Les six pays fondateurs de la Communauté européenne, devenue ensuite l’Union européenne, ont dit mardi à Rome être prêts à relancer le projet européen, à bout de souffle, quitte à laisser certains des 28 États membres sur le bas-côté.
« Nous sommes préoccupés par l’état du projet européen », affirment dans une déclaration commune les ministres des Affaires étrangères de ces six pays (Allemagne, Belgique, France, Italie, Luxembourg et Pays-Bas), conviés mardi soir à Rome pour « lancer une réflexion commune sur comment renforcer l’Union européenne ».
Affichant un credo nettement pro-Europe, même si cela peut sembler « à contre-courant » selon le chef de la diplomatie italienne Paolo Gentiloni, ces six pays veulent croire que l’Union reste la « meilleure réponse » aux défis d’aujourd’hui. Mieux, elle doit aller vers davantage d’intégration pour être efficace et pertinente dans la résolution des crises auxquelles elle est confrontée, à commencer par celle de l’immigration. « Nous restons résolus à continuer le processus de création d’une union toujours plus étroite entre les peuples d’Europe », indique ainsi cette déclaration commune.
Cette déclaration se veut ouverte à tous, mais reste réaliste en reconnaissant que de nombreux pays de l’UE ne partagent pas cet enthousiasme européen. Ces six pays estiment sur ce point que l’Union européenne « permet différentes chemins dans l’intégration ». « Nous sommes parfaitement conscients qu’il y a des difficultés, que tous les pays ne partagent pas l’exigence et l’importance d’un engagement commun », a ainsi reconnu devant la presse M. Gentiloni, en évoquant les blocages dans la mise en oeuvre d’une politique commune sur les migrants.
Autour d’une « petite table »
Le ministre italien s’est d’ailleurs amusé de la « petite table » autour duquel les ministres avaient pris place, et qui a permis, a-t-il dit, d’avoir une « discussion, très, très utile ». L’Europe à deux vitesses est un concept qui n’a jamais eu bonne presse en Europe, même si elle est pourtant réalité, avec par exemple une zone euro de 19 pays sur 28.
Mais pour Rome, et d’autres capitales européennes, cette Europe à géométrie variable n’est plus tabou. « Une Europe plus intégrée sera une Europe des différences », a ainsi expliqué le secrétaire d’Etat italien aux Affaires européennes, Sandro Gozi. « Il est illusoire de penser que 28 pays aillent tous à la même vitesse et fassent tous la même chose au même moment », a-t-il ajouté.
Le chef du gouvernement italien, Matteo Renzi, le répète à l’envi: cette Europe ne fonctionne plus et si elle ne change pas, elle disparaîtra, emportée par la vague populiste qui ne cesse d’enfler, y compris dans la péninsule. Il faut donc bouger et vite, selon le bouillonnant chef du gouvernement italien, qui en a fait l’un de ses credo en politique. « Le moment est arrivé d’ouvrir un débat sur comment fonctionne l’UE aujourd’hui et comment elle pourrait mieux fonctionner », a ainsi affirmé M. Gozi, un proche de M. Renzi.
Le calendrier est favorable, selon Rome. L’an prochain, l’Europe « fêtera » ses 60 ans d’existence depuis la signature du traité de Rome, tandis que des élections nationales sont prévues en France et en Allemagne. Or, aujourd’hui, « il n’y a pas de doute que l’Europe traverse l’un des moments les plus difficiles de son histoire », a affirmé M. Gentiloni.
Ce « mix de difficultés a créé un ensemble de doutes et de crises qui risquent de mettre en péril le projet européen tout entier », a-t-il averti. Ce premier débat, « informel » et qui ne prétend pas se substituer à d’autres « formats » de réunion dans l’UE, reprendra avec une nouvelle réunion, cette fois en Belgique, a encore dit le ministre italien.
Le Quotidien / AFP