pour bouger sur cette question. »

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