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Bébé maltraité : «Sans doute, je l’ai serré trop fort»


Le procès des jeunes parents qui comparaissent pour avoir maltraité leur fils de cinq semaines à Saeul s’est poursuivi vendredi à Diekirch. Selon le père, c’était des accidents.

À son arrivée au CHL début décembre 2013, le nourrisson souffrait de nombreuses fractures : une double fracture du tibia gauche qui remontait à plusieurs jours, une fracture de la clavicule droite et six côtes cassées. Le CHL avait signalé le cas aux autorités. Et une affaire judiciaire avait été ouverte.

On se trouve devant la chambre criminelle. Et il dit qu’il regrette ce qu’il a fait comme s’il avait volé un paquet de chewing-gum. » Avec ces mots, le premier substitut visait vendredi après-midi l’attitude du père de 25  ans poursuivi pour avoir infligé une série de blessures à son fils, âgé à peine d’un mois, à Saeul.

C’est un véritable calvaire qu’a subi le nourrisson fin 2013. À son arrivée au Centre hospitalier de Luxembourg (CHL) le 9  décembre, l’équipe médicale relève sur la petite victime une fracture multiple de la jambe, un hématome à la joue avec une éraflure, une fracture de la clavicule droite et six côtes cassées.

À cela s’ajoute son air résigné. Il ne fixait plus aucun adulte des yeux. « C’est un signe d’alarme très grave quand on voit un enfant avec ce type de comportement , expliquait vendredi une pédiatre. Il y a dû y avoir une douleur intense et durable sur l’enfant. » Elle poursuit  : «L’enfant s’est replié sur lui-même. » Le nourrisson était resté hospitalisé jusqu’au début du mois de mars 2014 avant d’être placé dans une famille d’accueil.

« Je n’ai jamais eu l’intention de faire du mal à mon fils. » À la barre de la chambre criminelle à Diekirch, le père a parlé d’accidents. Le tribunal n’a toutefois pas reçu d’explications sur l’origine de toutes les blessures. « Sans doute, je l’ai serré trop fort. » Voilà sa version pour la fracture de la clavicule. La blessure à la joue c’est parce qu’il aurait été surmené à cause de ses pleurs. Il aurait fini par le pincer. Entre sa femme qui se remettait tout doucement de l’accouchement avec césarienne, le stress avec le nouveau-né et sa fatigue due au début de sa sclérose en plaques… « Et votre chien vous a-t-il également surchargé?», finit par l’interroger le président. –« Non, à celui-là on s’était habitués. »

La mère vit aujourd’hui dans un foyer pour femmes avec leur deuxième enfant. À la barre, la trentenaire a éclaté en sanglots : « J’avais peur que cela puisse arriver une nouvelle fois. » Elle conteste la non-assistance à personne en danger que le parquet lui reproche. « Quand j’ai vu sa jambe enflée, je lui ai mis de la crème », appuie-t-elle.

Quatre ans ferme requis contre le père

M e Tania Cardoso a plaidé l’acquittement de la mère. Elle n’aurait été témoin d’aucune violence alarmante. Et elle aurait uniquement vu la blessure à la jambe. « Une jambe bleue chez un nourrisson, c’est alarmant. Cela doit alerter , a rétorqué le premier substitut. Elle avait connaissance du péril grave. Il y a eu abstention volontaire. » Le parquet requiert deux ans de prison à son encontre. Au tribunal de décider s’il y a lieu d’assortir la peine d’un sursis.

Contre le père le parquet requiert huit ans de prison, dont quatre assortis d’un sursis probatoire avec l’obligation qu’il suive un traitement pour son comportement agressif. « Il n’avait pas de mauvaises intentions », a estimé M e Cardoso demandant son acquittement. Or, pour le premier substitut, « les blessures n’ont pas été infligées par inadvertance.

Tous les médecins qui ont examiné le nourrisson ont parlé d’actes de maltraitance. Je pense qu’il avait l’intention de lui faire du mal ». Le parquet retient l’absence d’aveu du prévenu. Mais note la ribambelle d’excuses livrées au fil de l’instruction  : « D’abord il y a eu le syndrome d’Asperger, ensuite la mauvaise médication, puis la sclérose en plaques .» Vu son trouble d’hyperactivité (TDAH), l’expert psychiatre s’est prononcé pour retenir une atténuation de la responsabilité pénale du père. Le parquet s’y oppose.

M e Josiane Eischen, l’administrateur ad hoc de l’enfant, s’est constituée partie civile. Elle réclame 75  000  euros de dommages et intérêts ainsi qu’une provision de 10  000  euros. Selon elle, l’enfant a notamment des soucis au niveau de l’équilibre et présente un certain retard au niveau émotionnel.

Prononcé le 23 novembre.

Fabienne Armborst