Épatant en latéral droit avec le F91, devenu titulaire costaud en sélection, Kevin Malget attend sereinement la liste de Luc Holtz, ce jeudi, pour les amicaux contre la Bosnie et l’Albanie.
Avec un but et une passe lors des deux dernières journées de championnat, on peut dire que le défenseur international a repris 2016 aussi bien qu’il avait terminé 2015. On attend désormais d’avoir la confirmation, contre la Bosnie de Pjanic le 25 mars, et une Albanie qualifiée pour l’Euro, le 29 mars, qu’il a franchi un vrai palier.
Depuis quand est-ce que vous ne vous faites plus vraiment de souci avant l’annonce d’une liste?
Kevin Malget : Mais… Je ne sais même pas si je suis sûr d’y être. Bon… normalement, j’y serai et cela ne fait pas si longtemps que je le sais à l’avance. Avant, j’attendais l’appel. À une époque, c’était dur, mais je sais comment ça marche le foot : c’est la vérité d’un jour. Au moins, si on ne m’appelait pas, je savais ce qu’il me restait à faire, travailler. C’était facile.
Maintenant aussi, ça l’est. Vous avez semble-t-il gagné vos galons.
Quelques jours avant la liste, j’y pense quand même un peu. Parce que je dois m’organiser, prévenir mon travail.
C’est difficile, cette organisation des mois de matches internationaux, avec les stages de plus d’une semaine?
Pas à mon travail. Je bosse chez Losch et ils sont très gentils. Ils comprennent ma situation. Vous savez, beaucoup d’employeurs ont refusé de m’embaucher en me disant que je partais trop souvent pour le foot. En fait, j’ai eu 45 refus. C’est comme ça, c’est le business! Mais ça a été compliqué de trouver un travail.
Quand avez-vous su, que ce soit en club ou en sélection, que vous étiez en train de franchir un cap?
(Étonné) Mais je ne sais pas! Je ne l’ai pas vu. Tout ce que j’ai fait, c’est travailler dur. Le reste, ce que vous me posez comme question, je n’y pense pas. Je ne me suis jamais posé la question de savoir si je devenais important.
Pas même quand Luc Holtz vous a offert le poste de votre coéquipier de club, Tom Schnell, dans l’axe de la défense luxembourgeoise, en fin d’année 2015?
Oui, je suis son coéquipier et on s’entend bien. J’ai mes qualités, il a les siennes, mais on n’en parle pas parce qu’on sait comment ça marche. Tout ça, ce n’est important ni pour lui ni pour moi : on est copains et on ne prend cette concurrence que sur l’aspect sportif. Il n’y a pas de sentiments là-dedans. Je veux jouer, mais je ne critique pas le coach s’il en choisit un autre. Je me tais et je travaille.
Mais ça ne vous est jamais arrivé de penser que vous méritiez plus votre place sur le terrain qu’un autre?
Si, jusqu’à mes 18 ans. Mais penser aux autres plutôt qu’à soi, ce n’est bon ni pour l’équipe ni pour soi. Je m’en suis rendu compte avec l’expérience.
Vous jouez à droite avec le F91 et dans l’axe en sélection. Quel poste préférez-vous?
Je préfère être sur le terrain. Même si on me demande de défendre en position d’avant-centre, je serai content.
Elle est déjà très offensive votre mission sur le flanc droit, avec le F91…
Oui. Il a fallu que je fasse énormément d’efforts concernant un de mes gros points faibles, l’endurance. À la fin d’un match de Division nationale, je ne vais pas trop mal, mais je sais qu’en sélection, c’est encore parfois insuffisant. J’ai disputé quelques matches dans un couloir (NDLR : 70 minutes face à la Moldavie et 90 minutes en Ukraine, au mois de juin dernier) et j’avais les jambes vraiment très dures le lendemain parce que physiquement et mentalement, c’est bien plus difficile. Là oui, je m’étais fait mal.
Quelques coéquipiers disent aussi que votre corps a beaucoup changé ces derniers temps. Que vous vous infligez de longues séances de musculation…
(Il hésite) Bah… des séances de 45 minutes avant les entraînements. Et des étirements aussi. Le but, c’est de gagner en puissance. Mais si vous dites que mon corps a changé, je ne sais pas. Franchement, je ne me regarde pas tous les jours dans une glace.
Qu’est-ce que vous pouvez encore travailler pour progresser? Votre émotivité sur un terrain?
Oui. Je dois rester plus calme. C’est un des points dont je discute avec ma famille, qui me le rappelle parfois.
Qu’est-ce qui vous énerve sur un terrain?
Beaucoup de choses! Par exemple les fautes intentionnelles.
Mais c’est le b. a.-ba du défenseur! Vous devez en commettre aussi!
Oui, parfois, j’en commets. Mais alors l’adversaire récupère le ballon, non? Et ça, ce n’est pas très bon.
Ce n’est pas un peu romantique comme vision, pour un défenseur international?
Oui, c’est peut-être romantique, mais c’est l’idéal, non? Et arriver à l’idéal, c’est parfois bien plus difficile. Ça ne veut pas dire qu’on ne doit pas essayer, et d’ailleurs, récupérer un ballon sans commettre des fautes, c’est ce que tous les coaches nous demandent.
Vous parliez de votre famille tout à l’heure. Beaucoup de suiveurs du football national postulent que les problèmes judiciaires qu’a pu rencontrer votre père (NDLR : Théo Malget, international aux 46 sélections dans les années 80 et 90, avait été reconnu coupable d’escroquerie et avait purgé une peine de prison) à une époque, ont pu vous perturber et freiner votre éclosion. Il y a une part de vérité dans cette analyse, selon vous?
Non, les gens se sont fait des idées. Moi, ce que je pense, c’est que ces soucis, c’est la vie.
Ils ne vous ont pas perturbé?
Non, ce n’est pas le cas. C’est moi et moi seul qui décide de ce qui peut me perturber. Et d’ailleurs, les gens m’ont laissé assez tranquille avec cette histoire.
Il est important, votre père?
Oui, mais il ne me conseille pas. Je sais ce que je dois faire et en règle générale, je n’aime pas les parents qui sont au bord des terrains à crier sur leurs enfants. La notion de plaisir, en foot, c’est important.
La prochaine campagne, elle va vous apporter beaucoup de plaisir?
Une campagne, c’est toujours très excitant, mais là, les adversaires sont vraiment très intéressants. Et là, c’est la Suède qui m’excite le plus.
Vous aimez bien Ibrahimovic?
Non, je ne l’aime pas. Mais jouer contre l’homme qu’il est, ça, ça m’intéresse. Je pense que c’est une chance de sortir d’un match en sachant précisément où on en est de son niveau. Quand on joue contre un homme comme ça, on sait forcément.
Avant ça, il y a notamment la Bosnie, dans dix jours. Vous étiez de la génération Pjanic.
Non. Enfin oui, mais je n’ai presque fait que m’entraîner avec lui. Ensemble, on a disputé un seul match, sauf que moi, je suis resté toute la rencontre sur le banc. C’était contre l’Allemagne. On avait perdu 2-1 et il avait marqué sur un corner direct. Dommage quand même. Quand on joue ou qu’on s’entraîne avec un garçon comme ça, on progresse plus vite.
Vous pourrez vous rattraper avec Vincent Thill, qui devrait honorer sa première sélection à la fin du mois et qu’on annonce aussi fort que Pjanic…
Je ne l’ai encore jamais vu jouer et j’ai entendu très peu de choses sur lui. Mais je sais que tout le monde dit qu’il est très fort, alors on va voir…
Propos recueillis par Julien Mollereau
Arrogant wie sein Vater, der Verbrecher.